Energie : "Avançons sans se faire imposer de l'extérieur des choix dogmatiques"

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Dans une interview à Energie2012 du 14 octobre 2011, Yann Wehrling, porte-parole du Mouvement Démocrate et responsable de l'Environnement et du Développement durable au sein du Shadow cabinet, dessine la démarche qui sera celle de François Bayrou en matière d'énergie qui "avancera dossier par dossier, en dessinant les solutions raisonnables, sans se faire imposer de l'extérieur des choix dogmatiques".

Comment le MoDem se positionne-t-il par rapport aux débats actuels sur l’énergie ? 

François Bayrou, qui n’a pas encore annoncé ses options, va partir de questions simples, de celles que se posent la majorité des Français, et avancer dossier par dossier, en dessinant les solutions raisonnables, sans se faire imposer de l’extérieur des choix dogmatiques, a priori. Si tout le monde est sensible, à juste titre, à ce qui s’est passé à Fukushima, la vraie dépendance de la France est à l’égard des énergies fossiles. C’est la vraie grande question, qui est en outre la clé de la réponse au risque de changement climatique. 

Le deuxième enjeu est le nucléaire, dont tout le monde parle de façon un peu trop exclusive. Il ne s’agit pas de l’évacuer, mais il faut resituer les choses. Oui, si on pouvait avoir moins de fossiles, ce serait bien. Oui, si on pouvait avoir moins de nucléaire, voire plus de tout, ce serait bien. Mais comment fait-on ? Il faut analyser domaine par domaine, voir comment on peut générer les économies et trouver l’énergie pour maintenir un niveau acceptable d’activité dans le logement, la mobilité, l’industrie, qui sont les trois grands secteurs consommateurs. 

Au MoDem, on est dans cette démarche : il ne faut pas partir du point de vue de principe "on va arrêter le nucléaire", mais il faut réfléchir au niveau d’effort que l’on peut faire. Si, par une plus grande efficacité énergétique et un développement des énergies renouvelables, on peut répondre aux défis à une échéance moyenne (2030) ou longue (2050), alors on aura réussi notre objectif de réduire les énergies fossiles et le nucléaire. Mais si on commence par dire "pour ou contre le nucléaire", on va avoir un débat stressant, dogmatique, diviseur, qui ne répondra de toute façon pas aux questions essentielles. 

Examiner dans chaque domaine la réduction de la consommation qu’on peut atteindre, estimer les développements possibles en énergies renouvelables : c’est le travail que je conduis actuellement en tant que responsable du Développement durable au MoDem, et que je synthétiserai dans un document que je finalise actuellement pour François Bayrou. 

Vous avez défini trois secteurs : mobilité, habitat, industrie. Quelles sont les grandes orientations qui conduiraient à plus d’efficacité ? 

Dans le domaine du transport, la consommation a explosé depuis les années 90, en raison de l’ouverture des marchés, donc d’une plus grande circulation des biens et des personnes. L’objectif sera de revenir en 2050 à un niveau proche de celui des années 90. Pour cela, il n’y a pas de recette miracle. Il faut une série de mesures équilibrées à trouver. 
Par exemple, mettre plus de marchandises sur les rails et sur les fleuves. Mettre le paquet pour un parc automobile moins consommateur, parce que plus innovant, plus léger, plus hybride, plus électrique, plus "partagé" également (auto-partage, locations…). Il faudra aussi mettre en place des politiques originales au niveau des grands centres urbains pour réduire la circulation, car cela est faisable et acceptable par les citoyens en raison de l’existence de transports alternatifs. Il faudra lâcher un peu de lest sur les transports en zones rurales, là où la voiture individuelle est souvent indispensable. 

C’est cette approche raisonnée, progressive, nuancée que nous privilégions. Même si l’objectif est ambitieux, puisqu’il faut chercher une réduction de consommation de quelque 30 pour cent d’ici 2050. 

Et dans le logement ? 

