UR 2023 : Interventions de Stéphane Séjourné et Édouard Philippe
Retrouvez les interventions des chefs de la majorité de Renaissance et d'Horizons, Stéphane Séjourné et Édouard Philippe, lors de l'Université de rentrée 2023.
Stéphane Séjourné
Merci beaucoup François. Merci d'avoir donné la parole à Richard parce que je tenais à le dire aussi en introduction.
Richard tu nous manques beaucoup à Renaissance, en particulier à la majorité en général. Tu as su mener les travaux à l'Assemblée nationale avec une certaine distinction. Ce sont ces présidents de l'Assemblée qui laisseront leur marque, leur empreinte, leur style aussi, ça compte beaucoup en politique. Je voulais particulièrement te remercier d'être là, d'être présents dans nos travaux, y compris lors de nos bureaux exécutifs.
Au sein de Renaissance, je sais que tu es présent, mais tu n'es plus actif. En tout cas, tu nous manques beaucoup en politique et on a besoin de l'expérience, en tout cas des gens comme Richard Ferrand et je tenais à le saluer. Et merci encore de l'applaudir.
Bon, chers amis, merci beaucoup François de cette invitation. C'est toujours un honneur et je suis toujours très heureux de venir ici et ce n'est pas un mot, un mot convenu. J'ai toujours le sentiment qu'il y règne une atmosphère assez singulière à Guidel, à la fois studieuse, conviviale, empreinte de gravité dans certains moments. Et ce moment où toutes les formations politiques font leur université de rentrée, organisent des débats, sont aussi des moments pour nous, de rappeler un certain nombre, effectivement tu as commencé à le faire, de convergences, d'explications de pourquoi aussi la majorité est ensemble, d'assumer un certain nombre de divergences.
Mais je vais peut-être commencer par là parce que souvent on parle d'unité, de dépassement politique au sein de mon parti politique. Ce n'est pas une fin en soi, c'est la conséquence de quelque chose et vous avez ici des courants politiques représentés entre moi, François Bayrou, Edouard Philippe, qui soient des sociaux-démocrates réformistes, qui soient des humanistes, qui soient les courants de pensée qui mettent la liberté au cœur de leur projet politique.
Vous avez des courants de pensée qui ont un point en commun, c'est de toujours regarder la complexité du monde et de trouver une grille de lecture de la complexité du monde. Avant de trouver des solutions. Et je dis ça parce qu’aujourd’hui, c'est devenu rare en politique. C'est devenu rare au moment où un certain nombre de partis politiques, de nationalistes, de populistes cherchent à surfer sur les conséquences du désordre du monde.
Nous, vous n’entendrez jamais une intervention de François Bayrou, d'Édouard Philippe ou de moi-même qui ne commence pas par une grille de lecture de la situation mondiale, de l'explication de pourquoi nous faisons les choses et d'intégration à la fin de notre sensibilité politique, qu'elle soit humaniste, libérale, progressiste, réformiste, sociale-démocrate. Et je pense que vous avez de la chance de participer à un parti politique ici au MoDem, pour mes militants à Renaissance, qui a une certaine culture à l'international, à l'Europe, qui est capable aujourd'hui de constater que la question climatique est au cœur, qu'elle engendrera probablement un désordre sur l'immigration, que la question de la démographie, qui parle beaucoup à toutes nos formations politiques, produira par conséquence des faits internationaux et géopolitiques majeurs, qu'il faut se préparer, que derrière, il faut organiser nos politiques publiques en fonction.
Il faut préparer nos opinions publiques à aussi un certain bouleversement et c'est une rigueur politique que nous partageons. Quand nous regardons aujourd'hui les autres formations politiques. Je le disais, entre surfer sur les peurs, organiser les craintes, décourager les uns et les autres d'avoir une réflexion en profondeur, ne plus partager la contrainte. Richard le disait, avec y compris le besoin de tout conflictualiser.
On voit bien qu'il nous manque des formations politiques aujourd'hui dans la vie politique française qui sont capables de faire cet exercice à la fois d'organisation politique, de structuration politique, mais avoir un raisonnement solide. Et je crois aujourd'hui que c'est le cas. Et vous avez participé ces derniers jours et vous allez continuer à le faire aujourd'hui et dimanche.
Et je pense que c'est ça pour à la fois nos militants et à la fois nos formations politiques. Gardons cette rigueur. Je crois que c'est peut-être le premier point sur lequel je souhaitais insister parce que nous partageons en tout cas cette volonté.
