"Les parlementaires ne sont pas là pour faire des pressions malsaines sur les membres du gouvernement."

Ce matin, Jacqueline Gourault était l'invitée de Cyril Viguier dans la matinale de Public Sénat. Nous vous invitions à revoir cette interview.


Bonjour à tous, bienvenue en ce vendredi dans la matinale d’infos de Public Sénat avec les télés locales de France qui nous rediffusent, les Indéradios – 130 radios qui sont nos partenaires dans tout l’Hexagone – et avec Télé 5 Monde. L’invitée politique aujourd’hui en direct sur ce plateau ce matin, bonjour, c’est Jacqueline Gourault...

Bonjour.

Bonjour madame, le ministre auprès du ministre de l’intérieur, merci d’être notre invitée politique ce matin. Pour vous interroger, à mes cotés : Marcelo Wesfreid, du Figaro pour Public Sénat. Et Stéphane Vernay. Merci beaucoup d’être là ce matin. Jacqueline Gourault, on en vient à l’actualité tout de suite. Les forces de l’ordre ont débloqué Tolbiac ce matin tôt à 5 h, est-ce que l’état de droit sera rétabli partout comme le dit Gérard Collomb votre ministre de tutelle sur Twitter ce matin, est-ce que le gouvernement a choisi le bras de fer pour sortir de la crise des facs ? 

Il n’a pas choisi le bras de fer, il a choisi l’état de droit. C’est quoi l’état de droit ? C’est que l’université soit un lieu où puisse se dérouler normalement le travail des professeurs et des étudiants et naturellement l’ensemble des facs –c'est-à-dire quatre qui sont occupées – sont concernées évidemment. Mais je dirais que ça sera au cas par cas, vous voyez Tolbiac c’était...

Oui, pourquoi maintenant Tolbiac, c’est la question qui vient tout de suite ?

Pourquoi maintenant ? Parce que déjà le président de l’université avait demandé l’intervention à Tolbiac...

Mais la préfecture de police avait hésité, vous aviez hésité ?

Oui ils ont hésité, c'est-à-dire qu’ils ont bien étudié les conditions, parce que chaque fac est différente, je veux dire sur le plan matériel, physique, de construction et il est évident que Tolbiac est un immeuble, nous savions que dedans il y avait un certain nombre de gens qui était installé, qu’il y avait des parpaings, des barres de fer, des engins plus ou moins explosifs, enfin plus ou moins...

Vous aviez des informations venant de l’intérieur ?

De l’intérieur de la fac, on a eu des descriptions assez précises de ce qui se passait à l’intérieur...! Donc, s’il y a eu intervention ce matin, c’est parce que les conditions étaient réunies pour qu’il y ait le moins de risques possibles – je dis le moins parce qu’on n’est jamais sûrs à 100 % quand il y a une intervention – le moins de risques possibles sur le plan humain.

Et comment on stabilise la situation sachant qu’une fois que les CRS seront partis, la fac peut, à nouveau, être bloquée ?

Il faut organiser les locaux pour empêcher d’autres personnes qui n’ont rien à faire souvent là - c’était le cas en tout cas à Tolbiac - des groupuscules qui ne sont pas des étudiants de l’université, donc il y aura une organisation. Il y aura des travaux de faits extrêmement rapidement parce qu’il y a eu aussi des dégradations...

Beaucoup de dégradations ?

Assez de dégradations qui ont été faites dans l’immeuble, oui.

Vous êtes face à des gens qui s’inspirent de la zone à défendre de Notre-Dame-des-Landes, la ZAD, est-ce que tant que la ZAD de Notre-Dame-des-Landes ne sera pas dégagée est-ce que vous n’avez pas le risque de contagion comme ça sur d‘autres conflits un peu partout ?

Chaque dossier a sa particularité, sa spécificité. C’est vrai que ce soit dans les occupations ou les manifestations qui ont eu lieu hier, il y a des cheminots qui sont là, mais il n’y avait pas de cheminots à Tolbiac,  il y a des contestataires et des gens parfois violents, engagés politiquement dans des groupuscules parfois marginaux, qui recherchent la violence et l’affrontement et qui se servent du mécontentement parfois d’étudiants qui se posent – légitime – qui se posent des questions, donc effectivement il faut veiller à ce que chaque dossier soit traité et qu’il n’y ait pas d’utilisation par des groupuscules extrémistes de cette situation sur le territoire.

