Chevènement pressenti à la tête de la fondation pour l'islam : "un choix surprenant et qui pose des questions"

"Proposer pour prendre la tête de cette organisation quelqu'un qui n'est pas de sensibilité musulmane est pour moi une interrogation" a déclaré ce matin François Bayrou au micro d'i>Télé.

François Bayrou, bonjour.

Bonjour.

Nous allons commencer avec le dossier si sensible du financement de l’islam de France. Jean-Pierre Chevènement pressenti pour être à la tête de cette fondation des oeuvres de l’islam en France, est-ce une bonne idée ?

Je trouve que c’est un choix surprenant et qui pose des questions. On a une religion dont les lieux de culte sont pour une partie financés par des pays étrangers. Non seulement, cela pose des questions mais c’est insupportable aux yeux de beaucoup. Ce n’est pas acceptable car l’on voit bien que des influences peuvent s’exercer. Or si l’on croit que la communauté nationale est unie, si l’on croit que notre pays est indépendant, si l’on croit que les Français de toute religion doivent organiser leur vie ensemble sans influence extérieure alors évidemment cela pose une question. Le gouvernement et d’autres ont dit qu'il fallait interdire ces financements étrangers. Il faut trouver des financements français qui permettent aux musulmans français de trouver un financement pour leur propre lieu de culte. De ce point de vue, il y a une organisation qui a été montée depuis longtemps et qui ne marche pas.

Pourquoi fonctionnerait-elle mieux maintenant ?

J’espère qu’aujourd’hui avec les questions qui se posent, beaucoup de gens vont prendre conscience qu’il faut avoir une attitude responsable. Mais proposer pour prendre la tête de cette organisation quelqu’un qui n’est pas de culture musulmane est une interrogation. Comment voulez-vous que les musulmans de France aient ce sentiment de responsabilité si on leur dit en fait que c’est de l’extérieur et par des responsabilités tout à fait estimables - Jean-Pierre Chevènement est dans ce cas - mais qui ne partagent ni votre foi, ni votre culture que l’on va régler le problème de vos financements des lieux de culte ! Il y a là quelque chose qui, en tout cas pour moi, est une grande interrogation. Ce sont des membres de la communauté nationale. On reconnait en instaurant cette organisation pour le financement des lieux de culte qu’ils ont leur place légitime dans la société française ! Et on leur enlève le droit, la légitimité, de s’occuper de cette question si sensible pour eux et pour la communauté nationale. 

L’autre solution est la taxe halal. Vous êtes pour.

Ce n’est pas une autre solution, c’est une réponse à la question que nous posions au début. Si on interdit les financements étrangers, alors il faut pouvoir trouver des financements nationaux. Ces financements nationaux ne peuvent pas être par l’impôt - vous voyez bien toutes les polémiques que cela ferait naître - ni uniquement par des financements privés. Mais on peut trouver un financement qui avait été suggéré par Charles Pasqua il y a déjà 20 ans avec l’accord d’un grand nombre de responsables musulmans qui est de passer par une contribution sur la certification religieuse des mets, de la nourriture, de la viande, etc. C’est ainsi qu’il y a participation de la communauté musulmane et cette participation n’est pas discrétionnaire si j’ose dire ! Je trouve que c’est une piste. Je sais bien qu’il y a des gens qui ne sont pas de cet avis mais s’ils ne sont pas de cet avis, il faut qu’ils proposent d’autres choses qui soient crédibles ! Si on veut imposer des règles, encore faut-il que ces règles soient assorties de moyens.

Pour lutter contre le terrorisme, vous avez décidé d’armer votre police municipale. Dans un premier temps, vous étiez contre. La menace est-elle devenue trop grande ?

La menace a changé de nature. La police municipale était faite pour les conflits de voisinage. Vous avez des types alcoolisés dans la rue, la police municipale intervient. Vous avez des problèmes entre voisins, la police municipale intervient. Vous avez une agitation, une rixe, la police municipale intervient pour mettre de l’ordre. Dans le cadre de ces missions, l’armement devait être un armement de proximité. C’est ce que j’avais défendu depuis longtemps. Mais j’ai étudié de près le drame de Nice. Lors du drame de Nice, on s’aperçoit quand on étudie la succession des événements que les policiers municipaux étaient là au même titre que la police nationale. Leur mission était la même ! Le but de leur action était d’arrêter une horreur, en l'occurence de stopper ce camion fou. Donc, comme les missions sont les mêmes pour la police municipale et la pôlice nationale, il faut que l’armement soit le même. À Pau, notre police municipale est équipée de flashball. Que voulez-vous qu’un flashball fasse en face d’une voiture qui se lance vers une foule ? Il faut pouvoir l'arrêter et évidemment cela demande, comme la menace a évolué, une évolution de la réponse. Être responsable, c’est exactement cela. Vous regardez le risque, vous appréciez la difficulté. On sait qu’il y a toujours des accidents qui peuvent arriver, des tragédies qui passent au travers. Mais au moins, chaque fois qu’un événement grave se produit, vous en tirez les conclusions pour faire évoluer l’organisation.

À Pau, êtes-vous confronté à ces cas de radicalisation ?

Je considère que j’ai une responsabilité de secret mais oui, il y en a.

Beaucoup ?

