Zone euro : "Nos entreprises ont besoin d'une harmonisation de la fiscalité"

Invité du journal l'Opinion, François Bayrou a plaidé pour "une harmonisation de la fiscalité" de la zone euro, qui permettrait à nos entreprises d'être sur un pied d'égalité avec celles de nos voisins européens.

Nicolas Beytout - Il y a un peu moins d'une semaine, le président de la République a lancé une grande initiative sur l'Europe, lors de sa conférence de presse. Depuis, rien ou pas grand chose. Était-ce une bonne idée ou juste une manœuvre ?

François Bayrou - Je pense que c'était une idée. J'espère une idée directrice de la politique qui va être celle de la France. Mais ne pas avoir de suivi, ne pas avoir de relais de cette idée est un peu inquiétant. De quoi s'agit-il ? D'une orientation de fond, qui ne concerne pas seulement la France mais l'ensemble de ses partenaires de la zone euro, autour d'une idée simple que je défends depuis longtemps : nous ne pouvons pas avoir une monnaie unique si en face nous n'avons pas un gouvernement. Si vous avez une monnaie unique mais pas d'organisation du territoire, alors vous avez le regroupement des activités sur la zone la plus rentable et leur disparition ailleurs. Il faut une autorité politique et cette autorité doit être démocratisée. C'est une idée de fond, une orientation décisive exprimée par François Hollande. Il n'est pas tout à fait le premier, le gouvernement allemand avait dit des choses semblables. Maintenant, il faut naturellement qu'intervienne une opération qui rende cela faisable et compréhensible, une opération de conviction et de réalisation.

Monnaie unique, politique économique unique... et fiscalité unique ?

Il faut aller vers une harmonisation des fiscalités. C'est d'ailleurs ce que François Hollande a dit. Conséquence pour les pays qui ont une fiscalité plus faible que la moyenne : son augmentation. Conséquence pour ceux qui ont une fiscalité au dessus de la moyenne : son aménagement, pour qu'elle soit un jour compatible avec les autres. Ce qui, pour les entreprises françaises par exemple, serait très important.

Aujourd'hui, l'orientation qu'il serait souhaitable de prendre au nom de l'Europe, c'est la baisse des impôts ?

Ce n'est pas "au nom de l'Europe". Tout le monde fait comme si les décisions que nous avons à prendre seraient des décisions forcées par l'Europe. On dit : "Ce n'est pas possible, les déficits, les 3%, la dette... L'Europe nous interdit, elle nous force à..." Mais ce n'est pas du tout l'Europe ! C'est parce que la France ne peut plus assumer le poids d'une dette aussi lourde que nous avons le devoir, l'obligation nationale et non européenne, d'harmoniser les choses. Si c'est en harmonie avec la voix directrice de l'Union européenne, c'est bien. La baisse des impôts, ce n'est pas pour l'Europe mais parce que les ménages et les acteurs économiques français ont à supporter des charges extrêmement lourdes. Nous avons 20% de dépenses publiques en plus que nos principaux partenaires, pour des services dont on ne peut pas dire qu'ils soient vraiment meilleurs. Et nos dépenses publiques excèdent nos recettes de 10 points !

UNIVERSITÉS : "LA VRAIE QUESTION, C'EST CELLE DU RECRUTEMENT DES ENSEIGNANTS"

Vous êtes un grand amateur de la langue française. Un projet de loi présenté aujourd'hui à l'Assemblée nationale prévoit de légaliser l'enseignement en anglais dans les universités françaises. Pour ou contre ?

Franchement, c'est quelque chose qui me laisse entre perplexité et fou-rire. On s'est glorifié, gargarisé sous le précédent gouvernement, à mon avis excessivement, du fait qu'on avait rendu les universités autonomes. Et aujourd'hui il faut une loi pour savoir si on a le droit de faire un enseignement en anglais ? C'est complètement ridicule.

Et sur le fond ?

Sur le fond, tout le monde sait bien qu'il faut une maîtrise de la langue anglaise. Le bain linguistique, le fait qu'on ancre les étudiants dans la langue anglaise pour faire cours, ça existe depuis des décennies et même dans beaucoup de lycées. Vous voyez bien que c'est une chose paradoxale et stupéfiante qu'il faille une loi pour savoir comment une université doit organiser ses cours...

Mais c'est parce qu'une loi existe déjà, la loi Toubon de 1994, et que certains ne la respectent pas.

Tout cela fait partie du caractère dérisoire de nos organisations. Il y a une question universitaire très forte qui n'est pas traitée aujourd'hui : Comment faire pour que les universités qui ne sont pas dans le haut de la pyramide y entrent ? Comment faire pour que les universités de villes moyennes, je suis élu de Pau, remontent dans le peloton de tête ? C'est une question qui touche au recrutement des enseignants. J'ai défendu une idée qui vous semblera sans doute baroque, c'est la méthode utilisée par les basketteurs américains dans la NBA. On classe tous les candidats et l'université considérée comme ayant besoin de progresser a le droit de choisir le premier.

Le haut du panier, comme on dirait au basket.

Ce serait une obligation d'installation pour quelques années, pour cinq, sept ou dix ans. Vous voyez bien qu'il y aurait là une irrigation et la fin d'un certain nombre de réseaux. Trop souvent, on a l'impression que l'université française est en circuit fermé, "réseautée" et avec un localisme excessif.

MANIFESTATION DU 26 MAI : "IL FAUDRA TENIR COMPTE DU NOMBRE DE MANIFESTANTS"

Dimanche prochain une manifestation doit rassembler des centaines de milliers de Français contre le mariage homosexuel et la politique du gouvernement. Votre parti n'appelle pas à manifester. Est-ce que, s'il y a beaucoup de monde, cela vous paraît indifférent ?

Non. Le droit des citoyens de s'exprimer par la manifestation est un droit constitutionnel. Donc ça n'est pas indifférent et le nombre n'est pas indifférent.

Alors pourquoi ne pas appeler à la rejoindre ?

Parce que je ne me sens pas en phase avec la manière dont un certain nombre d'organisateurs présentent les choses. J'ai défendu il y a dix ans, à l'époque où personne n'était sur cette ligne, une union qui donnait reconnaissance et droits. La manière dont les choses ont été présentées ces derniers mois, trop conflictuelle et trop clivante, ne me paraît pas aller dans le bon sens.

Mais s'il y a beaucoup de monde, il faudra en tirer les conséquences ?

Il faudra en tenir compte. Je n'arrive d'ailleurs pas à accepter cette pantalonnade, qu'à chaque manifestation on ne sache jamais le nombre de manifestants. Il n'y a qu'à mettre une autorité indépendante, légère, complètement extérieure à la police et aux organisateurs, chargée de faire les comptes.

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