La grogne sociale c’est aussi la SNCF, hier l‘intersyndicale a claqué la porte des négociations avec la ministre des Transports Elisabeth Borne, en disant : « il y a un problème de méthode, on concerte et en même temps on apprend dans la presse que le fret va être filialisé, que le statut des cheminots va s’achever en janvier 2020 », est-ce qu’il ne faut pas revoir la méthode ?

Ecoutez, je ne suis pas au cœur de la négociation, mais évidemment je connais bien Elisabeth Borne. C’est quelqu’un de suffisamment méthodique pour savoir précisément ce qu’elle fait et ce qu’elle dit. Et elle avait déjà annoncé la date de 2020 comme étant une date importante de convergence des décisions : premier point de la mise en concurrence, deuxième point bien évidemment du fait qu‘à partir de 2020 il n’y aurait plus d’embauche où le statut...

Mais alors qu’est-ce qu’il y a encore à négocier ?

Et comme vous le savez de grandes avancées ont eu lieu dans la négociation : un certain nombre de garanties pour les personnels actuels de la SNCF sur le plan des salaires, sur le plan des retraites, sur le plan de leur statut pour ceux qui sont actuellement à la SNCF. Et donc ça s’explique d’ailleurs par un vote très large à l’Assemblée nationale puisqu’il y a eu plus de 450 – je ne sais plus le chiffre exact – seulement 80 voix d’opposition. Donc on voit bien qu’une vraie concertation a lieu, a eu lieu, qu’elle a apporté ses fruits puisqu’un certain nombre de choses ont été introduites dans la loi. Evidemment après il y a les positions syndicales – et en particulier la CGT  qui a fait à nouveau je dirais un coup d’éclat et j’espère que tout va rentrer dans l’ordre.

En tous les cas 15.000 personnes rassemblées dans les rues de Paris hier, c’est un chiffre qui vous parle ? C’est beaucoup, pas beaucoup ? Est-ce que c’est significatif de la suite du mouvement ?

D’abord je ne sais pas s’il n’y avait que des gens de la SNCF, même si d’après ce que j’ai lu dans les dépêches c’était plutôt le gros des troupes...

15.000 c’est relativement peu par rapport à ce qu’on a connu, est-ce que c’est le signe d’un essoufflement pour vous ?

Oui ! Sur l’ensemble du territoire français, il y a eu une mobilisation proportionnelle à l’échelle de ce que vous dites pour Paris. Ce n’est pas une mobilisation extraordinaire. 

50.000 il y a un mois, 1.000 contre 50.000 il y a un mois...

50.000 selon la police et 300.000 selon les syndicats. Est-ce que vous avez l’impression que la CGT est en train de s’isoler ?

Sûrement, parce qu’on voit bien que sur le plan de la SNCF, on ne voit pas très bien et l’opinion publique ne voit pas très bien pourquoi il y a ce blocage et cette tension, parce que les choses se passent comme elles ont été annoncées et avec des réponses à des questions posées par les personnels actuels qui sont satisfaites, donc il y a un moment où on voit plus très bien, alors on peut être aussi contre l’ouverture à la concurrence, la CGT est contre l‘ouverture à la concurrence. L’autre réponse aussi qui a été apportée et qui vous vous rappelez à un moment faisait beaucoup débat c’était la dette. La réponse a été aussi apportée par le président de la République, d’ailleurs en s’engageant sur la date également de 2020.

Qu’est-ce qui permettrait de sortir de la crise notamment dans le dialogue avec la CGT, ça va être quoi le ou les points-clé aujourd’hui qui pourraient faire que les choses s’apaisent ?

J’avoue que c’est seule la volonté de la CGT qui pourra vraiment... 

Tout a été fait de votre point de vue ?

Je veux dire on peut toujours comment dire être perfectible dans tous les camps si je puis dire. Mais, franchement, beaucoup de choses ont été faites, beaucoup de négociations ont eu lieu. Et franchement cette manière hier de claquer la porte n’est pas à l’avantage de la CGT, en tout cas aux yeux de l’opinion.

C‘était l’intersyndicale hier qui a claqué la porte, tous les syndicats, CFDT comprise.

Oui.

C’est Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l’Intérieur qui est notre invitée politique ce matin en direct sur le plateau de Territoires d’infos. On va passer à la loi Asile et Immigration. Madame la Ministre, les débats débordent. On va siéger à l’Assemblée nationale samedi, sans doute dimanche, à quoi attribuez-vous ce retard ? Vous pensiez que ça irait plus vite ? 