Vous dire que dans les enjeux particuliers qui sont les nôtres aujourd'hui, l'instabilité que j'évoquais, les questions d'influence de la démographie, la remise en cause des démocraties partout dans le monde, du suffrage universel des fois même en France. On a une partielle, je l'ai évoqué souvent dans nos réunions à Renaissance, nous avons une partielle ou la candidate du Rassemblement national et LFI étaient en tête. La dernière fois qu’une partielle a eu lieu c’est notre candidate qui a gagné face à quelqu'un de la France insoumise. Réaction de la France insoumise : « vous avez une députée du peuple qui a été évincée ». Alors que nous, dans nos formations politiques, on aurait dit « on a eu une députée qui était battue. »
Les mots ont un sens. Il n’y a pas des députés du peuple et des députés, il y a des députés du peuple, tout simplement. Et il y a des élus battus, mais personne n'est évincé.
Qu'est-ce que veut dire cette formulation ? Tout simplement, c'est une remise en cause de notre suffrage collectif, de notre suffrage universel, de notre mode de trancher nos différends en démocratie.
Derrière, il faut être assez conscient qu'il y a des attaques, que les mots ont un sens, que ces sujets-là sont au cœur de notre problématique aujourd'hui et qu'il faudra les défendre. Et je sais que le Mouvement démocrate, dans le Mouvement démocrate, il y a « démocrate », je partage également ces sujets là et le sujet de la démocratie sera probablement en tout cas pour nous, y compris à Renew Europe, un point essentiel dans la défense du modèle démocratique européen, des modèles de démocraties libérales qui deviennent de plus en plus en question et peut être même, je ne sais pas si on a des statistiques, mais je crois même qu'ils sont minoritaires aujourd'hui dans le monde.
Vous dire que, à partir de cette grille de lecture du monde, on a agi depuis six ans et je serais en faute si aujourd'hui je ne mettrais pas un point également à revendiquer un certain nombre de bilan. Sur le volet économique, il a fallu relancer l'économie pas comme une fin en soi, mais aussi pour financer notre modèle aussi pour redonner du pouvoir d'achat, pour créer des emplois.
Le chômage est au plus bas depuis 40 ans. Les pays les plus attractifs d'Europe, c'est devenu la France. La croissance résiste. La dette a même plus baissé au deuxième trimestre, selon les chiffres de l'INSEE. Et, fait notoire, le Der Spiegel allemand cite « La France, c'est l'Allemagne en mieux ». Je pense que ce sujet-là est déjà un point de bon bilan pour nous puisque si nos collègues allemands le disent, je crois qu'il faut pouvoir le relever ensemble.
Vous dire aussi qu'on a quelques chantiers qui me semblent important. D'abord, il faudra garder le cap sur le volet économique, je le disais, mais sur le volet climatique.
Parmi les dérèglements du monde, le gouvernement a annoncé une planification et on était avec Edouard Philippe et François Bayrou à cette présentation par la Première ministre.
Je tiens à dire, et je l'ai dit d'ailleurs, à la représentante du parti des Verts qui était avec nous. Même les gouvernements qui intègrent aujourd'hui dans leur gouvernance, dans leur coalition des partis verts en Europe, n'ont pas fait cet exercice de planification, d'organisation. Et c'est un exercice inédit, il faut qu'on puisse le défendre.
Évidemment, vous avez bien vu qu’aujourd'hui, la question de l'environnement était redevenue un clivage politique et je note que si c'est devenu un clivage politique, c'est parce que nous avons aussi agi pendant la première partie du quinquennat. On nous l'a souvent reproché. Édouard le sait très bien, « vous ne faites pas assez », les activistes étaient très présents. Et je vois aujourd'hui que les deux fronts se rouvrent j'ai envie de dire. Ceux qui nous disent « vous en faites trop », ce qui nous disent « vous continuez à ne pas en faire assez », mais en faire trop est une nouveauté du deuxième quinquennat. Preuve aussi que les choses ont bougé, que les lignes ont été percées sur le volet écologique et qu'on a réussi à faire au niveau européen en tout cas, la transition, avec des ambitions qui sont radicales.
Il faudra voir comment, et c'est tout l'objet de la planification, comment on réussit à emmener socialement, économiquement, l'ensemble des Français et des Européens dans cette transition qu'on a besoin, qui aura des répercussions internationales, géopolitiques, qui aura des implications sur l'immigration. Et nous avons tellement besoin d'être le continent en tête, le continent qui soit le plus vertueux et qui puisse aussi, à un moment donné, donner l'exemple au reste du monde.
500 millions d'habitants, 450 millions d'habitants l'Europe, on est petit par rapport au reste du monde, mais en tout cas, si on a une législation la plus vertueuse sur ses volets, là, je pense qu'on aura une capacité à pouvoir exporter notre modèle à une condition, qui combine compétitivité et justice sociale, et c'est tout l'objet de ces prochains mois que nous avons à faire ça au niveau européen.
D'ailleurs, au niveau national, avec cette planification.