Je n’ai pas dit « beaucoup » mais il y a des risques, comme partout en France. En face de ces risques, il y a la justice et nous travaillons en étroite information mais la contrepartie - je me suis toujours tenu à cette ligne - est le secret. Vous n’êtes pas là pour faire de la communication, de la publicité, ou pour révéler des choses. Vous êtes là pour être en situation de responsabilité. Quand la justice et la police travaillent, il faut les accompagner et être en situation de soutien plutôt qu’en situation d’intervention déplacée.

Je voulais que l’on parle ce matin de la colère du maire de Pennes-Mirabeau dans les Bouches-du-Rhône. Michel Amiel s’apprête à prendre un arrêté municipal interdisant un événement dans un parc aquatique de sa commune qui autorise la baignade en burkini - cette tenue de bain islamique couvrant le corps de la tête aux chevilles. Auriez-vous fait pareil ?

On ne doit pas prendre des événements isolés comme cela pour en faire des événements à scandale. Chacun, dans sa situation de maire, juge. Je considère qu’aujourd’hui, ce n’est pas là qu’est le risque. Il y a deux grands sujets. Premièrement celui du risque, qui est lourd, important, devant lequel les responsables publics, locaux ou nationaux sont en première ligne et c’est de cela dont nous parlons. Il y a un deuxième sujet, celui de la place des pratiques, du mode de vie musulman dans la société française. Il y a dans la société française ce souci, ce souhait, de ne pas voir cette société changer sous la pression de tels ou tels nationaux ou résidents présents sur notre sol. Ce souci d’intégrité, de préservation de la société française est très important. Il est très important que ces deux sujets que j’ai évoqués - je sais que cela ne correspond pas à la philosophie des chaines d’information - soient traités avec le recul nécessaire de manière à ne pas mettre le feu à la société française.

Dans ce contexte extrêmement tendu, dans cette rivalité entre extrême droite, droite et gauche, quel rôle le MoDem et vous pouvez-vous jouer ?

Nous avons la chance d’être un mouvement politique libre ! Si vous regardez les enquêtes d’opinion sur l’image des différents partis politiques, alors vous verrez que le MoDem - s’il n’est pas le plus puissant - est cependant le plus apprécié des Français qui estiment qu’il y a là des gens libres, honnêtes, qui n’ont pas d’affaires et ne sont pas divisés.

Serez-vous candidat en 2017 ?

J’ai dit que si Alain Juppé était choisi par la primaire de son parti, je le soutiendrai. S’il n’est pas choisi, alors je ferai ce qu’il faut faire. 

Votre électorat va-t-il vous suivre dans cette démarche ?

Je le crois beaucoup, oui. Vous avez vu l’estimation des intentions de vote et comme vous savez, c’est une estimation qui pour moi constitue un socle très important, très haut, plus haut qu’il ne l’a jamais été. 

Lorsque François Hollande dit que Nicolas Sarkozy est allé "trop vite, trop loin", a-t-il raison ?

Les guéguerres perpétuelles sur fond électoral et de préparation de l’élection présidentielle nuisent aux soucis que nous devons partager. Si vous prenez la gravité des événements auxquels nous devons faire face et si nous les ramenons au plus petit bout la lorgnette qui est la guerre entre F. Hollande et N. Sarkozy ou entre tel ou tel responsable politique alors nous passons à côté de la gravité des choses ! Je suis persuadé que si l’on veut restaurer l’image des politiques alors il faut qu’ils s’astreignent eux-mêmes à une autodiscipline dans laquelle ils ne passent pas leur temps à dévoyer la politique. 

Rama Yade a dit « La classe politique n’est plus à la hauteur, elle ne fait plus envie aux Français ». Partagez-vous cette phrase ?

Je n’emploie pas le mot de « classe politique » parce que que tous ceux qui emploient ce mot en font partie ! Je parle de responsables publics, d’hommes ou de femmes d’État s’il faut mais je ne veux pas employer ce mot qui est aussi une manière de troubler la démocratie à laquelle nous appartenons. 

Un mot des JO. Le coup d’envoi est demain à Rio au Brésil malgré la forte tension politique et sociale dans le pays. Est-ce que ce sera une réussite ? Vous y croyez tout de même à ces jeux et des ces décors sublimes ?

Je m’interroge toujours sur les milliards de dollars ou d’euros que l’on dépense pour ces événements quand on voit la situation des peuples. Alors j’espère que ces milliards de dollars dépensés sont allés réellement à des réalisations parce que vous savez tout ce qui se raconte à l’heure actuelle sur la situation de ces marchés... J’espère que cela servira les peuples, car c’est eux au fond qui sont en première ligne. Si j’avais un pari à faire, je dirais que pour l’avenir nous allons rechercher pour les événements de cet ordre la sobriété. Non pas que l’on ne les organisera pas mais je trouve que l’on devrait être soucieux de l’argent que l’on dépense dans ces affaires parfois un peu excessivement !

Cela veut-il dire que vous n'êtes pas pour Paris 2024 ?

Non. C'est Tony Estanguet qui porte le drapeau. Comme vous le savez, il est de Pau, c'est un très grand champion et de surcroît un ami. Donc je suis pour que mes amis connaissent des succès et qu'ils soient heureux des affaires qu'ils prennent en main.  

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