C’est assez simple, c’est simplement qu’il y a eu une volonté politique…

Obstruction ?

De faire durer le débat…

Obstruction, vous parliez d’obstruction ?

Oui, d’obstruction pour faire durer le débat et pour essayer (je pense) que la loi ne passe pas avant le week-end, puisqu’il y a les vacances parlementaires. Certains parlementaires LR le reconnaissent, j’ai lu ça dans votre journal ce matin…

Celui de Marcelo Wesfreid, Le Figaro.

Il y avait une volonté effectivement, ça se voyait sur le terrain quand j’étais au banc, si je puis dire…

Au banc du gouvernement, vous voulez dire.

Avec des utilisations de procédures, des blocages, des questions permanentes qui, comme vous le savez, m’ont un peu…

Oui, c’est ce qui explique votre colère de mercredi alors que vous êtes réputée pour être d’un calme olympien, vous avez surpris tout le monde. Est-ce que vous regrettez…

Non, je ne le regrette pas, je ne le regrette pas parce que d’abord…

Ça a généré un buzz qui a un peu perturbé le débat !

Oui, il y a eu un buzz, on vit avec des réseaux sociaux, c’est comme ça. J’ai dit simplement que je n’acceptais pas cette manière d’avoir des méthodes extrêmement autoritaires, j’ai utilisé ce mot, voilà. Enfin ! Je ne vais pas… j’ai dit deux mots sur un ton ferme mais si vous voulez, je l’assume totalement parce que quand on veut bloquer, qu’on répète sans arrêt la même question et qu’en plus on le fait d’une manière extrêmement violente verbalement -si je puis dire- et effectivement sous forme d’intimidation ! Tout le monde doit se respecter au Parlement. Le rôle d’un ministre est effectivement d’être là pour représenter le gouvernement et d’écouter les parlementaires, mais les parlementaires ne sont pas là pour faire des pressions malsaines sur les membres du gouvernement.

Madame Gourault, sur le fond la question qui vous était posée en boucle c’était : est-ce qu’il va y avoir un plan de régularisation de 40.000 sans-papiers… 

Alors un plan caché, effectivement c’est les termes utilisés, est-ce que sur le fond vous n’avez pas tenté (le gouvernement) d’amadouer les plus… l’aile gauche on va dire des députés de La République en Marche, en leur suggérant qu’effectivement il y aurait ce plan de… en tout cas des régularisations importantes ? 

Je crois d’abord que ce n’est pas tout à fait dans le tempérament du ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur de faire des négociations cachées. Il n’y avait pas de plan caché ou secret…

Mais des régularisations !

Ce que j’ai dit, je l’ai même dit hier déjà au Talk du Figaro, il y a tous les ans des régularisations. Il y aura des régularisations, c’est tout à fait exact, puisqu’il y a des gens qui sont dans des statuts et depuis de très longues années sur le territoire français sans statut. Il y a toujours des régularisations. Mais il n’y aura pas de régularisation ni massive ni secrète ; et Gérard Collomb avait déjà indiqué, en Commission des lois à l’Assemblée nationale, qu’un débat pourrait s’engager sur ce sujet en Commission des lois à l’Assemblée.

Madame Gourault, est-ce que vous pouvez nous confirmer que la circulaire Collomb qui avait fait polémique en décembre, elle a permis de recenser 4.000 migrants dans les centres d’hébergement d’urgence ; et quelle a été son utilité à cette circulaire ?

Cette circulaire c’était le prolongement de ce qu’avait dit le président de la République à Orléans, vous vous rappelez, ce discours à Orléans où tout le monde s’était focalisé – et les réseaux sociaux en particulier – sur une partie du discours où le président de la République avait dit qu’il n’y aurait plus personne qui coucherait dehors avant la fin de l’année, vous vous rappelez ? 

Plus de SDF.

Et déjà dans ce discours, le président de la République avait indiqué qu’il pensait utile qu’il y ait – sur le volontariat et par les agents de l’OFPRA, de l’OFII qu’il y ait des interventions qui soient faites dans les centres d’hébergement pour savoir d’où venaient les migrants pour les orienter le mieux possible, pour les aider à faire des demandes d’asile si nécessaire, etc., pour voir ceux qui étaient dublinés ou pas. Donc c’était dans un sens - je dirai - d’efficacité, d’efficacité pour tout le monde, y compris pour les émigrants.