Un dernier point peut être, aussi dans les enjeux démocratiques. On y est tous inquiets et à juste titre quand on regarde les comparaisons internationales, je crois qu'on aura besoin de réfléchir sur nos institutions. Alors c'est un gros mot de dire « moderniser », qu'on arrête déjà une partie du vocabulaire, mais qu'on passe à l'action au niveau de la majorité pour trouver un certain nombre de solutions pour redonner un peu vie à la démocratie.
Il y a une demande très forte de nos concitoyens de plus participer à la vie politique. Il faut pouvoir avoir ces débats et ces discussions entre nous.
Moi, je suis convaincu qu'il faut qu'on pérennise toutes les forces politiques à l'Assemblée nationale.
Je suis convaincu qu'il faut une dose de proportionnelle. Je suis convaincu qu'il faut retrouver des rites électoraux qui nous permettent un peu d'avoir des débats politiques.
Je suis convaincu aussi qu'il faut moderniser peut-être le statut de l'élu. On en a beaucoup parlé depuis des dizaines et des dizaines d'années, mais des générations, ma génération aujourd'hui ne veut plus s'investir en politique, ne veut plus s'investir en politique. On perd des compétences, on perd des gens qui pourraient aujourd'hui agir pour l'intérêt général et c'est la responsabilité de nos partis politiques.
C'est la responsabilité de Renaissance, d'Horizon et du MoDem, qui sommes en responsabilité, d'aller aussi trouver quelques propositions ici pour réinvestir toute une génération qui aujourd'hui préfère les causes à l'intérêt général et à l'investissement dans la vie politique et dans les partis politiques. Et comme je vous le disais en introduction, au moins les partis politiques nous donnent une structuration, une grille de lecture du monde qui manque énormément aujourd'hui à la société française et à un certain nombre de générations.
Donc, je pousse pour un mouvement de propositions communes sur les institutions où on pourra être efficace et organiser les choses. C'est un rôle que les partis politiques peuvent avoir, qu'ils doivent avoir d'ailleurs, et j'en serais aussi le garant du côté de Renaissance.
Un dernier mot sur le combat européen et puis je vais remercier l'ensemble des collègues du MoDem qui sont là et qui, depuis maintenant quatre ans, nous travaillons au sein du groupe Renew. C’est 25 nationalités, 100 parlementaires, un groupe, une délégation française qui est coprésidée par Valérie et Marie-Pierre qui sont là. Mais j'ai vu aussi l'ensemble des collègues qui étaient là. J'ai vu Laurence sur la scène.
Je voudrais d'abord les remercier parce que François, tu parlais de camaraderie, de respect et je crois que ça a toujours été le cas dans cette délégation française.
Et je pense qu'on a contribué à notre petite échelle à ce que la politique nationale aussi empoigne le pas sur ce que nous avons fait au niveau du Parlement européen. Et donc jhe voudrais vraiment vous remercier à la fin de votre fidélité, de vos compétences puisque vous avez su faire bouger les lignes au Parlement, avec ce prisme et le caractère humaniste que vous revendiquez dans toutes les politiques. Et je crois qu'on a été très utile.
Maintenant je vous mets en garde par rapport aux élections qui arrivent. Ne cédez pas à la nationalisation du débat européen. On a un débat européen tous les cinq ans et je vous le dis, je ne me laisserai pas voler et on ne se laissera pas voler collectivement le débat européen. Je vois bien la tentation des extrêmes à vouloir nationaliser cette élection à partir, très tôt dans l'élection, pour désigner des candidats, nous pousser à plus discuter du budget de la France et des questions nationales que des enjeux institutionnels et des enjeux politiques que nous allons avoir à traverser pendant cette campagne des européennes.
Et nous aurons un débat sur le sujet. Nous aurons un débat et j'en serais également le garant. Le calendrier sera fixé un peu plus loin et toujours dans le respect et dans le dialogue, avant de faire des annonces précipitées comme certains peuvent le faire dans d'autres partis politiques. Ils ont cette, j'ai envie de dire, cette convenance d'être à la fois dans l'opposition, d'être à la tête d'un seul parti et donc de pouvoir décider vite, de pouvoir faire l'élection européenne sur une élection nationale.
Nous, on n'a pas cette option-là. On doit en tout cas à nos électeurs ce débat européen, nous l'aurons. Je sais que je peux compter en tout cas sur le MoDem, et je sais que je pourrai compter sur les parlementaires européens sortants du MoDem qui ont été là jusqu'au dernier moment et que je remercie encore une fois.
Merci François encore pour cette opportunité de m'exprimer.
Tu seras évidemment le bienvenu à Bordeaux aux universités d'été de Renaissance ainsi que l'ensemble des militants qui le souhaitent. Longue vie à la majorité. Et puis surtout que ces quatre ans puissent être utiles pour les Français. C'est la ligne qui m'a été fixée aussi par le président de la République. C'est la ligne que nous devons tous avoir en responsabilité et je trouve que cette responsabilité depuis six ans a été très bien exercée.
