"J'ai toujours été un acteur et je le resterai"

Merci beaucoup François Bayrou de nous accueillir à Pau, dans ce palais des congrès et dans cette ville dont vous êtes maire. Vous avez été Garde des Sceaux pendant un mois et demi, contraint de démissionner…

Pas contraint.

Pas contraint, vous avez décidé de démissionner alors que le Parquet de Paris avait ouvert une enquête préliminaire sur les assistants parlementaires du MoDem. On a envie d’avoir de vos nouvelles, de savoir aussi comment vous regardez ce quinquennat Macron, avoir peut-être les ordonnances du Docteur Bayrou, et savoir aussi si vous êtes le sage de Pau ou le retraité de Pau.

Cela je ne sais pas, mais retraité aucune chance, ce n’est pas du tout mon choix ni mon genre. La première chose, je voudrais vous dire merci d’être venu à Pau, non seulement parce que c’est une ville magique comme vous le voyez. Ici à cet endroit même, Lamartine a dit dans une lettre à Stendhal : « Pau c’est la plus belle vue de terre du monde comme Naples est la plus belle vue de mer ». C’est la première raison, mais il y en a une deuxième : je suis très heureux que vous veniez en province, parce que, très souvent, on a l’impression que la politique ça se fait à Paris. Or les racines et la sève de la politique c’est toutes les régions de France, et je suis – comme vous le savez – de cette sensibilité qui aime les régions et qui pense que là se jouent des choses importantes. Donc doublement merci.

Cela voudrait dire qu’il y en a qui pense un peu moins et qui sont moins enracinés dans leur région, dans leur terroir ?

Les temps ne sont pas des temps d’enracinement, vous savez bien. Je considère comme une grande chance d’avoir et ce parcours, d’être né et grandi dans cette terre et en sachant ce qu’est la vie réelle de la province, d’un pays. Je ne suis pas un parachuté, je n’ai pas l’intention de l’être et donc je suis très heureux que vous soyez là, doublement.

Mais moi j’entends beaucoup, peut-être et je me trompe, que, au gouvernement, aujourd’hui, ceux qui se sont présentés comme ceux qui vont faire la nouvelle politique, ce fameux « nouveau monde » est moins enraciné que vous, par exemple.

Non, je ne veux pas dire cela, d’abord, parce que j’ai l’intention de soutenir le Président de la République et le gouvernement. Pour deux raisons : d’abord j’ai – comme citoyen et responsable politique – participé à ce choix du pays ; et la deuxième raison c’est que si cela devait rencontrer des difficultés trop graves alors je ne sais pas comment tournerait la situation. Je veux que – comme vous le savez – j’ai depuis très très longtemps pensé depuis des années, défendu l’idée que les partis traditionnels qui avaient tout le pouvoir entre leurs mains – singulièrement ces 2 partis – étaient vermoulus de l’intérieur, que cela ne marchait plus. Et puis, très longtemps, les commentateurs ont pris cela avec ironie en se disant que, ma foi, c’était un refrain. Mais c’était vrai, et nous avons pu en faire la preuve et cela a créé chez les Français un très grand espoir. A cet espoir je veux être fidèle. C’est la raison principale. La deuxième c’est qu’il y a en effet du côté des soutiens d’Emmanuel Macron, il y a 2 organisations : En Marche, qui est une organisation en constitution – je ne sais pas très bien quelles vont être leurs règles de fonctionnement mais c’est très intéressant parce que beaucoup de vocations nouvelles sont venues dans cette organisation - ; et il y a une organisation plus enracinée, on va dire, qui porte un patrimoine d’idées, d’idéal, de traditions politiques et une volonté de faire naitre une pratique nouvelle et c’est le MoDem, comme on dit, Mouvement Démocrate. Donc il y a 2 traditions et 2 sensibilités.

Oui, mais je vous arrête François Bayrou, parce que, justement, il y a une forme de rupture lorsque cette enquête et lorsque, aujourd’hui, on le sait, la justice enquête pour abus de confiance et recel de délit sur le cas d’assistants du MoDem, des assistants qui vous reprochent, un en particulier, de les avoir employés pour le parti et non pour le député européen pour lequel ils avaient été embauchés. Il y a une rupture de confiance d’image de votre parti et je vais aller plus loin, François Bayrou, vous vous souvenez, vous avez beaucoup donné des leçons de morales, vous avez porté en étendard la morale en politique.

