"Le moment est venu d'un grand sursaut civique pour le pays : c'est ce nous allons construire avec Emmanuel Macron"

Marielle de Sarnez était ce matin l'invitée de "Dimanche en politique" sur France 3 Île-de-France. Au micro de William Van Qui, elle a commenté l'actualité politique nationale et francilienne, et débattu avec le vice-président de Debout la France des mesures à mettre en place pour moraliser la vie politique française.

Marielle de Sarnez, vous soutenez Emmanuel Macron pour la présidentielle, on va en parler. Un mot d’abord sur Fillon. Il appelle ses soutiens à résister. Comment vous jugez le rassemblement de cet après-midi au Trocadéro ?

Je ne sais absolument pas s’il va y avoir du monde ou pas. Les soutiens de François Fillon disent qu’il va y avoir des dizaines de milliers de personnes, je ne sais pas. Ce que je vois, si je prends un peu de recul, c’est un immense désarroi à droite, et un immense désarroi des Français devant cette situation politique absolument inédite. Mais qui en même temps s’explique en partie, car je le crois profondément, nous sommes à la fin d’un cycle. Nous voyons les deux partis qui ont cannibalisé la vie politique française ces dernières décennies, pas avec un grand succès il faut le dire : le Parti socialiste d’un côté et les Républicains de l’autre. Ce sont des partis qui sont traversés par des clivages. Ils n’ont pas clarifié leur position idéologique, il y a des oppositions très fortes. Et ils sont frappés par une forme de faiblesse, par des difficultés, aujourd’hui. Et c’est pourquoi je suis très heureuse de l’alliance que nous avons faite autour d’Emmanuel Macron, pour une offre nouvelle dans la vie politique française.

Sur le soutien à François Fillon, ses militants vont être rassemblés cet après-midi au Trocadéro, un rassemblement contre le « coup d’état des juges » : un « acte grave de faillite morale et politique contraire à nos valeurs » a dit Anne Hidalgo, la Maire de Paris. Est-ce que vous êtes aussi sévère ?

En tous les cas, la tonalité qui a été donnée à tout cela dans les interventions diverses de François Fillon, et ses soutiens, mettant en cause la justice, c’est quelque chose qu’on ne peut pas, qu’on ne doit pas faire quand on prétend aux plus hautes fonctions. Quand on est président de la République en France, on est garant de la Justice. Et quand on est garant de la Justice, on ne profère pas et on ne tient pas des propos de ce type-là.

C’est ce que disent également les élus de droite qui sont, les uns après les autres, en train de lâcher François Fillon. Alain Juppé en recours, est-ce que vous y croyez ?

C’est un grand point d’interrogation pour moi, je me demande si ce n’est pas trop tard. Je ne suis pas sûre que toutes les conditions soient remplies pour que ça se passe bien. Qu’est-ce qu’on voit ? On voit qu’on a un électorat dit « Fillon » qui est très identitaire, qui est très marqué, qui est très radicalisé. Est-ce qu’Alain Juppé va être le porte-voix de cet électorat-là ? Tout ceci me semble poser beaucoup de questions, et donc je ne suis pas sûre que toutes les conditions soient remplies.

Est-ce que ça vous mettrait dans une situation inconfortable ? On se souvient que le jour où François Bayrou a annoncé qu’il soutenait Emmanuel Macron, qu’il lui proposait une alliance, il a rappelé ce jour-là que son premier choix, c’était Alain Juppé.

Absolument, mais moi j’ai soutenu Alain Juppé pendant la primaire, parce que c’était un homme libre, à ce moment-là, au-dessus des partis. Qui faisait une offre politique qui, au centre, me convenait, et qui souhaitait un rassemblement large de la droite républicaine, que je trouve tout à fait honorable – depuis il y a eu des déviations – en passant par le centre, et jusque même les déçus de François Hollande. C’était une offre politique dans laquelle je me retrouvais. Aujourd’hui, j’ai le sentiment d’une sorte de sauve-qui-peut des élus qui forment Les Républicains, d’où mon inquiétude pour la position d’Alain Juppé.

Emmanuel Macron est en tout cas votre candidat aujourd’hui, il présentait enfin son programme jeudi. Vous a-t-il convaincu ? Est-ce qu’il a répondu aux fameuses quatre conditions posées par François Bayrou ?