Continuons ainsi. Merci.
Édouard Philippe
Mes amis, c'est un grand bonheur d'être à Guidel. C'est un grand bonheur de retrouver le MoDem, de retrouver Marc et Geneviève avec qui j'ai eu l'honneur de participer au gouvernement de la France, de retrouver Sarah El Haïry, qui est venue à Angers. Je ne sais pas où elle est, je ne la vois pas, de toute je ne vois rien il y a trop de lumière.
Goethe, au moment où il est mort, a dit cette phrase extraordinaire que je cite en allemand parce que ce n'est pas trop compliqué.
Il a dit « Mer licht », « plus de lumière ». Je ne veux pas mourir, je ne crois pas. Mais là, il y en a trop.
Tout à l'heure, il y avait un problème de son, maintenant de lumière.
Je voudrais saluer Bruno Millienne s'il est revenu, mais je ne sais pas. Je ne crois pas car j'ai bien vu qu'il partait au moment où j'arrivais et j'aimerais que tous ses amis lui disent que j'ai bien noté son départ.
Je voudrais remercier Maud pour son accueil, saluer Patrick Mignola que je n'ai pas encore vu mais que j'espère pouvoir croiser tout à l'heure. Remercier évidemment, et saluer Richard Ferrand qui nous a quittés pour Brest et Stéphane Séjourné, que je suis heureux de retrouver ici. Remercier Jean-Paul Paul qui a créé une connexion corse à la tête d'un binôme MoDem Horizon que je recommande vivement de garder à l'œil.
Et puis remercier évidemment François et lui dire combien je suis heureux d'être ici.
Tout à l'heure, avec une élégance qui n'appartient qu'à lui, il a indiqué qu'il n'avait pas été totalement au courant dans l'histoire de la politique française que des formations politiques qui constituaient une majorité puissent continuer à s'entendre bien. Il faut bien reconnaître que le Béarn et la Normandie ne sont pas des terres géographiquement proches.
Mais je dois dire que nous avons entamé depuis maintenant plusieurs années et que, nous approfondissant avec le temps, avec François, une conversation fait de litote et d'antiphrases, lesquelles manifestement, sont également utilisées dans le Béarn et en Normandie.
Et ces conversations, dont je dois dire qu'elles me charment. Elles m'ont permis d'apprendre un certain nombre de choses et je voudrais vous donner quelques enseignements que cette conversation avec François m'ont permis de retirer. D'abord elles m’ont permis de retirer ma veste et ma cravate puisque je suis arrivé avec une veste et une cravate et François m'a dit « tiens, tu as mis une cravate et une veste bleue ».
J'ai donc enlevé la cravate et la veste, comprenant bien qu'il y avait un sujet.
Mais plus sérieusement, je retiens de ces conversations Je peux le dire, François, parce que ce sont des phrases que tu as déjà prononcés en public. Deux éléments de sagesse qui me font songer depuis que tu me les as enseignés et dont j'essaie de m'inspirer.
Le premier élément de sagesse, c'est quelque chose que tu m'as appris pendant que nous discutions sur l'organisation des législatives. Tu m'as dit le meilleur moment pour dire non, c'est le premier. C'est vachement intelligent. C'est extrêmement intelligent et j'ai tout de suite saisi qu'il y avait quelque chose d'intelligent quand François l'a dit. Mais maintenant, un an après, je dois dire que c'est vraiment très intelligent.
La deuxième chose, et c'est aussi un élément de sagesse. On est toujours plus forts en étant soi-même. C'est très juste.
Et je suis donc heureux de pouvoir rendre à César ce qui est à François et lui dire que de ces conversations, je ne tire pas simplement le partage d'une analyse politique, la discussion d'une stratégie, l'élaboration même parfois d'une tactique. Je retiens aussi des éléments de sagesse, de culture qui comptent pour moi et je veux te remercier.
Alors, l'heure de la rentrée parlementaire du parti Horizon, qui s'est tenue à Angers, où l'ami Bruno Millienne représentait le MoDem, c'est pour ça que je le vanne maintenant.
J'ai beaucoup évoqué les questions relatives à l'Europe et j'ai aussi parlé d'un étau dont nos concitoyens sentaient qu'il était en train de se refermer sur leur vie et sur leurs perspectives. Je voudrais dire un petit peu plus de mots, si vous le voulez bien sur cet état et concentrer mon propos relatif à cet état sur une question particulière qui est la question du logement.
