François Bayrou : "Personne n’ayant commis un meurtre ou des actes de barbarie ne doit pouvoir être déclaré irresponsable sans procès ni débat contradictoire"
François Bayrou, Président du Mouvement Démocrate, était l'invité de BFM TV et a répondu aux questions de Jean-Baptiste Boursier, David Doukhan et Hedwige Chevrillon, ce dimanche 25 avril à 12h00, dans l'émission "BFM Politique". Il était question de sécurité, de responsabilité pénale, de stratégie vaccinale et des élections régionales.
Bonjour François Bayrou.
Bonjour.
Bienvenue dans cette émission. Je voudrais commencer par cette conférence de presse du Procureur antiterroriste que nous venons de suivre en direct sur BFM suite à l'attaque terroriste de Rambouillet.
On a appris quelques éléments sur le parcours du terroriste, notamment qu'il avait eu des troubles psychologiques qui n'ont pas donné lieu pour autant à un internement ni à de la médication. On a appris que son profil s'était radicalisé sur Internet et que l'expression de sa radicalisation était visible.
Gérald Darmanin va présenter un nouveau texte mercredi prochain au Conseil des ministres, en gros la prorogation de mesures de 2015-2017.
Est-ce de nature, selon vous, à lutter contre ce type de profil pour éviter ce type de drame ?
La première chose qu'il faut avoir à l'esprit, c'est que c'est extrêmement difficile.
Voilà un personnage qui n’était repéré par personne, qui n'avait aucune trace sur son casier judiciaire, dont la radicalisation date de quelques semaines à peine, qui n'a pas d'autre arme hélas qu'un couteau. C'est extrêmement difficile.
Mais le gouvernement a raison d'essayer de monter le niveau d'alerte et de précaution et ce niveau d'alerte et de précaution devrait être partagé par tout le monde, y compris dans l'univers médical.
On a vu qu'il avait consulté.
Je pense que les temps que nous vivons exigent que nous soyons tous en alerte, pas seulement les services d'ordre, de sécurité, de justice. Tous.
Alerte maximum sur la durée ? À chaque attentat on dit cela et…
Si vous croyez que cela va s'arrêter. Je suis comme vous savez peu partisan des mots et partisan des actes. La répétition des mots, c'est vrai, que d'une certaine manière, cela donne à tout le monde l'impression d'une espèce d'impuissance.
Les partisans des actes, partisans de la vigilance, partisans de l'alerte maximum.
Il ne faut pas oublier qu'un certain nombre des dispositions que le gouvernement avait présentées et fait adopter ont été annulées par les décisions du Conseil Constitutionnel.
Je pense que le gouvernement a à l'esprit de monter ce niveau de vigilance.
Mais, est-ce que ce sera suffisamment efficace ? Là, on pourrait se dire : peut-on accepter en 2021 qu'un homme qui présente des faisceaux concordants comme cela ne soit pas repéré ?
Les faisceaux concordants… encore une fois, cela veut dire surveillance sur Internet et vous savez les levées de boucliers que la surveillance sur Internet provoque.
Je pense cependant que c'est nécessaire si l’on veut éviter des drames de cet ordre, mais vous avez vu à quel point la polémique est forte sur ces sujets. Et donc, que le gouvernement veuille constamment élever le niveau de vigilance, c'est vrai, je ne crois pas qu'il s'agisse d'une atteinte aux libertés. Pour ma part, je crois que c'est une sécurité qui est offerte à tous les concitoyens que nous sommes et donc je pense que le gouvernement a raison.
Juste d'un point de vue personnel, il y a une résonance particulière chez vous avec cette attaque. On va rappeler qu'un responsable de centre d'accueil de réfugiés a été poignardé à Pau en février.
Et d'autres faits que nous évoquerons peut-être dans la suite de l'émission qui ont eu lieu à Pau. On peut tous avoir de la famille très proche.
Est-ce qu’à votre avis, il faut ou y a-t-il un lien entre l'immigration clandestine et la menace terroriste ?
Il y a un lien entre le choc que représentent en effet l'immigration, les déracinements d'un certain nombre de personnages fragiles ; bien sûr, cela ajoute au risque, mais sur l'immigration, le nombre de déclarations de ceux qui, quand ils étaient au pouvoir n'ont rien fait sur le sujet, est impressionnant.