J’ai porté, Ruth Elkrief, une exigence morale, et je la porte à chaque minute, et je vais vous dire une chose simple : à cette exigence morale et aux règles de fonctionnement, nous n’avons jamais manqué, vous entendez ça, nous n’avons jamais manqué. Après vous me parlez d’une enquête, je n’ai aucun élément d’information sur cette enquête.

C’est à dire ? Vous n’avez pas été convoqué par un juge, vous n’avez pas été auditionné ?

C’est plus que cela, je n’ai pas été informé, je n’ai pas été entendu et comment le serais-je puisque mon nom n’est même pas cité – que je sache- dans ces enquêtes. Quand aux députés européens de notre formation politique, je sais une chose, ils sont d’une absolue intégrité et ils ont – je n’ai aucun doute – respecté toutes les règles. Après il y a des dénonciations anonymes – dites anonymes, prétendues anonymes – qui sont le fait de certaines personnes, l’enquête devra dire ce qu’il en est. Je n’ai rien d’autre de plus à dire.

Est-ce que vous me dites qu’il faudrait que ça s’accélère parce que « J’en ai assez, je ne vois pas claire, je suis là à Pau et je suis obligé de rester et d’attendre que les choses s’éclaircissent » ?

Vous savez pourquoi j’ai décidé, non pas de démissionner, mais de ne pas participer au 2e gouvernement ? Pour une raison extrêmement simple : c’est que j’étais Garde des Sceaux et que sur ces accusations, sur ce tombereau d’accusations – orchestrées, répétées – je ne pouvais même pas dire un mot. J’étais, par ma fonction, interdit de dire un mot, et je n’ai pas envie de commenter l’action de la justice parce que je considère qu’elle doit faire son travail et que j’ai confiance dans le travail qu’elle fera et confiance dans ce que nous avons à lui dire, je n’ai aucun doute sur ce point.

J’ai quand même vraiment, vous avez vu cette expression de l’arroseur arrosé, de l’effet boomerang, de celui qui avait dit à Nicolas Sarkozy, à François Fillon, aux uns et aux autres « vous n’êtes pas dans les clous, vous ne faites pas cela ». Vous n’avez pas ce sentiment que c’est cela qui s’est passé ?

Ce que j’ai dit a été fondé tout au long des événements que vous évoquez et est encore fondé aujourd’hui, et prouvable aujourd’hui.

Donc vous ne regrettez pas, vous ne regrettez rien ?

Ce que j’ai dénoncé, ce sur quoi je me suis battu, très souvent, la justice a fait la preuve que nous avions raison, même quand nous étions seuls.

 Il y a des enquêtes. 

Pour le reste, les accusations, les mises en cause, les injures, vous avez fait suffisamment vous-mêmes les preuves de ce genre de choses pour que nous puissions considérer ensemble qu’on ne va pas fonder une vérité là-dessus. 

Non, mais aucune situation n’est semblable.

Bon, vous êtes d’accord avec moi.

Voilà en tout cas pour les affaires, une forme de rupture de confiance qui s’est passée entre vos électeurs, entre les Français et vous.

Nous verrons que ce n’est pas le cas, après les accidents en politique il y en a tout le temps. La politique est un sport violent assez souvent cruel, assez souvent scandaleusement injuste, il n’importe, l’essentiel est de tenir bon et de maintenir un cap, et – au fond – une certaine vision de ce que cela devrait être. J’avoue que je ne renonce pas à un certain idéalisme en politique.

Vous n’avez pas traversé de moment de vide, de creux, de déprime, vous avez ministre, vous avec porté une loi et puis tout d’un coup vous revenez à Pau ?

Mais Pau c’est formidable. Vous voyez ce que je disais sur Paris et la province.

Je parle de ministre.

La présentation que vous venez de faire, comme si c’était moins bien d’avoir une responsabilité dans une ville …

Magnifique.

Magnifique comme ici, avec des gens formidables et à la pointe mondiale, vous avez l’air de présenter cela comme étant moins bien, moi, je ne crois pas que cela soit moins bien.  Je ne crois pas que ce soit moins bien d’être à Pau que d’être à Paris, le combat pour moi n’a jamais cessé, ne s’est jamais interrompu et ne s’interrompra – j’espère – jamais.