4.000, vous confirmez le chiffre ?

Je ne confirme pas le chiffre parce que je ne l’ai pas en mémoire.

D’accord.

Pour terminer sur ce sujet, le chef de l’Etat était mardi à Strasbourg devant le Parlement, il a émis l’idée d’un financement européen pour aider les collectivités à héberger les migrants. Qu’est-ce que vous en pensez, quelle forme ça pourra prendre ?

Je pense que déjà sur l’idée des migrations, il est évident que c’est un sujet européen ; et qu’on ne pourra solutionner le problème de l’émigration que dans le cadre européen, avec une solidarité européenne et aussi peut-être voir les règles européennes, comme par exemple les fameuses règles de Dublin dont je viens de parler. Et qu’il y ait au niveau européen un financement pour les Etats accueillants des migrants, je trouve ça juste.

On est ici au Sénat Madame Gourault, vous avez été sénatrice, le président du Sénat est vent debout contre la réforme institutionnelle telle qu’elle est présenté, puisqu’il dit « il a rajouté des choses qui n’étaient pas du tout dans ce qu’on avait discuté avec le président ; et qui vont affaiblir les pouvoirs du Parlement ».

Alors je n’étais pas aux discussions entre le président du Sénat et le président de la République…

Mais vous avez entendu parler du courroux de Gérard Larcher.

J’ai entendu le courroux de Gérard Larcher, ce n’est pas le premier courroux, nous avons eu successivement plusieurs courroux.

Et sur le fond, est-ce que ça déséquilibre...

Alors sur le fond, bien évidemment et moi j’ai une vie de parlementaire, je n’oublie pas que j’ai été parlementaire, et la démocratie doit pouvoir s’exprimer totalement au sein des Assemblées. Ceci dit, quand on voit les capacités d’obstruction qu’il peut y avoir actuellement, qu’on régule un certain nombre de choses, je suis tout à fait d’accord avec certaines choses, qui sont peut-être à peine assez envisagées dans la réglementation. Mais il y a à la fois ce qui dépend de la réforme constitutionnelle ; et puis il y a aussi ce qui dépend du règlement intérieur. Parce qu’il ne faut pas confondre les deux. Et il y a beaucoup de choses qui peuvent aussi se régler au niveau du règlement intérieur. Mais là, il s’agit je crois de l’histoire de l’échec après la CMP, d’une lecture qui irait directement à l’Assemblée nationale, et sur ce plan, Gérard Larcher conteste cette…

Sur les points qui font débat et qui restent à discuter, vous-même vous aviez émis l’idée que sur le taux proportionnel à 15  % qui était proposé, ça pouvait se négocier, se discuter, ce que demande notamment François Bayrou. Comment ça va se passer ?

Ça va se passer qu’il va y avoir un débat parlementaire ; et que naturellement le débat parlementaire va permettre à un certain nombre de gens de déposer des amendements et d’engager le débat, pour voir quel est le bon niveau…

Vous avez bon espoir que ça peut bouger ?

En tout cas, je pense que le débat parlementaire fera bouger, oui.

Jacqueline Gourault, vous êtes très proche de François Bayrou, on voudrait avoir de ses nouvelles, est-ce qu’il est malheureux au fond de ne pas être au gouvernement, on a beaucoup lu qu’il avait vraiment souhaité revenir vivement, il est dans sa mairie de Pau. Vous discutez avec lui régulièrement, vous connaissez son état d’esprit, voilà, aujourd’hui ?

Oui, je parle aujourd’hui quotidiennement, donc…

Quotidiennement ?

Oui, vous savez quand on a des amis très proches, on parle avec eux. Et en plus quand on est dans l’action politique, chacun à son niveau et chacun à sa place, mais évidemment nous parlons beaucoup. François Bayrou n’entend pas revenir au gouvernement, il n’a pas une impatience particulière contrairement à ce que vous dites. Il est très heureux d’être à Pau dans sa ville et sa Communauté d’agglomération et son pays béarnais qu’il vient de construire. Bien entendu en même temps, il est évidemment très engagé, c’est un homme engagé, ce n’est pas un spectateur, c’est un homme…

Il est très consulté par le président de la République ? 

Ils se voient régulièrement et il est en accord avec le président de la République d’une manière général ; et très heureux de l’action du président de la République et du gouvernement dans notre pays.

Merci Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l’Intérieur, d’avoir été l’invitée politique de Territoires d’Infos. Merci.

 

 

 

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