Il y a ceux qui n’ont jamais exercé le pouvoir, Marine Le Pen, au niveau national en tout cas.
À aucun niveau.
En tout cas, elle partage le pouvoir législatif. Elle considère que ces drames valident au fond les thèses qu'elle défend depuis des années.
Elle explique qu'avec elle, les clandestins seraient tous renvoyés chez eux et, ainsi, la menace terroriste diminuerait.
Que lui répondez-vous François Bayrou ?
Vous savez exactement à quel aune il faut juger ces déclarations et les Français le font parfaitement bien. Quand on demande aux Français, dans toutes les enquêtes : « est-ce que quelqu'un d'autre ferait mieux sur ces sujets que le gouvernement actuel ? »
La réponse unanime, presque, 80 %, c'est non. Donc chacun joue son jeu. Vous voyez bien qu’il y a des polémiques, des oppositions ; tout ceci est un peu secondaire.
Tous ceux qui nous écoutent sont absolument habitués à ces déclarations-là.
Je pense qu'il y a peu de gouvernements dont les paroles sur ce sujet se soient transformées en actes autant que ces dernières années.
Est-ce que cela suffit ? Non, cela ne suffit jamais.
Lorsque la menace monte, la protection, la précaution se trouve toujours mise au défi. Eh bien, il faut le relever.
Je crois que le gouvernement le fait. Je ne dis pas qu'il fasse tout bien. Je n'ai jamais vu de gouvernement qui fasse tout bien, et vous non plus et vous êtes des observateurs attentifs. Dans toute la durée de l'histoire, on n'a jamais vu cela.
Pourquoi ? C'est exactement la guerre perpétuelle entre la menace et la défense.
Le porte-parole du gouvernement que vous évoquez dit ce matin dans le Parisien, dans nos colonnes : « À chaque attentat, il y a ces victimes ces souffrances et ces vautours. »
Vous êtes d'accord avec cela ?
Oui, et vous aussi, et chacun des Français.
Je n'ai pas de sentiment à exprimer sur ce plateau.
Intuitu personae, comme on disait en latin. Je parle de tous les observateurs qui savent que c'est vrai et tous les Français qui nous écoutent savent que c'est vrai. Chaque fois qu'il y a un événement, il y a exploitation de l'événement.
Une question revient un peu systématiquement : Faut-il revenir, à votre avis François Bayrou, sur le regroupement familial ? C'est peut-être ce qui a forcé, développé l'immigration en France.
Comment faire pour que Pierre et Mohamed puissent être dans la même école pour renforcer la mixité sociale. Évidemment, je fais allusion au témoignage de cette jeune femme face à Emmanuel Macron.
Le regroupement familial est moins facile qu'on ne le pense. Des précautions ont été élevées contre tout cela. C'est une affaire qui date des années soixante-dix.
Oui, Jacques Chirac.
Et personne depuis les années soixante-dix n'a pris de mesure décisive sur ce sujet.
Moi, je fais très attention, vous savez bien, à ce que l'on appelle les : « y qu’a » et les « faut qu’on ».
C'est le premier point.
Personne ne nie que toutes les situations de cet ordre sont des situations qui augmentent le risque et personne ne nie qu'il faudrait intervenir le plus tôt possible. Dans le drame que nous avons vécu à Pau et que vous rappeliez, l'animateur d'une de ces associations qui viennent en aide aux réfugiés, aux sans-papiers, qui essaient de les aider, a été poignardé par l'un de ceux qui relevaient de l'association.
Dans ce drame-là, on voit bien que, oui, il y avait des signes d'alerte préalable, mais que les décisions de justice n'avaient pas été appliquées.
Sur la mixité sociale, on voit bien qu’aujourd'hui elles n'existent quasiment plus malgré les décisions qui ont été prises, malgré les logements sociaux. On voit bien que cela n'existe plus en ce moment.
Dire que cela n’existe plus, c'est un peu rapide. J’ai entendu cette déclaration : « mon fils n'a jamais rencontré un enfant qui s’appelait Pierre. » Il y a beaucoup moins d’enfants qui s’appellent Pierre aujourd’hui, y compris dans les milieux les plus enracinés car il y a des vagues sur les prénoms comme cela.