Alors, justement, comme au maire de Pau, je vais poser une question d’actualités qui est sur les emplois aidés et sur la grogne des élus locaux. C’est l’actualité du jour, on le sent, un certain nombre d’élus locaux sont très inquiets : diminution des emplois aidés, suppression annoncée de la taxe d’habitation et puis baisse des dotations - alors, aujourd’hui, Christophe Castaner a dit qu’elle n’aurait lieu qu’en 2019. Est-ce que vous avez le sentiment, comme élu et maire de Pau, donc représentant aux administrés, que ces mesures sont une forme de sanction, de punition ? 

Alors, il y a en effet une émotion, parmi les élus locaux et cette émotion, sur un certain nombre de sujets, est normale, fondée, on ne va pas dire le contraire. Alors, comme maire de Pau, vous m’interrogez sur les emplois aidés, nous, nous en avons très peu, moins d’une quarantaine sur près de 3000 employés de la ville et de l’agglomération. Pourquoi ? Parce que j’ai toujours su que les emplois aidés, assez souvent, c’est de la fausse monnaie : c’est à dire qu’on vous les offre, quelque fois même en période électorale on vous force la main.

Oui mais enfin on s’intègre un peu à la société, on a un emploi, on peut payer son loyer.

Je n’ai pas dit que ce n’était pas bien. Je dis que j’ai toujours eu une forme de prudence à l’endroit de ces facilités, c’est la première chose. Deuxième chose : sur les emplois aidés je crois qu’il faut que l’on établisse une hiérarchie des urgences. 

Alors, justement, je propose que l’on écoute Emmanuel Macron, parce qu’il en a parlé aujourd’hui, vous allez me dire si vous êtes d’accord avec lui.

« Les contrats aidés, lorsqu’ils donnent lieu à une qualification, lorsqu’ils sont sur des priorités seront maintenus. Ils seront moins nombreux et plus sélectifs autour de 4 priorités, 2 priorités thématiques : l’éducation nationale pour l’accompagnement des élèves en situation de handicap et l’urgence sanitaire et sociale ; 2 priorités territoriales : l’outremer et les communes rurales »

Est-ce que cela correspond à vos priorités ? Vous pensez que c’est comme ça qu’on va le faire alors que ce sont encore des personnes de chair et de sang qui sont concernées ?

Moi, je voudrais insister sur un des points qu’Emmanuel Macron a évoqué c’est l’éducation. Parce que, en effet, à l’intérieur du monde de l’éducation ou des nécessités de l’éducation, les emplois aidés jouent un rôle ne serait-ce que pour accompagner des enfants ou des jeunes handicapés pour être avec eux, à côté d’eux et c’est une priorité. Mais il n’y a pas que cette œuvre d’éducation, j’insiste sur ce point. L’éducation nationale pour moi donc priorité des priorités, les autres sont intéressantes aussi mais je voudrais dire une troisième chose qui n’est jamais dite : les emplois aidés, un grand nombre d’entre eux sont pour le monde associatif, les associations permettent à la France de tenir quand ça va mal, ce sont les associations qui permettent à ce pays de garder du lien précisément quand ce lien disparaît. Je pense qu’il faut sortir de la logique des emplois aidés pour inventer un statut de l’emploi associatif, un statut de plein exercice pour l’associatif. Vous voyez, au lieu de dépendre des lubies parfois d’un gouvernement ou de ses exigences électoralistes – vous avez les chiffres en tête - : il y a 2 ans, parce qu’il y avait des impératifs pour faire baisser la courbe du chômage, on en a fait 480 000 ou 460 puis l’an dernier le gouvernement socialiste est tombé à 280 000, presque 180 000 de moins. Le gouvernement actuel en a remis 40 000 de plus et donc cette manie française – en anglais du stop and go – « j’accélère, je freine, je donne, je reprends », je propose qu’on réfléchisse tous ensemble et d’urgence à un statut nouveau de l’emploi associatif pour que les associations soient assurées de leur avenir, pour que, peut-être, on puisse trouver des facilités pour elles de remplir des taches et peut-être des facilités d’insertion pour un certain nombre de jeunes qui trouvent là la première marche de leur vie. Mais sortons de la logique de « je donne et je te reprends ».