Cet étau, il nous sert tous. Nous voyons tout ce qu'il est en train de se refermer sur nous. C'est l'étau de l'inflation, une nourriture qui coûte plus cher, une essence qui coûte plus cher, une électricité qui coûte plus cher, une vie qui coûte plus cher et le sentiment de d'un sentiment. D'ailleurs, c'est la réalité partagée par nos concitoyens que travailler ne permet pas de desserrer les mâchoires de cet état.
C’est l’étau des prix, mais c'est aussi l’étau des loyers. En 2017, les études montrent que les ménages consacrés globalement en moyenne, alors les moyennes sont à la fois utiles à connaître et incomplètes par nature. Mais les études montrent que les ménages consacraient environ un peu moins de 20 % de leur revenu à leur logement. On est aujourd'hui à environ 30 %.
La proportion des revenus consacrés au logement est croissante et devient un problème politique, social, économique, humain et je le dirai même. Vous verrez pourquoi. Démocratique. L'accès au logement est devenu critique pour les étudiants, délicats pour les jeunes actifs. En vérité, pénible pour tout le monde, donnant le sentiment que progressivement, nos concitoyens sont exclus de la propriété, donnant le sentiment non pas le ressentiment, mais indiquant que lorsque l'on est un Français gagnant sa vie au salaire médian, ce qui est pas mal, on ne peut plus accéder, sauf à pouvoir bénéficier à un moment donné d'un apport en capital lié notamment à l'héritage, à un appartement dans une grande ville.
Imaginez qu'en France il soit difficile pour un de nos concitoyens au salaire médian d'acheter sans héritage un appartement dans une grande ville est un constat qui devrait nous saisir devant l'ampleur des conséquences qu'il entraîne. J'ai cité à Angers, je le cite bien volontiers aujourd'hui, un article, un court article que je vous encourage à aller trouver dans un auteur qui s'appelle Antoine Foucher avec qui j'ai travaillé puisqu'il a été pendant quelque temps, vous vous en souvenez peut-être les amis, le directeur de cabinet de la ministre du Travail et Antoine Foucher a écrit un article qui s'appelle « La fin de la société du travail », pas du tout sur le thème de la société du travail est en train de disparaître dans une société du divertissement, ce qu'on disait assez volontiers dans les années 70-80, quand on parlait de la société du divertissement.
Pas non plus d'ailleurs parce qu'il n'aimait plus le travail ou qu'il ne respecterait plus le travail, c'est peut-être le cas pour certains, mais je ne crois pas que ce soit le cas pour la majorité des Français. Antoine Foucher dit « nous vivons la fin de la société du travail parce que travailler sérieusement ne permet plus de modifier son niveau de vie ».
Et il montre que pour quelqu'un qui est au salaire médian et qui dans les années 50 à 70, travailler de façon linéaire au salaire médian, l'augmentation du pouvoir d'achat annuel de l'ordre de 4 à 6 % permettait de doubler son niveau de vie en environ quinze ans. Et donc travailler sans changer de métier nécessairement. Mais progressivement permettait de s'élever dans son niveau de vie, dans son pouvoir d'achat.
À partir des années 70 et jusqu'aux années à partir des années 80 jusqu'aux années 2010, cette évolution ne s'est plus faite sur quinze ans. Le doublement du pouvoir d'achat ou du niveau de vie, mais sur 40 ans, ça voulait dire qu'une vie de travail permettait de s'élever. Mais il fallait une vie de travail. On constate aujourd'hui, avec les évolutions que vous connaissez tous, qu'il faudrait pour bénéficier de ce mouvement, travailler 70 ans et même ceux qui, comme moi, pensent qu'il va falloir travailler plus longtemps pour financer les retraites savent que 70 ans de travail, ça n'existe pas dans une vie, ça n'existe pas et on a donc ce constat terrible qui est terrible lorsqu'on pense que le travail est un élément de lien social, d'épanouissement et ou une nécessité. Nous avons ce constat terrible qu'une vie de travail ne suffit plus à changer la donne s'agissant d'un individu ou d'un ménage. C'est ça cette fin de la société du travail et cette fin de la société du travail. Elle est liée notamment à l'évolution des logements, à l'évolution de la politique du logement.
Nous allons vivre une séquence explosive, mais nous sommes déjà entrés dedans et on le sent. On en parle à mon avis pas suffisamment. Peut être passé en tous cas. Mais nous allons vivre une séquence explosive liée à la crise du logement. Cette crise, nous la voyons venir, elle est là. Elle a trois causes qui sont faciles à identifier une crise de la construction, une crise du marché de l'offre locative, une crise de la demande.
Toutes les trois ensembles se conjuguant et s'inspirant les unes les autres, si j'ose dire. La crise de la construction, c'est lié à la difficulté de l'accès au foncier, c'est lié au prix des matières, c'est lié aux normes qui rendent toujours plus cher la construction, alors même que dès 2017, nous avions voulu simplifier des normes et rendre la construction moins chère.