Les gains énergétiques possibles sont considérables car on a un parc ancien mal isolé thermiquement. Rien qu’en isolant correctement un bâtiment énergivore, on divise par 3 ou 4 la consommation. On peut envisager, dans ce domaine du bâtiment qui est parmi le plus consommateur d’énergie, près de 30 pour cent d’économie au moins d’ici 2050. Donc la question du système de chauffage est moins déterminante que celle de l’isolation. 

Le problème est le financement. Même si les techniques actuelles conduisent à des coûts beaucoup plus acceptables, il y a une difficulté à surmonter sur le long terme. Dans le neuf, c’est assez simple. En 2050, près de 30 pour cent du parc de logement sera nouveau et il n’y aura pas d’obstacle majeur à aller vers des bâtiments thermiquement passifs. On peut imaginer que demain tous les bâtiments neufs seront étanches à l’air, avec une bonne ventilation. 

Mais on n’a pas résolu la question du financement de la rénovation du bâtiment ancien. Nous y réfléchissons avec de nombreux experts. Dans l’état actuel de la dette, l’Etat ne peut y consacrer des milliards par an. Il faudrait trouver un système d’éco-redevance sur toutes les gammes de produits, selon leur empreinte carbone (cf. travaux de l’Afnor sur l’affichage environnemental des produits), qui viendrait abonder un fond d’investissement public. La redevance peut être d’autant plus légère qu’elle concernera beaucoup de produits. 

Il y a eu déjà une tentative d’instaurer une taxe carbone, mais l’erreur a été de prévoir que l’argent dégagé serait redistribué aux ménages. Un tel financement n’a d’intérêt que s’il est affecté à améliorer l’efficacité énergétique. Et il aurait l’avantage supplémentaire de réduire le poids des presque 50 milliards d’euros d’importations en produits pétroliers et gaziers, qui est de l’argent qui "part en fumée" vers nos grands fournisseurs, la Russie, l’Arabie Saoudite, etc. Et ce montant ne fera qu’augmenter dans les années à venir. 

Cet argent rentrerait dans l’économie réelle française et, en diminuant les factures énergétiques, il redonnerait du pouvoir d’achat. Il faudrait considérablement développer les prêts à taux zéro pour la rénovation de l’habitat ancien avec un système de remboursement garanti sur les économies d’énergie. 

Enfin, vous avez cité les économies possibles dans l’industrie… 

C’est un secteur qui a déjà fait beaucoup d’efforts. Il faut les poursuivre dans les secteurs les plus énergivores. C’est d’ailleurs dans l’intérêt des entreprises, qui dans certains secteurs, ont des charges de fonctionnement qui sont à 15 ou 20 pour cent d’ordre énergétique, une part qui pourrait monter à 40 ou 50 pour cent dans un contexte de hausse des prix de l’énergie. Mais là aussi il faut regarder domaine par domaine, toujours dans notre esprit d’une approche non dogmatique. 

Bien sûr, il faut aussi inciter les industries à recourir in situ aux énergies renouvelables. Je pense notamment au bois-énergie ou au solaire. Les énergies renouvelables, c’est le deuxième pilier, avec les économies de consommation, de toute politique énergétique. On voit déjà les développements possibles, en matière de solaire ou d’éolien et il y a là une marge d’innovation technologique considérable. A titre de comparaison : qui pouvait prévoir dans les années 80 ans le niveau technologique que l’on a atteint aujourd’hui dans la téléphonie mobile ? Les énergies renouvelables et leur stockage (batteries) ont sans aucun doute un potentiel de développement très important. 

J’ajoute que le développement des réseaux européens et méditerranéens de transport d’énergie nous permettrait à la fois de mutualiser les productions renouvelables dans chaque Etat et donc développer les meilleures énergies au meilleur endroit (éolien off shore en mer du Nord – centrale solaire dans les déserts), renforcer l’idée d’une Politique Commune de l’Energie, réduire les coûts, et résoudre certains problèmes d’intermittence actuel des énergies renouvelables.

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