Vous allez demander aux bailleurs sociaux, comme Emmanuel Macron aujourd’hui aux propriétaires, de diminuer de 5€ les loyers pour que la baisse des aides publiques au logement de 5€ - qui concerne notamment les étudiants – soit un peu amortie ? Elle a été vécue comme brutale.

Nous sommes dans une ville où le logement est très peu cher, c’est d’ailleurs un des atouts de la ville et notamment pour les étudiants -  on a 12 000 étudiants dans la ville -  et donc, de ce point de vue là, cette politique qui donne, propose des logements le moins cher possible, nous l’appliquons déjà.

Et vous comprenez que le Président suggère – il aurait peut-être du le faire en même temps qu’il annonçait la baisse des 5€ pour les étudiants ?

Je comprends qu’il exprime ce vœu pour que tout le monde suive ce mouvement. Il a lui-même qualifié l’annonce de la baisse de 5€ d’une manière assez forte, il dit que c’était une gigantesque « connerie », je crois, quelque chose comme ça, ce ne sont pas des mots que l’on emploie à la télévision.

Il dit qu’il y en aura d’autres, de nouvelles baisses.

Qu’il faille refonder de fond en comble le politique de logement, je suis d’accord. C’est une politique qui coûte des dizaines de milliards et qui fait, qu’en France, le logement est moins abondant qu’il n’est ailleurs et plus cher. Alors on a un problème, et ça ne peut se faire qu’en construisant un modèle différent et qu’en prenant le temps de le faire.

C’était trop rapide et trop brutal ? Il n’y avait pas de temps pour digérer l’annonce ?

On va dire que c’était un peu improvisé.

Et est-ce que vous diriez que c’était la marque de certaines mesures annoncées pendant l’été au mois de juillet qui ont un peu surpris et suscité un scepticisme des Français ?

Le mois de juillet – on va dire ça comme ça – était un mois de flottement. Le Président de la République sait bien puisque je lui en ai dis des fois, il y a mois de flottement jusqu’aux vacances de la mi-août. Depuis la rentrée ça va mieux, pour une raison précise qui explique les difficultés du mois de juillet et qui explique – me semble-t-il – le ressaisissement de l’action gouvernementale et du Président de la République : c’est que le Président de la République a parlé. Pendant toute la période précédente, c’était plus le choc des photos, plutôt que le poids des mots.

Les mots n’étaient pas là, les mots étaient insuffisants ?

Je pense qu’il s’est trouvé en situation de ne pas s’exprimer. Or, la Ve République ça se résume simplement : c’est le Président de la République qui entraine et pour qu’un Président entraine il faut qu’il s’exprime, il faut qu’il parle. Alors il n’a pas besoin d ‘être verbeux, surtout pas, mais je ne crois pas que ce soit une tentation, mais je pense qu’il faut que le Président de la République dise aux Français où on va, où il propose que l’on aille tous ensemble. Je pense que sa mission est une mission auprès des citoyens, une mission non seulement d’explication, non seulement de pédagogie mais d’entrainement par le cap – si j’ose dire – de montrer le chemin qui permet à tout le monde de se réunir.

Pause 

On se retrouve avec vous François Bayrou depuis ce palais des congrès de Pau, la très belle ville de Pau ou vous nous accueillez. Vous avez dit il y a une quinzaine de jour « l’opinion ne voit pas la clairement la direction et le but que le gouvernement se fixe. » Est-ce-que ça veut dire que « Jupiter » - trois guillemets - doit descendre de l’Olympe ?

Emmanuel Macron a été élu pour quoi ? Il a été élu, je crois, pour  deux ou trois raisons essentielles : la première, c’est qu’il bousculait – j’avais essayé de le faire- les situations politiques acquises des deux partis dominants et que les Français avaient le sentiment qu’on était au bout de quelque chose. Deuxième chose, c’est qu’il a fait preuve d’une audace, d’un courage, d’une volonté de renverser les obstacles les plus solides, les plus établis et je trouve que ça valait la peine. C’est assez rare dans la vie politique pour qu’on dise qu’il avait quelque chose.