La vérité, c'est que le phénomène que nous constatons est d'une violence ou plus exactement d'une solidité et d'une fermeté qui fait que nous nous enfonçons dans une crise de la construction. La crise de l'offre locative, c'est à dire la crise de l'accès au marché de la location qui est rendue malheureusement possible par la conjugaison de beaucoup de mesures qui sont toutes le produit de toutes le produit d'une analyse de la situation qui voudraient améliorer les choses.
C'est la conjonction de Airbnb, du diagnostic de performance énergétique, du permis de louer, du blocage de loyers, de l'augmentation des taxes foncières. Nous rendons marché de l'offre locative la possibilité d'obtenir un logement, de louer un logement de plus en plus compliqué. Nous sommes en train de stresser le marché de l'offre locative. Il est en train de se contracter.
Quand il se contracte, il crée une crise très forte pour ceux qui ont besoin de trouver un bien sur le marché locatif.
Enfin, la crise de la demande bien, c'est la crise liée à la hausse des taux d'intérêt. Elle est mécanique et elle est violente. Vous connaissez cette statistique qui parle d'elle-même ? La moitié des demandes de crédit liée à l'achat d'un appartement ou d'une maison sont refusées, la moitié est refusée par les banques. Cela veut dire qu'on a la crise de la construction, la crise du marché locatif et la crise de la demande en même temps, si j'ose dire. Alors que faire ? On peut toujours se demander que faire ? C'est ce que faisait Lénine. Que faire ? Et ça me fait toujours du bien de citer Lénine à Guidel devant le MoDem.
Les amis, d'abord, la première chose, je crois que nous devons arrêter de stresser le marché locatif. Si nous voulons régler une partie de la solution, nous avons impérativement besoin de desserrer l'étau sur le marché locatif.
Qu'est-ce que ça veut dire ? Ça ne veut pas dire des choses faciles, ça veut dire des choses dont il faut bien mesurer ce qu'elles représentent.
Premier point Airbnb. Je suis certain qu'ici, moi le premier, vous avez parfois utilisé Airbnb. Pas pour mettre en location, ce n'est pas mon cas, mais pour utiliser l'instrument pour trouver une location. C'est formidable. Ça permet rapidement de trouver une alternative à l'offre hôtelière. Et certains utilisent tellement l'instrument qu'ils peuvent avoir une rémunération qui vient compléter des revenus, qui est utile.
Il ne s'agit pas critiquer l'utilisation des ruines, mais la vérité vraie, c'est que dans toute une série de zones, notamment les zones tendues, les zones touristiques, les zones littorales, le développement tellement rapide d'Airbnb crée un phénomène d'éviction des voisins au profit des touristes, crée un phénomène qui interdit d'avoir accès à un marché locatif. Puisque les propriétaires se disent qu'ils gagneront autant, voire plus, avec moins de contraintes liées au dégagement d'un éventuel locataire qui ne paierait pas grâce au marché grâce à Airbnb.
Et donc ce produit se développe. Et il ne s'agit pas encore une fois de mettre en cause ceux qui l'utilisent. Il s'agit de dire que l'utilisation qui en est faite est en train de faire peser une pression bien trop considérable et de susciter des effets bien trop pervers pour le marché de l'offre locative. Qu'est-ce qu'on fait ? On a fait déjà des choses.
Aujourd'hui, on ne peut pas mettre en location sur un bail un bien dans un certain nombre de zones. Plus de 120 jours par an. Vous avez des endroits à Amsterdam, Londres, où on a descendu cette limite à 90 ou 60 jours. Vous avez même des endroits aux Etats-Unis où on interdit la location d'un bien moins de 30 jours d'affilée.
C'est une logique un peu différente. On fait en sorte qu'il n'y ait pas de locations à la semaine ou de location au week end. Je vous fais observer, mesdames et messieurs, que j'ai cité Amsterdam, Londres et New York, qui sont trois villes à l'évidence attachées à ne pas s'inscrire dans une logique libérale. Vous voyez Amsterdam, Londres et New York, la vérité c'est que ces villes touristiques, comme beaucoup d'autres villes en France, ont compris la nécessité de la régulation et ont compris la nécessité d'éviter l'éviction complète de nos concitoyens des centres villes.
Et notez bien, mesdames et Messieurs, que c'est d'autant plus indispensable que nous sommes, sinon en train de développer un discours parfaitement schizophrène à l'égard de nos concitoyens en leur disant attention, l'étalement urbain très mauvais.
Il faut revenir vivre dans les villes. Ce que je crois profondément. Dans le même temps, on leur explique Vous ne trouverez pas d'appartements parce qu'ils vont être réservés à des locations très brèves, très rémunératrices, qui ne vous intéressent pas, qui ne vous concerne pas. Il y a là quelque chose qui est une bombe, qui est une bombe sociale, qui est une bombe urbaine, si j'ose dire, qu'il faut régler.
