"Le projet de François Fillon est risqué pour l’unité de la société française et pour son redressement"

François Bayrou, président du MoDem, a déclaré dimanche "espérer des évolutions" dans le programme "récessif" de François Fillon, dont plusieurs volets sont contestés jusque dans son propre camp, notamment ce qui concerne la sécurité sociale.

DOSSIER SYRIEN

BFM TV - Je voudrais que l’on commence par la Syrie, Alep. Comment en est-on arrivé là ?

L’Europe n’a pas l’existence qu’elle devrait avoir parce que la voix de la France n’a pas pu se faire entendre autant qu’elle le devait. Au sein de l’ONU et en particulier du Conseil de sécurité, la voix de Moscou, assez souvent relayée par la voix de Pékin, ont empêché que des décisions fermes soient prises et c’est ainsi que l’on voit à quel point l’impossibilité de se faire entendre pour une nation comme la France est dommageable pour nous et pour le monde.

BFM TV - Si l’Europe et la France n’étaient pas éteintes sur la scène internationale, aurait-on pu éviter les massacres que l’on voit aujourd’hui ?

[…] Dans le dossier syrien, l’Union européenne ne parvient pas à former une voix, une détermination qui puisse se faire entendre et ceci est un enjeu pour le monde ! L’Union européenne est le seul ensemble puissant qui n’a pas de volonté - on aurait dit autrefois « impérialiste » - d’imposer son jugement. C’est positif, à condition qu’elle arrive à se faire entendre ! Au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies, la voix de la France est la seule qui soit non-alignée sur celle des autres puissances. Traditionnellement, la Grande-Bretagne est constamment alignée sur les États-Unis. La France a ce trésor d’indépendance. Mais elle ne parvient pas à faire pour l’instant que l’Union européenne constitue la force qu’elle devrait être. La France n’a pas réussi à constituer une volonté de l’Union européenne, elle n’a pas réussi à être le leader qu’elle devrait être. […] Mais on touche autre chose que vous voyez bien : si l’Union européenne n’existe pas, alors notre voix ne peut pas se faire entendre !

BFM TV - Est-ce que le fait d’avoir eu avec la Russie un rapport presque de « moralisation » n’a pas été contre-productif ?

La France et l’Union européenne doivent avoir des relations constructives et de long terme avec la Russie. Mais il y a une chose primordiale : la France ne peut pas avoir de relations inféodées à M. Poutine. Je viens de décrire ce qui est pour moi la vertu de la diplomatie française. Depuis le général de Gaulle, la vertu de la diplomatie française est l’indépendance, c’est la capacité de juger et de s'exprimer pour son propre compte afin de peser dans le jeu international.

BFM TV - Est-ce que les relations que François Fillon veut entretenir avec la Russie vous paraissent mettre le curseur trop du côté de l’inféodé ?

Pas seulement du côté de François Fillon. Il y a un courant en ce moment très puissant dans la vie politique française, qui va de Marine Le Pen à Jean-Luc Mélenchon en passant par François Fillon, qui a pour Poutine les yeux de Chimène ! Il y a une chose dans laquelle il ne faut pas que l’on tombe : c’est que l’on ait avec Poutine des relations tellement proches et intimes que ce sont des relations féodales. Comme d'autres dirigeants autrefois avec les États-Unis ! Je me suis toujours opposé à Nicolas Sarkozy quand il était fasciné par Washington et qu’il y était allé même pour s’opposer à Jacques Chirac qui venait de décider du « non » à la guerre en Irak. J’avais trouvé que ce n’était pas équilibré, que ce n’était pas juste. Et cet équilibre, je ne voudrais pas qu’il soit compromis une fois de plus à l’égard de Poutine dont le moins que l’on puisse dire, c’est que d’un point de vue démocratique, on a un certain nombre de choses à lui faire savoir, en toute liberté ! Vous voyez la limite.

PROJET POLITIQUE RISQUÉ DE FRANÇOIS FILLON

BFM TV - Vous avez refusé le moment officiel de dire si, oui ou non, vous êtes candidat. Pourquoi ?

Pour l’instant, le projet de François Fillon est un projet que je considère comme risqué pour l’unité de la société française et pour son redressement. Et je ne suis pas le seul ! Y compris dans le camp proche de François Fillon, il y a des gens qui disent à voix basse la même chose ! Il est important de voir s’il y a des évolutions possibles. Les choses ont besoin de décanter ! Dans tous les projets qui s’expriment aujourd’hui, je ne retrouve pas les priorités qui sont les miennes et je crois un très grand nombre de Français. Si vous regardez les sondages les plus récents, y compris de ce matin, il n’y a pas d’envie que l’un des candidats exprimés l’emporte. Pourquoi ? Les Français ne retrouvent pas les deux attentes cardinales qui sont les leurs : un, de vivre mieux (autant que possible) et deux, que leur vie en commun ait un sens, que nous sachions où nous allons.

BFM TV - Quand je vous demandais tout à l’heure quel serait votre projet pour la France, cela tournerait-il autour de ces deux piliers ?

Oui.

BFM TV - Si vous ne retrouvez pas ces deux piliers dans le programme de François Fillon, serez-vous candidat ?

Alors j’aurai l’occasion de revenir vous voir ! Il se trouve que j’ai avec François Fillon depuis longtemps des relations amicales. Du point de vue de la personnalité - et ça compte énormément - je n’ai pas de problème avec lui mais il y a le projet. […] C’est une forme de cohérence intérieure. Il y a des gens qui considèrent que changer d’opinion n’a aucune importance et qu’au fond, au gré des événements, l’essentiel est de gagner l’échéance la plus proche et qu’après « on verra bien ». Je me suis toujours opposé à cette attitude. Mon dernier livre publié s’appelle « De la vérité en politique » parce que je considère que le poids de ce que l’on dit est absolument central dans la responsabilité de gouvernement. Donc, je trouve que dans la désillusion qui est celle des Français aujourd’hui à l’égard de la politique - et depuis longtemps - un des éléments majeurs est que les hommes politiques font le contraire de ce qu’ils avaient annoncé. 

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