Oui mais vous voyez que les sondages ont baissé et qu’il y a un scepticisme ou peut-être une saute d’humeur de l’opinion, il y a une inquiétude, une question.

Il y a deux choses, il y a, et c’est normal, le sentiment en tout cas les signes de l’opinion qui est un peu fâchée parce qu’on bouscule les choses, ça c’est normal- il ne faut pas s’en plaindre - c’est ce qu’on a cherché et c’est ce que beaucoup de français attendent. Parce qu’il y a je crois dans l’opinion publique, même si il y a des sondages beaucoup moins flatteurs, il y a quand même une attente positive. Les Français attendent mais ils n’ont pas enlevé leur estime, leur adhésion. Et puis il y a une deuxième chose qui est l’incertitude, ça n’est pas la même, ce n’est pas le même mouvement de l’opinion et c’est à cette incertitude que je pensais, que je pense toujours et qu’il faut répondre. On croit, et je suis sur que dans la majorité beaucoup croient que parce qu’on a dit des choses pendant la campagne présidentielle, c’est acté. Ce n’est pas la première fois, François Hollande, Nicolas Sarkozy, très souvent on entendait ce refrain « On l’a dit pendant la campagne donc on doit le faire ».  Ce n’est pas, vrai à chaque minute quand on a pris la responsabilité du gouvernement, on doit reconstruire ce mouvement d’adhésion, de confiance et d’explication. A chaque minute.

 Il ne le fait pas assez le président ?

Pendant la première partie il ne l’a pas fait assez et ce que je vous dis, je lui ai dit naturellement, parce que personne ne peut s’exprimer sur la direction du pays à la place de celui qui en est le premier responsable. Car une politique c’est une cohérence entre des buts qu’on se fixe et même les personnes qui travaillent, qui remplissent, et seul le chef de cette équipe peut traduire pour l’opinion. Il y a beaucoup de manière de traduire, par la parole, par le verbe, il y a même d’autres formes. Regardez le président des Etats-Unis, prenons Obama parce que c’était pour moi une assez belle image – je suis moins convaincu par la période actuelle - mais Obama, il parlait tous les trois ou quatre jours – vous le savez vous étiez de ceux qui écoutaient les Présidents des Etats-Unis. Trois ou quatre minutes suffisent pour dire les choses. Et puis il y a des formes d’expressions plus structurées, plus écrites. Tout ça, je dirais que c’est la première responsabilité du Président.

Mais dans ce que je voudrais comprendre, comment vous expliquez qu’il n’ait pas jugé utile, parce qu’il a voulu se positionner comme Président avec une stature particulière pour rétablir peut-être l’image du Président. Mais du coup il y a une erreur, c’est d’avoir oublié ce contact ou on a aussi entendu- je ne parle pas que d’Emmanuel Macron - mais dans ses relais, il y avait peut-être une forme un peu d’amateurisme, peut-être de manque de professionnalisme de sa nouvelle politique.

Peut-être un très grand sentiment de réussite pour avoir parmi ses relais, parmi ceux qui l’entouraient de plus d’applaudissements que de dialogue. 

D’arrogance alors ?

Non, je parle de ceux qui l’entouraient, je pense qu’ils n’ont pas bien vu cette exigence – ils l’ont vu mais peut-être pas bien vu. Mais qu’est-ce qu’il a voulu faire ? Je vois très bien : il a voulu sortir par le haut du débat, du pugilat de la politique ordinaire. Je pense c’est ce qu’il à voulu faire et de ce point de vue il a bien fait. Les premières semaines, c’était bien fait et puis après, il faut prendre le relais avec cette obligation ou ce devoir du président de conduire l’opinion publique et sans jamais se satisfaire de ce que des sujets ont été abordés pendant la campagne parce qu’un vote ce n’est pas un chèque en blanc. On a voté pour Emmanuel Macron, pour ses qualités certainement - pardon de le dire -  aussi pour se démarquer, pour écarter ses concurrents et ses adversaires.

Un mot, vous avez eu envie, vous avez même pensé que vous seriez premier ministre ?

Ce n’était pas une idée absurde oui.

Vous avez été déçu ?