Premier sujet.
Deuxième sujet encore plus délicat et peut être la prudence devrait m'inciter à ne pas en parler. Mais quand même, je vais le faire. Mais quand même, je vais le faire. Le diagnostic de performance énergétique, D.P.E, là aussi, on parle d'un sentiment qui n'est pas un sentiment, qui est une analyse juste sur le fait que les passoires thermiques sont un problème énergétique, un problème environnemental et un problème social.
Et la majorité de la précédente majorité a pensé un système qui consiste à dire nous allons devoir faire en sorte de contraindre les propriétaires à faire des travaux qui permettront d'éviter ces passoires thermiques. Et l'une de ces un de ces éléments, ça va être de dire, à partir d'une certaine date 2025, les appartements qui sont classés en G, c'est à dire la plus piètre performance, ne pourront plus être remis à la location, devront sortir du marché aussi longtemps qu'ils n'auront pas fait l'objet de travaux.
Idée que j'entends et que je peux comprendre sur le plan théorique et que je vois très bien l'intérêt sur le plan politique. Mais il se trouve que par ailleurs, je suis maire du Havre, d'une ville assez pauvre ou en tout cas dans laquelle il y a beaucoup de quartiers de très grande pauvreté. Et qu'est-ce que j'observe ? J'observe que dans un certain nombre de ces quartiers, sortir du marché de la location des appartements classés en jeu, c'est mécaniquement réduire l'offre locative pour les plus modestes et évidemment pour les plus modestes.
Ce qui veut dire que ceux qui vont d'abord payer le prix de cette mesure, ce ne seront pas les gens qui ont les moyens de faire des travaux chez eux ou qui sont propriétaires logement. Ce seront ceux qui ont besoin d'accéder à des logements en effet peu chers, en effet, probablement passoires thermiques sur le marché locatif. Nous sommes en train, et c'est le fruit d'excellents, le sentiment que je ne cherche pas encore à mettre en cause.
Nous sommes en train de créer une impasse pour les plus modestes. Je l'ai dit au début de l'année parce qu'il m'a semblé que c'est ce que je voyais au Havre et que c'est ce qu'il fallait dire. Et juste après l'avoir écrit, même dans un dans un hebdomadaire, le ministre du Logement de l'époque m'a appelé en me disant Edouard, tu ne peux pas dire ça.
La transition écologique, c'est vraiment important. Et il avait raison. La transition écologique, c'est vraiment important. Mais je peux dire ça. Je peux dire ça parce que je crois que c'est vrai et je vois bien qu'un certain nombre de gens commencent à s'en rendre compte. Et je vois bien qu'on est gêné parce que personne ne veut donner le sentiment.
Et surtout, personne ne veut donner prise à l'idée qu'il ne faudrait pas aller vite et être ambitieux en matière de transition écologique. Mais disons que l'expérience m'a laissé comprendre qu'un très bon dispositif intellectuel que je peux parfaitement approuver lorsque ses implications sont toujours dirigées. S'agissant de leurs effets les plus difficiles sur les plus modestes, ça a peu de chances de passer dans notre population et a peu de chances, même d'une certaine façon, de produire les effets qui sont attendus.
Donc, je le dis, il faut déstresser le marché locatif sans rien renoncer à l'ambition écologique qui est la nôtre et qui est absolument impérative. Mais nous ne pouvons pas ne pas voir ce sujet qui arrive et qui arrive vite. 2025, c'est demain. Et les propriétaires, les locataires, Ils sont obligés de voir loin pour prendre des décisions. Troisième chose nous devons changer la logique, changer la logique de la politique du logement.
Savez-vous, mesdames et Messieurs, que la politique du logement, c'est près de 40 milliards par an, beaucoup d'argent, 40 milliards par an. Alors quand on dit qu'il faut changer la politique du logement en général, vous avez toujours quelqu'un, on cherche un constructeur ou un promoteur, bref, quelqu'un du secteur qui vous dit c'est 40 milliards de dépenses par an, mais ça, c'est 96 milliards de recettes.
Et vous faites attention si vous touchez au milliard de dépenses, vous allez diminuer les montants de recettes. C'est vrai. Mais on pourrait aussi imaginer qu'un système qui fonctionne bien permettrait d'augmenter les recettes. On pourrait même imaginer qu'un système qui fonctionne bien permettrait de baisser les dépenses tout en conservant les recettes. On pourrait quand même se dire qu'un système qui fonctionne avec 1,3 % du PIB, comme c'est le cas s'agissant de la politique du logement en France, nous permettrait d'obtenir des résultats un peu meilleurs qu'à l'étranger, où on ne consacre que 0,5 % du PIB dans les pays comparables.