Je ne suis pas sûr que la déclaration s'appliquait à l'occurrence du prénom Pierre !
Je vais vous dire le fond de ce que je pense.
S'il vous plaît.
Il y a un certain nombre de gens, dont je suis, qui considèrent que l'on ne doit pas toujours être ramené à ces questions d'origine, de religion, de couleur de peau, de communauté à laquelle on appartient. Il y a un certain nombre de gens, dont je suis, qui ont envie que l'on puisse aussi considérer les gens sur d'autres éléments que ceux qui consistent à tout ramener à la communauté à laquelle on appartient, à la religion à laquelle on se rattache.
On a envie d'être dans la situation où l'on regarde les gens pour les femmes, les hommes, les enfants, pour d'autres raisons que celle-là.
On a le droit de dépasser cela. L'espèce de mouvement perpétuel qui consiste à tout ramener aux notions de race, les racisés, les racialisés, à la couleur de la peau, plus ou moins aux choix religieux qui souvent nous sont imposés par la tradition familiale, toutes ces questions-là, dans l'état où notre pays se trouve, et dans l'état où le monde se trouve, elles comptent, elles existent, mais je suis pour que l'on arrête d'en faire une obsession.
C'est au gouvernement qui est là d'y travailler, François Bayrou.
Je voulais rebondir sur cette question. Vous connaissez cette théorie développée par Gilles Kepel du terrorisme d'ambiance dont l'attaque de Rambouillet participe, c'est-à-dire ces terroristes qui sont tous en bas du spectre ou hors du spectre. Il explique aussi que les moyens de lutte, de détection ne sont pas suffisants, qu’il faut du culturel, de l'associatif, de l'éducatif.
Cela participe à ce que vous dites à l’instant.
Très bien sûr le diagnostic, mais, dans les faits, on fait comment ?
Non, sur le diagnostic, pas très bien car ce que le débat public alimente constamment, y compris sur vos chaînes de télévision, sur les réseaux sociaux, c'est l'exaspération de ces sujets.
Alors, je ne dis pas qu'il n'existe pas.
Vous savez qui je suis. Je suis quelqu’un qui est croyant et laïc en même temps. J'ai toujours défendu les deux, peut-être on aura l'occasion d'en parler.
Mais je suis en même temps un homme, un père de famille qui a envie que ces questions n'aveuglent pas, ne soient pas la perpétuelle obsession.
Une femme ou un homme, ce n'est pas sa couleur de peau, ce n'est pas sa religion, ce n'est pas son origine, ce n'est pas son nom, c'est quelque chose d'autre. Et on a le droit d'avoir une approche compréhensive devant ces personnes.
Au fond, vous nous dites, François Bayrou, les universalistes ont une bataille à mener.
Oui.
Mais vous êtes en train de la perdre.
Non. Vous savez ce que je pense, que j’essaie de prouver dans toute ma vie, on ne perd que les batailles que l'on ne mène pas.
Il y a en effet depuis quelques années des batailles qu'on ne livre pas comme si c'était la lutte du pot de fer contre le pot de terre, comme ceux qui voulaient ne pas être prisonniers de ces obsessions étaient par définition submergés par les vagues qui se développent sur vos écrans, car cela joue un très grand rôle le monde médiatique et le débat médiatique sur ces sujets.
Si vous prenez les débats que vous organisez avec les experts, les contre-experts, les témoignages, à toute heure du jour et de la nuit, avec des visages qui changent.
Il y a deux débats : le sanitaire, c'est un débat très important et il y a ces questions d'identité, de race, et vous êtes une chambre d’échos.
Ce n'est pas le reproche que je vous en fais ; vous, vous prenez tout ce qui brûle car c'est plus intéressant, c'est votre métier. Et, cependant, considérez que je suis une seconde le représentant de ces millions et millions et millions de Français qui considèrent que ce n'est pas cela le sujet principal.
Rassurez-vous François Bayrou. Si vous nous regardez avec régularité, vous verrez qu'il n'y a pas que les choses qui brûlent, il y a aussi beaucoup de gens, ce que vous faites aujourd’hui, qui viennent parler du fond du sujet et ce n’est pas parce qu’on n’en parle pas qu’il n’existe pas.