Non pas du tout.  Je vais vous dire : quand le président de la république m’a dit quel était son choix pour Matignon, je l’ai approuvé. Je lui ai dit : je trouve que c’est un choix qui va avoir de très gros avantages, des avantages électoraux, et puis aussi parce que c’est un visage nouveau. Alors c’est un peu une difficulté d’avoir un visage nouveau à l’Elysée et un visage nouveau à Matignon.  Disons que c’était un peu original on va dire, mais je l’ai approuvé et je l’ai soutenu et Edouard Philippe vient inaugurer la Foire de Pau samedi parce que je trouve qu’il est de ma responsabilité d’apporter à la majorité et au gouvernement ce que je peux leur apporter, c’est à dire une grande liberté de parole et une certaine expérience dans le jugement – on va dire. Et puis on va dire par moment une émulation en demandant qu’on réponde à des questions et qu’on traite des questions qui ne sont pas traitées aujourd’hui et qu’il est nécessaire de traiter.

Et Edouard Philippe il se veut chef d’orchestre de la partition du président ?

C’est son métier.

Il le fait bien ?

C’est son métier, il le fait bien et je trouve qu’il est dans une période où il prend de l’assurance, mais l’assurance ce n’est pas tout. Mais je disais, quelle est la responsabilité qui est celle d’un capitaine de route d’une sensibilité politique comme je suis en France. Cette responsabilité – je le disais - c’est de faire apparaître des réponses ou des questions et des questions et des réponses qui jusqu’à maintenant ne sont pas traitées.  Si vous voulez j’en prend deux. Il faut que nous arrivions, que la majorité arrive et que le président arrive à exprimer pour le pays ce que doit être le projet social de la France. On a bien compris que le projet dont on a l’habitude  - de l’assistance sans contrepartie de tirer vers le haut - que ça ne suffisait pas. Mais la France ne peut pas vivre sans projet social.

Vous ne le voyez pas là ? Dans les ordonnances sur la réforme du travail, dans les différents projets, dans les annonces budgétaires vous ne voyez pas le projet social du gouvernement et du président ?

Dans les ordonnances, si vous le voulez bien on va y revenir mais je veux finir cette affirmation là. On a besoin pour chacun de sentir qu’on a une chance nouvelle et si il faut une deuxième chance. Une des choses les plus originales qu’Emmanuel Macron ait promise dans sa campagne présidentielle c’est cette idée de deuxième chance et même de troisième chance s’il le faut.  Que vous n’êtes pas condamné si vous avez échoué une fois. Ca fait pour moi parti d’un projet social. L’éducation fait partie d’un projet social, que chaque famille ait la certitude que chaque enfant va recevoir les meilleures chances et je trouve que le Ministre de l’Education nationale a choisi de très bons axes. 

 Oui mais alors je reviens quand même sur le projet social parce que ca m’intéresse évidemment, et je reviens du coup aux ordonnances parce que on a entendu certains syndicats évidemment ceux qui défient la CGT ou Jean-Luc Mélenchon, dire que c’était un projet déséquilibré qui était plutôt en faveur des chefs d’entreprises et la CFDT être plutôt sceptique et FO plutôt approbateur. Ce que je veux dire c’est : Est-ce que dans ces ordonnances le projet social est présent ? Est-ce qu’il y a la réponse ?  

Il n’y a pas toutes les réponses, mais il y a des éléments positifs, je vais vous dire lesquels.

Non, dites moi ce qui manque.

Je vais vous le dire. Notons seulement au passage que vous parlez des syndicats, si on s’éloigne un tout petit peut du bruit habituel, il y a tout de même quelque chos, un accueil qui a été bienveillant et notamment sur la négociation, sur les discussions. Je trouve que ca s’est très bien passé. Qu’est ce que ces ordonnances disent ?  Qu’est ce que ces ordonnances apportent ? 

Non, qu’est-ce qui ne suffit pas ? Parce que c’est vrai qu’on en a beaucoup parlé.

Mais il y a beaucoup de vos auditeurs qui ne savent pas ce qu’il y a.  Alors en une phrase : disons qu’il y a des souplesses nouvelles apportées principalement aux toutes petites et moyennes entreprises. C’est à dire une espèce de confiance nouvelle apportée au bas de la pyramide.

Vous auriez aimé voir quoi ?