Sur la politique du logement, ça ne va pas du tout les amis, pas du tout. Nous n'avons pas de très bons résultats et pourtant nous y consacre beaucoup d'argent. Il faut donc changer la logique, changer notre musique, ça peut vouloir dire, essayer de faire en sorte.
Par exemple, je le dis devant François, dont je sais qu'il est attaché à cette question, s'agissant d'un pays extrême, d'un État extrêmement endetté.
Ça peut-être vouloir dire, quitte à financer une partie de la politique du logement, autant veiller à ce que les seuls qui fassent du capital ne soient pas nécessairement d'autres que l'État, de façon à ce qu'une partie du financement des biens puisse revenir.
S'agissant du désendettement à l'État, pour que, s'agissant de la valorisation du capital fait à l'État, pour qu'il puisse se désendetter. Il y a là un changement de logique à opérer et la vérité, c'est que je pense que le secteur du logement n'y est pas totalement favorable.
Mais je suis certain que si on en explique les mérites aux Français, ils peuvent entendre l'intérêt de ce changement de logique.
Deuxième chose nous devons développer les foncières publiques et privées pour faire en sorte que le capital ne soit pas inactif, mais au contraire qu'il puisse tourner et que nous puissions retrouver des capacités d'investissement pour rénover. Car c'est la troisième priorité.
Nous devons moins nous préoccuper de construire que de rénover l'existant, de transformer l'existant. Les friches commerciales, les bâtiments conçus pour faire du logement et qui en vérité, demain ne seront plus des logements. Nous devons rénover l'ancien et nous devons donc sortir de cette logique de la construction qu'il faudra toujours construire. Bien entendu. Mais il faut mettre l'accent sur autre chose rénover plutôt que construire, densifier plutôt qu’étaler.
C'est un autre impératif. C'est un impératif urbain, c'est un impératif humain. Nous devons densifier nos villes et il n'y aura pas de sujet si on veut éviter, si on veut éviter d'utiliser des terres agricoles ou des espaces naturels, si on veut éviter d'étaler tellement nos agglomérations de façon à ce que nous ayons toutes les interactions sociales, et nous savons bien ce que ça veut dire couper les interactions sociales sur un territoire, c'est terrible.
Eh bien, nous devons redonner, non pas interdire, mais redonner envie à nos concitoyens de vivre en ville. Je vous parle de ça rapidement, mesdames et messieurs, et j'ai bien conscience que parler de la politique du logement, ça n'est pas, ce n'est pas s'exposer à un enthousiasme considérable. C'est technique, c'est même souvent incompréhensible.
En tout cas pour moi et d'ailleurs, je ne doute pas qu'un certain nombre de commentateurs qui diront que manifestement, je n'ai pas compris ceci. Vous verrez, Mais je vous le dis, il n'y a aucune hypothèse, aucune hypothèse, que nous réglerons les questions de pouvoir d'achat, de perspectives de société du travail si nous ne donnons pas un peu de marge de manœuvre et si nous ne désespérons pas l’étau du logement en France aujourd'hui.
Et je vais terminer par cette remarque qui n'est pas plus gaie, qui n'est pas plus joyeuse mais qui me semble tout aussi vrai : « Il n'y a pas de démocratie qui subsiste durablement à une érosion continue du pouvoir d'achat des classes moyennes ». Ça n'existe pas. Lorsque le pouvoir d'achat des classes moyennes diminue progressivement, de façon continue ou brutale dans le temps. La démocratie n'y résiste pas.
La promesse démocratique, ce n'est pas simplement un processus, ce n'est pas simplement une méthode de délibération qui est très importante. La promesse démocratique, c'est aussi que nous organisions une société ouverte, une société dans laquelle nous pouvons nous épanouir individuellement et nous élever collectivement. Et c’était une des promesses, probablement la plus importante et probablement la plus judicieuse du président de la République en 2017, celle qui fait que j'ai été fier et heureux d'être son Premier ministre pendant trois ans.
Mais si le pouvoir d'achat des classes moyennes continue à stagner, si même demain il continue à diminuer pour certains, alors je vous le dis, la démocratie n'y résistera pas. Et c'est donc pour cela que vous parlez de politique du logement. Certes, un sujet technique est en réalité un élément de la crise démocratique que nous vivons.
Or, ici, au MoDem, on est attaché à la démocratie, viscéralement attaché intellectuellement, humainement, viscéralement attaché à la démocratie.
Eh bien, mon sentiment, c'est que parmi tous les autres grands sujets qui doivent faire vivre la démocratie et auxquels nous devons nous attaquer pour résoudre les problèmes de la démocratie actuelle, il y a cette question du pouvoir d'achat et il y a cette question du logement. J'étais heureux de vous le dire.
Merci beaucoup.