Vous êtes d’accord avec cela ?
Oui, mais vous avez compris ?
Cette sensibilité que je représente, ce ne sont pas des gens qui disent : ces sujets n'existent pas.
Je suis maire d'une Ville, il y a des quartiers, je sais bien les difficultés, je sais bien les incidents, je sais bien ce qui se passe à certains moments.
Très bien.
Et des drames que vous avez évoqués, nous en avons vécu quelques-uns, mais, il n'est pas possible que ces sujets envahissent les écrans au point que l'on soit obligé de se référer à la couleur, à la race, au prénom, à l'origine, à la culture alors que l'on a envie de dépasser cela.
Les histoires de prénoms, c'est, là encore, des vagues. Si j’avais eu plusieurs vies, une d’elles aurait été de sociologue car j’aurais essayé d’analyser ces affaires de prénoms.
C'est encore possible ! Une reconversion est encore possible !
Les prénoms, c'est formidable, car les parents, la mère qui attend le bébé s'interrogent avec leurs proches pour choisir un prénom qui soit original, chaleureux et bienveillant, qui dise quelque chose de la personnalité. Et chacun se creuse la tête en direction de cette originalité et même de ce caractère unique du prénom et ils choisissent tous le même en même temps !
Il y a un prénom, c'est celui d'Emmanuel. Emmanuel Macron. Il nous dit, mardi, dans Le Figaro, que nous avons droit à une vie paisible et, vendredi, cette fonctionnelle est assassinée.
Cette conjonction est terrible pour le Président de la République.
Est-ce que vous comprenez que nous allons devoir vivre comme cela pendant des décennies ?
Vous luttez contre l'alcool au volant et le gouvernement dit, à juste titre : « Ce n'est pas acceptable » et, trois jours après, vous avez un drame précisément lié à l'alcool.
Cela veut dire que la politique n'a pas tous les pouvoirs sur la société.
Cela veut dire qu'il n'existe pas de dirigeant, dans quelques pays du monde que ce soit, regardez les États-Unis avec les fusillades, qui puisse décider de sa propre volonté que tous les malheurs, tous les drames, toutes les folies, toutes les dingueries vont disparaître.
Des décennies, vous dites, pour la menace terroriste !
Depuis combien de temps existe-t-elle ? 40 ans.
Des décennies déjà 1995, métro Saint-Michel, par exemple. Et cela s’accélère.
Les attentats antisémites, 40 ans 50 ans et, avant, les attentats de l'OAS, du FLN. Cela fait 60 ans et, si on remontait, on en trouverait probablement aussi beaucoup qui sont inscrits dans l'histoire.
Je vous suggère un autre prénom, Mia, qui a marqué l'actualité : cette petite-fille enlevée par sa mère. Les services sociaux la lui avaient retirée ; ils estimaient que sa maman représentait un danger pour elle.
Derrière l'enlèvement, il y a une mouvance dite complotiste qui a organisé cela et un homme présenté comme un gourou de ce mouvement, qui est un ancien du MoDem, vous l'avez exclu de votre parti.
Immédiatement.
Est-ce que vous aviez été alerté par ces prises de position et est-ce que cela vous avait inquiété à l'époque.
Cela était un déséquilibré et on a pris les décisions qui s’imposaient pour qu’il ne soit plus dans nos rangs.
Quand vous avez un parti politique, il y a des adhésions et vous n'êtes pas toujours certain de l’équilibre des adhérents.
Malgré tout, François Bayrou, est-ce que ce complotisme à visage découvert, cela vous inquiète ? Est-ce que vous vous dites que c'est un phénomène qui est en train d'émerger ?
C'est un peu du même ordre que le terrorisme que nous évoquions. La réponse est la même. Si vous voulez lutter contre cela, il faut des moyens et lutter et un des moyens, c'est le contrôle d'Internet ce qui fait lever des mouvements de protestations extrêmement puissants parce qu'il y a une partie de la société qui voudrait qu'Internet soit un univers sans contrôle. Et je n'appartiens pas à cette partie de la société.
Il faut faire attention à toutes les libertés.