Je trouve que c’est très bien ; deuxièmement il y a des choses positives pour les salariés on en parle pas on a l’impressions que c’est un éteignoir sur les droits des salariés, ce n’est pas vrai. Par exemple, les indemnités de licenciement sont augmentées, quand il y a indemnité  de licenciement de 25% ce n’est pas tout à fait rien c’est une chose qui montre ainsi une volonté d’équilibre de ce point de vue là et d’autre chose mais c’est un exemple que je citais, donc une démarche relativement équilibré.  Mais elle est fondée, dirigée principalement sur une question extrêmement centrale qui est l’emploi. C’est ça les ordonnances. Mais dans un projet social, il y a beaucoup plus, il y a comment on offre une chance aux gens, et donc de ce point de vue la - j’y reviens - l’éducation, et notamment l’éducation fondée sur la transmission et - je vais dire quelque chose qui peut-être apparaitra étrange -  fondée sur l’apprentissage de la langue.

Et c’est ce que veut Jean-Michel Blanquer.

Et c’est ce que je dis. 

Est ce que vous êtes inquiet pour les universités ? Parce qu’il y a eu des phrases d’Emmanuel Macron qui a dit qu’il fallait en finir peut-être avec le mythe de l’université pour tous.

Aujourd’hui les universités sont pour une large catégorie des étudiants un abattoir.  On les envoie à l’abattoir. En ne traitant pas la question de l’information des étudiants sur ce qu’ils vont devoir faire ; ça ne veut pas dire que je vais défendre l ‘idée devant vous que tout le monde ne peut pas s’inscrire à l’université mais je fais une proposition très précise : pour un certain nombre d’étudiants il faut inventer une année préparatoire à l’université. On disait autrefois « propédeutique », des étudiants qui ont fait des études secondaires et dont on sait : il suffirait d’un examen élémentaire pour savoir qu’ils n’y arriveront pas.  Proposons leur une année de préparation à l’université. J’avais même, quand j’étais ministre de l’éducation, proposé que l’année de terminale soit davantage pensée comme une année de préparation à l’université. Pourquoi ? Mais c’est très simple l’enseignement secondaire c’est un enseignement où vous êtes élève, l’enseignement supérieur vous devenez étudiant c’est à dire en principe autonome, capable de vous même de réunir  les connaissances, or cette transition n’existe pas et on ment à un très grand nombre d’étudiant en leur faisant croire qu’ils peuvent s’inscrire à l’université, ils s’inscrivent et ils sont abandonnés. C’est de la non-assistance à étudiant en danger.

Une année de préparation à l’université. On va revenir quelques minutes sur la politique. On parlait du premier ministre qui vient des Républicains, vous avez vu vous depuis le modem, la candidature de Laurent Wauquiez je voudrais qu’on écoute, il a gravit le mont Mézenc chez lui en Haute Loire. 

« Alors oui pour relever notre famille politique, alors oui pour redonner ses valeurs à la droite, alors oui pour redonner une voix aux Républicains, alors oui pour qu’enfin la droite soit de retour, je suis candidat à la présidence des Républicains. »

Il est candidat à la présidence des Républicains pour le retour de la vraie droite, elle manque en France ?

Alors vous vous souviendrez que j’ai toujours été partisan de la nécessité pour le pays d’avoir une vraie droite et un vrai centre. Et vous vous souviendrez que je me suis opposé assez fortement à ceux qui prétendaient que la droite et le centre c’était la même chose. Je pense qu’il est nécessaire qu’il y ait une droite à droite, qu’il y ait un centre au centre, qu’il y ait une gauche à gauche et même probablement une droite nationaliste et une gauche plus radicale.

Et Laurent Wauquiez est le meilleur candidat dans ce cas là ?

Je suis pour le pluralisme je suis contre l’idée avec laquelle on nous a saoulé pendant 50 ans qu’il fallait une droite et une gauche et qu’en dehors de cette droite unique et de cette gauche unique, point de salut. Je pense que ça nous a conduit ou nous sommes et ça a conduit aux politiques où nous sommes. Après que les Républicains qui sont le parti le plus structuré de cette droite décident que c’est Wauquiez ou tel autre, telle sensibilité, c’est leurs affaires. Moi je  demande qu’il n’y ait pas de confusion. Vous savez que je parle là en responsable du centre, je suis pour que tous les rassemblement aient lieu, mais je suis pour des rassemblement qui ne soient pas de la confusion et que on puisse trouver une organisation de la vie politique qui fasse qu’on ait un vrai centre pour longtemps, qu’on ait une droite qui s’assume pour longtemps, qu’on ait une gauche sociale démocrate.