Il y a répondu tout de suite. La semaine dernière, quand François Bayrou a formulé sa proposition d’alliance, il a répondu en disant qu’il les inclurait dans son programme. Elles y sont. J’en suis heureuse, parce qu’au fond, ce n’est pas tant parce que François Bayrou et moi les avons demandées, c’est parce qu’elles sont nécessaires pour le redressement du pays, elles sont nécessaires pour que les Français retrouvent confiance dans la politique et dans la République, et dans l’action publique de leurs élus. Et nous avons fait de la moralisation de la vie publique le point d’entrée de ce redressement. Emmanuel Macron s’en est saisi, et je trouve que c’est bien. Au fond, en face de ce désarroi national, de ces partis un peu finissants, traversés par des clivages, des difficultés, des haines et des divisions, je crois que le moment est venu d’un vrai sursaut civique pour le pays. Et c’est cela que nous allons construire avec Emmanuel Macron.

Sur l’élaboration du programme, En Marche explique que 30.000 militants, 500 experts ont participé à son élaboration. Et François Bayrou, est-ce qu’il a eu son mot à dire, un droit de regard ?

Il y a beaucoup des propositions qui sont dans le programme d’Emmanuel Macron qui sont portées par François Bayrou, qui étaient dans nos exigences. La première d’entre elles, la moralisation de la vie publique, était vraiment notre exigence. La deuxième c’est la question du travail, et de la rémunération juste du travail. Il y a un mouvement qui traverse la planète entière, qui est qu’on essaye toujours de faire baisser le prix et le coût du travail. Par exemple sur cette question-là, j’ai vu avec bonheur qu’Emmanuel Macron revenait sur la question des heures supplémentaires, ce que nous avions demandé, et remettait donc une possibilité d’augmentation des salaires en conservant les heures supplémentaires, avec le système qu’avait proposé François Bayrou, qui soit un système bénéfique pour le salarié, mais qui soit neutre pour les entreprises au-delà des 35 heures. Il a pris cette proposition, et je m’en réjouis, et ce n’est pas la seule, bien sûr.

Emmanuel Macron propose aussi une baisse des cotisations salariales, patronales, une baisse de l’impôt sur les sociétés, plus de taxe d’habitation pour 80% des Français, 50 milliards d’investissements... Vous aurez noté, il y en a un peu pour tout le monde, mais pas grand chose sur les financements. Vous avez remarqué ?

Non, je trouve que sa méthode de dire qu’on va faire des économies, et qu’on va les prendre ministère par ministère, administration par administration, je trouve que c’est une bonne entrée. Ce n’est pas loin de ce qu’avait proposé François Bayrou dans les campagnes présidentielles précédentes. Je pense qu’on peut économiser beaucoup en gérant mieux, en étant plus innovant, en étant plus créatif. On peut faire baisser la dépense publique en faisant mieux. Et c’est ça que nous allons essayer de faire.

Est-ce que vous discutez également des investitures aux législatives avec Emmanuel Macron ?

Moi, il y a quelque chose de très simple que je crois, et qui est assez évident. C’est que les élections législatives, elles se passent après les élections présidentielles. Et donc d’abord il faut gagner les élections présidentielles, ensuite vous mettez en place un premier ministre, un gouvernement, et une majorité parlementaire qui sera issue de la majorité présidentielle. Il faut revenir aux fondamentaux de la Vème République. Faire le contraire de ce que faisaient le RPR et le PS, à savoir, ils faisaient des investitures partisanes un an avant l’élection – Martine Aubry souvenez-vous la dernière fois, ou Nicolas Sarkozy pour les LR – et puis arrive l’élection présidentielle, et où est la marge de manœuvre du futur président ? Comment il tient compte de sa majorité présidentielle ? Tout ceci n’est pas raisonnable. Ceci n’empêche pas de travailler à avoir les meilleurs profils, les meilleures ressources humaines, des femmes, des hommes, qui pourront participer à ce sursaut civique du pays. Bien évidemment qu’il faut y travailler. Mais l’essentiel, c’est d’abord l’élection présidentielle.

Vous avez parlé de majorité présidentielle, puis parlementaire. Jean-Paul Delevoye, qui est le responsable des investitures d’En Marche pour le parti d’Emmanuel Macron, semble avoir intégré qu’Emmanuel Macron, s’il était élu, n’aurait pas de majorité absolue à l’Assemblée.

C’est pas tout à fait ce qu’il dit, si je peux me permettre, votre question ne reprend pas ses termes exacts. Ce qu’il dit c’est que le parti En Marche n’aura pas à lui seul la majorité absolue. Je vais vous dire : heureusement, et tant mieux ! Moi je suis contre l’idée du parti unique, j’ai été contre quand c’était Jacques Chirac qui le faisait, je serais contre si d’autres le faisaient demain.

Ca veut dire du marchandage pendant 5 ans pour faire passer un texte important ?