C'est cet équilibre qui est évidemment difficile à trouver, mais qui est vital.
Des rassemblements sont attendus cet après-midi : hommage à Sarah Halimi, surtout critiques contre la décision de la Cour de Cassation de ne pas reconnaître son assassin responsable de ces actes et, cela, en raison de son importante consommation de cannabis. La juridiction a pourtant reconnu le caractère antisémite de l'attaque.
Je rappelle que vous avez également été garde des Sceaux. Est-ce que vous partagez l’avis d’Emmanuel Macron : faut-il changer la loi ?
Je pense qu'il faut changer la loi et, si vous me permettez, je pense qu'il faut la changer plus profondément que ce qui est aujourd'hui envisagé.
Je dis ce qui est aujourd'hui envisagé.
Comment est-il possible d'accepter qu'un automobiliste, ivre ou ayant pris du cannabis en même temps, qui tue une petite-fille sur un passage clouté, serait un jour déclaré irresponsable de ses actes ? C'est purement et simplement insupportable.
Deuxièmement, quelle différence entre l'automobiliste pour qui l’alcoolémie est un facteur aggravant et ce crime atroce, barbare ? Quelle différence ? Pour moi, aucune.
Donc par la différence qui s'est établie par la jurisprudence sur ce sujet tendant à déclarer irresponsable quelqu'un qui s'est adonné à la drogue, on pourrait demain avoir des gens qui s'adonnent à la drogue pour être déclarés irresponsables.
Donc, de ce point de vue, il faut changer la loi et je pense que l'on doit aller beaucoup plus loin.
Comment ?
Ce qui est, à mon sens, profondément choquant sur ce sujet, ce n'est pas que quelqu'un soit déclaré irresponsable parce qu'il est déséquilibré, fou comme l'on dit, c'est que cela se fasse sans procès parce que c'est un manque d'attention, de respect, pour les victimes.
Il n'y a pas que les assassins, que les tueurs ou que les barbares à l'égard de qui il faut avoir naturellement le respect de la loi, mais il y a les victimes.
Vous voudriez dire que c’est au procès d’établir si quelqu’un est fou ?
Nous avons eu en 2004, à Pau, une histoire absolument atroce dans un hôpital psychiatrique.
Un homme est venu, a tué a décapité deux personnels de l'hôpital psychiatrique.
Il a été déclaré irresponsable. Donc il n'a jamais été jugé.
Imaginez les familles, imaginez les enfants les maris de ces deux jeunes femmes, imaginez ce que cela représente comme déchirement intérieur et comme, je ne sais pas quoi, sentiment d'abandon de la part de la société.
Je pense qu'il faudrait changer la loi sur un point. Ce n'est pas que ce type de personnalité ne doit pas être jugé, il doit être jugé et, éventuellement, déclaré irresponsable à l'issue du procès, même s'ils doivent être jugés en leur absence, après tout on a la procédure de la contumace.
Il reviendrait à des magistrats d'établir si quelqu’un est malade sur un plan mental, alors que c'est la responsabilité des psychiatres dans notre pays, des experts.
Dans le cas qui nous occupe, ce sont les magistrats qui ont dit : les experts vont dans ce sens, ou une majorité d’experts va dans ce sens.
Je pense que cela devrait se faire à l'issue d'un projet car les victimes, car les victimes… Songez à la famille de Sarah Halimi. Pendant 40 minutes, elle est torturée, rouée de coups et jetée par la fenêtre et on leur dit : irresponsabilité, il n'y a pas de procès.
C'est évidemment insupportable mais en fin de compte on ne juge pas les fous.
Oui, on dit ce genre de phrase : En France, on ne juge pas les fous.
Eh bien, moi, je considère que l'irresponsabilité doit être établie à l'issue d'un procès, qu'on le doit aux familles.
Donc tout le monde doit être jugé, quitte à être déclaré irresponsable à l’issue du procès.
Absolument.
Si l’on connaît l’issue du procès ?
Quand il y a meurtre, assassinat, acte de torture et de barbarie, ce sont des choses suffisamment graves pour les victimes pour que l’on ne considère pas que l’on puisse exonérer quelqu’un d’un procès.