 Mais où est Emmanuel Macron là-dedans qui est ni droite ni gauche et qui est gauche et droite ? Il aurait fallu qu’il fasse une coalition, Emmanuel Macron, à l’allemande avec un parti comme le centre avec des gens du Parti socialiste ? 

Il y a cette alliance que nous avons faite et elle est cela. Au fond quelle est l’identité politique d’Emmanuel Macron et ce qu’il veut porter aujourd’hui ? Il veut porter une vision réformiste du pays et naturellement nous nous retrouvons sur ce point. Je pense que sa sensibilité est sociale démocrate. Social-démocratie moderne mais social-démocratie et il est particulièrement sensible à la société civile, à l’introduction à la greffe de beaucoup d ‘élément de la société civile sur le monde politique comme il fonctionnait et je pense que ces trois orientations sont juste. Et qu’il est utile que dans la majorité on ait cette possibilité de contribuer chacun à sa manière à l’avenir.

Mais du coup à quoi vous servez - pardonnez moi - vous avez 47 sièges à l’Assemblée nationale, une ministre et une secrétaire d’état, mais ils ont la majorité la République en marche, ils peuvent faire sans vous. 

Alors si vous croyez, Ruth Elkrief, je vous ai assez averti pour ne pas le croire, si vous croyez que parce qu’on a 20 sièges de plus que la majorité absolue on est à l’abri des accidents, alors vous vous trompez. Parce que la vie politique c’est fait comme ça surtout dans les périodes qui sont des périodes difficiles, on ne peut pas se passer des autres surtout des autres qui soient proposant, soutien, et qui peuvent apporter quelque chose à la réflexion.

Vous parlez de vous François Bayrou ?

Vous êtes entrain de dire vous me demandez « à quoi vous servez » je vous répond aussi simplement que possible.  

Vous êtes entrain de me dire « aujourd’hui on dit c’est tout nouveau, c’est tout beau mais demain on va dire non non non les professionnels, les hommes expérimentés ils sont très important ils sont utiles ».

Non, excusez moi je n’ai jamais dit ça, parce que nos 47 députés ce sont tous des femmes et des hommes - autant de femmes que d’hommes - nouveaux, tous.

Oui mais vous ?

Nous sommes le seul - moi je suis extrêmement nouveau - nous sommes le seul groupe politique de la majorité qui n’ait que des nouveaux élus. Simplement ces nouveaux élus, ils sont formés pour un grand nombre d’entre eux, ils ont traversé beaucoup de déserts et de batailles ce qui fait qu’ils sont solidaires - et pas solitaires du tout vu qu’ils sont 47  vous avez rappelé ça. Solidaire parce qu’ils ont traversé beaucoup de choses ensemble et qu’ils sont liés par une expérience politique de terrain qui est pour un grand nombre d’entre eux très enraciné. Et c’est un très gros avantage, bien sur c’est un avantage d’être nouveau mais c’est un avantage d’être enraciné et ce que la majorité, la chance de la majorité, c’est qu’elle a ces deux sensibilités là et que pour moi en tout cas je veux travailler à cette complémentarité. 

Dernière question, vous voulez être un acteur, un observateur, un poil à gratter ?

 Je veux être un acteur et je l’ai toujours été. Je n’ai jamais cessé d’être, non seulement, un acteur mais d’une certaine manière un entraineur, de faire naitre des situations politiques nouvelles. Je l’ai fait auparavant.

Et vous en avez les moyens malgré les affaires ? 

Les affaires ont été un obstacle artificiel, inventé parce qu’il suffit de nous regarder pour savoir que nous avons toujours respecté des règles d’intégrité absolue et simplement notre responsabilité est de construire dans cette majorité là de faire venir à la surface des choses, de faire venir à la conscience des français des projets qui soient nouveaux et aussi des réponses qui soient efficaces.

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