C’est le contraire, vous regardez un peu ce qui se passe dans les pays européens autour de nous, et vous ne vous posez pas la question de savoir pourquoi eux ils ont réussi à réformer. Pourquoi eux, leur économie va mieux. Pourquoi chez eux, le pacte social est mieux fondé et mieux organisé. C’est parce qu’ils ont un système de gouvernement avec des ententes. Alors il y aura des représentants d’En Marche, il y aura des représentants du grand courant du centre dans lequel François Bayrou existe et pèse, et il y aura ceux qui convergeront, ceux qui partageront les objectifs du gouvernement, le programme législatif pour la mandature, avec un double souci : un souci de cohérence – il faut une cohérence sur la vision, c’est absolument essentiel et il est temps que ça vienne, regardez ce qu’il s’est passé avec les frondeurs, regardez ce qu’il se passe à droite aujourd’hui on a des divisions absolument terribles, il faut arrêter avec tout cela, il faut de la cohérence, c’est vital – et il faut du renouvellement aussi.

Et vous Marielle de Sarnez, est-ce que vous en serez ? On dit que vous pourriez être candidate face à Nathalie Kosciusko-Morizet dans l’actuelle circonscription de François Fillon.

Je suis aujourd’hui députée européenne, et je suis heureuse de cet engagement. Je me bats pour que l’Europe revienne, soit ressentie par les opinions comme une intimité, ce qu’elle n’est plus aujourd’hui. Il y a une fracture terrible. Donc je suis heureuse d’être députée européenne. Et en même temps, s’il y a une opportunité de participer à un redressement du pays, économique, social et civique, je ne pourrai pas m’en désintéresser. Donc je réserve ma réponse, d’abord les présidentielles, je ne parle pas de telle ou telle circonscription, il y aura évidemment des parlementaires du grand courant du centre que nous formons, mais s’il y a une possibilité de participer à cette reconstruction civique du pays, je pense que peut-être ça m’intéressera d’y participer. Je ne ferme pas de porte.

Je dois vous parler d’un mot du livre de Corinne Lepage paru en 2015. Elle parle d’emplois fictifs chez les collaborateurs MoDem au Parlement européen durant 5 ans. C’est une accusation très grave.

Oui, c’est un mensonge. Corinne Lepage est soit de bonne foi, et elle s’est trompée, soit c’est de la malveillance, mais nous avions dit à l’époque il y a 3 ans que ceci était un mensonge, je vous répète et je vous redis aujourd’hui que ceci est un pur et simple mensonge, les salariés qui travaillent pour François Bayrou sont payés par le Mouvement Démocrate, et nous tenons à disposition de qui le souhaite les feuilles de salaires.

Et je précise que la justice n’a jamais jugé utile d’ouvrir une enquête sur le sujet. On revient au fond, François Bayrou avait posé comme condition à une alliance avec Emmanuel Macron un projet de loi sur la moralisation de la vie publique, un terrain sur lequel on entend souvent également Nicolas Dupont-Aignan, candidat à la présidentielle. On va en débattre avec Dominique Jamet, vice-président de Debout la France, soutien de Nicolas Dupont-Aignan.

En réponse à Dominique Jamet, qui affirme que Nicolas Dupont-Aignan est depuis longtemps le plus grand défenseur d’une moralisation de la vie publique :

C’est également important pour François Bayrou, il en parle depuis plus d’une décennie. Les propositions d’Emmanuel Macron sur la moralisation de la vie publique française, c’est à peu près ce qu’on propose depuis longtemps. On l’avait d’ailleurs proposé au précédent président, qui ne l’a pas fait. On avait même suggéré un référendum sur cette question, parce que je crois que ça s’impose. Si vous voulez redresser le pays, réussir ce redressement, il faut recréer de la confiance. Et si vous voulez recréer de la confiance, c’est simple. Il faut retisser un lien entre les responsables publics, les responsables politiques, et les citoyens. Et ça passe par là. Il faut tourner la page sur toutes ces pratiques qui sont pour moi des pratiques d’un autre temps. Je suis députée européenne, ça fait depuis bien longtemps qu’on ne peut plus avoir comme assistant son époux, son épouse, son fils, sa fille ou quelqu’un de sa famille. Il y a eu une moralisation de tout cela, c’est la même chose en Allemagne, c’est la même chose dans grand nombre de pays qui nous entourent. La France a un retard sur cette question. Il s’agit de le combler, et de le combler vite, parce que pour moi c’est une condition sine qua non. Les Français ne feront pas confiance en leur prochain responsable si cette question n’est pas traitée définitivement. Et j’ajouterais une chose dans les propositions d’Emmanuel Macron que je ne trouve pas, je pense qu’il faudra aussi parler de la question de l’indépendance de la presse, comment on la préserve, comment on la met en dehors des conflits d’intérêts, comment on lutte contre les concentrations, c’est une question qui est aussi à mon avis très importante. Les conflits d’intérêts, Emmanuel Macron en parle également puisqu’il ne veut plus d’activités de conseil dans le privé pour un parlementaire.

En réaction à Dominique Jamet, qui dénonce une prise de conscience tardive, et affirme que les exigences de Nicolas Dupont-Aignan sont les plus radicales en matière de moralisation de la vie publique, par exemple sur les emplois familiaux ou l’inéligibilité à vie des gens condamnés pour corruption :

Dire « je suis plus ceci que vous » c’est absolument grotesque, on a tous le même souci pour le pays, et on a tous le même souci à mon sens, que le pays s’en sorte. Deuxièmement, il y a quelque chose qui me dérange. Vous l’avez dit et vous l’avez susurré, François Fillon en fait une défense, et moi, ça me gonfle vraiment. François Fillon dit depuis deux semaines, ce que j’ai fait, tout le monde le fait. Sous-entendu, tout le monde pourri, tout le monde pareil. Ecoutez, franchement, c’est absolument pitoyable, et il faut faire attention à ça. Si vous dites tout le monde fait pareil, tout le monde est pourri, comme défense de ceux qui font des malversations, on ne va rien pouvoir reconstruire dans ce pays. Heureusement que l’immense majorité des élus sont des citoyens qui n’ont qu’une envie, qu’un idéal, c’est participer à quelque chose d’utile pour leur pays. Et je pense qu’il faut le dire et le redire. Emmanuel Macron a dit qu’il n’y aurait pas de candidat aux législatives qui ne soit pas absolument d’une intégrité totale, et il a bien raison. Les hommes politiques et ceux qui aspirent aux hautes fonctions ont besoin d’être exemplaires. Et je veux juste pour conclure dire que Jean Monnet disait que les hommes étaient faibles, il y a des faiblesses humaines qui sont très importantes. Et la seule manière d’y répondre c’est d’avoir de bonnes institutions. Et donc c’est ça la question, il y a des faiblesses, il faut de bonnes institutions pour rendre impossibles toutes ces dérives et toutes ces malhonnêtetés.

Repassons à l’actualité francilienne. Retour sur terre, après ces images de Thomas Pesquet dans l’espace.

C’est beau l’aventure spatiale, je pense que ça fait du bien d’être là-haut !

Sans doute, on demandera à Thomas Pesquet. Bruno Beschizza, le maire d’Aulnay est furieux. Le poste de police qui ferme, votre appréciation ?

Il a raison, c’est un très mauvais symbole. Je comprends que l’exercice de leur travail soit très difficile pour les policiers restés sur place, ils ont été caillassés, je comprends très bien ça. En même temps, on ne peut pas déserter les coins sensibles. Si on déserte les coins sensibles, ça devient des coins dans lesquels l’état de droit n’existe plus, et la sécurité n’est plus là pour nos concitoyens. Donc je pense qu’il faut faire le contraire, il faut ré-ancrer la police dans les territoires, il faut ré-ancrer ce qu’on appelait la police de proximité, au plus proche de nos citoyens, des policiers qui connaissent les gens, qui vivent parmi eux, qui sont des repères pour tous ceux qui vivent dans ces villes. C’est la droite, c’est Nicolas Sarkozy qui avait supprimé la police de proximité. Emmanuel Macron propose de la restaurer, nous le disons avec François Bayrou depuis longtemps. La police ça ne peut pas être que des cars de CRS qui arrivent quand ça va mal, et quand c’est déjà trop tard. Ca doit être des policiers qui sont là, qui vivent parmi nos concitoyens, et qui sont là parce qu’ils sont comme une marque de confiance. C’est à ce moment qu’on pourra recréer du respect, absolument vital et nécessaire, entre les uns et les autres.

Autre conséquence indirecte de l’affaire Théo, ces lycées parisiens bloqués toute la semaine contre les violences policières.

Oui, c’est un paradoxe. Ces quelques jeunes manifestent contre les violences policières ; bien sûr qu’il faut du respect, et le respect ça marche dans les deux sens. On ne peut pas imaginer avoir une dizaine de lycéens qui bloquent l’accès au lycée pour l’ensemble de leurs camarades. On ne peut pas imaginer d’avoir des gens qui, soi-disant sont contre les violences, font eux-mêmes un certain nombre de choses comme blesser des proviseurs, mettre le feu à des poubelles, jouer avec l’ordre public jusqu’à des choses extrêmement dangereuses pour les personnes. Ceci n’est pas tolérable.

 

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