Je suis sans doute minoritaire d’ailleurs vos réactions le montrent.
Non, nous posons des questions. C’est pour comprendre.
Je ne vous mets pas en cause. C’est pour animer la conversation. Ce sont des sujets vraiment très importants, mais cette présomption de non-jugement à partir du moment où l’on reconnaît que quelqu'un a son jugement aboli ou altéré, pour moi cela devrait être prononcé à l'issue d'un procès et je dis : on doit cela aussi aux victimes.
Une autre affaire dans laquelle il y a eu un procès, c'est l'attaque de Viry-Châtillon, des policiers brûlés dans leur voiture en 2016 : 5 individus condamnés, 6 à 18 ans de réclusion, mais 8 acquittements.
Cela a déclenché des propositions politiques, nous sommes dans une année présidentielle, Xavier Bertrand considère qu'il faudrait changer la Constitution pour instaurer une peine automatique d'un an de prison pour toute personne jugée coupable d'un geste, d'une attaque contre quelqu'un qui est dépositaire de l'autorité publique.
Que pensez-vous, ancien garde des Sceaux, de cette proposition ?
Comme dire. Dans vos colonnes il y a écrit le concours Lépine, concours pour des inventeurs. On est là-dedans et on va l’être pendant longtemps.
Si l’on prenait les choses au pied de la lettre ; un an de prison, c'est peu n'est-ce pas.
Il n'y a pas eu un jugement inférieur ou égal, c'est entre 6 et 18 ans.
Pour ceux qui ont été condamnés.
Voyez qu'il y a là quelque chose d'un peu étrange.
Je demande que l'on fasse attention à la multiplication des propositions.
Les policiers sont en colère.
Ils ont raison.
Il estime que cette décision de justice est « laxiste » et que cette décision de justice encourage ceux qui le souhaitent à s'en prendre aux forces de l'ordre.
Je n'utilise pas les adjectifs de cet ordre. Je vais vous dire ce à quoi je pense.
Un policier, une policière qui est devant ce genre de situation, qui mène une enquête, qui arrête quelqu'un et qui le retrouve dans la rue le lendemain matin sans qu’il y ait eu sanction simplement parce qu’un certain nombre de mécanismes ont joué, ils sont exaspérés, et je comprends cette exaspération.
Je comprends cette incompréhension : comment cela se fait ? On se désarme nous-mêmes.
Donc de ce point de vue, il y a des orientations à prendre ; il y en a une qui est à prendre : il faut approfondir cette question de bande. Car celui qui appartient à une bande et qui voit sous ses yeux se dérouler ces faits absolument ignobles, on casse la vitre on jette un cocktail Molotov à l'intérieur pour tuer des fonctionnaires de police qui sont là.
Ils ne doivent pas être acquittés ? C'est ce que vous venez de dire.
Celui qui est là, qui assiste et qui ne fait rien…
Cela appelle « non-assistance à personne en danger ».
Et donc le phénomène de bande doit je crois que c'est d'ailleurs la loi être un facteur aggravant de la situation.
Donc vous voyez que prendre la question uniquement du point de vue individuel - il est vrai que dans les principes de la loi, il n'y a de responsabilité que personnelle. C'est vrai, mais il y a des facteurs qui sont des facteurs aggravants et le phénomène de bande mérite une prise de conscience de notre part à tous.
Je voudrais que nous avancions en parlant de la crise sanitaire. Les écoles vont rouvrir demain, vous êtes Maire de Pau, en responsabilité maternelle, crèche, école primaire…
Et j’ai été ministre de l’Éducation !
Est-ce que vous êtes prêts, à Pau, à accueillir à nouveau les enfants ?
Oui, je pense que Oui. Vous voyez bien le débat. Nous allons prendre un peu de recul sur le débat pour voir les principes.
Je pense que l'on ne peut pas fermer un pays, on ne peut pas mettre un pays sous cloche tout le temps de manière durable.
Et donc j'ai soutenu l'orientation du gouvernement disant : essayons de maintenir le plus possible au maximum la vie, et notamment la vie pour les enfants et pour les jeunes. Les dégâts qui sont faits, c'est dans un journal ce matin, l'explosion des cas de violences familiales, de violences à l’égard des enfants, violences à l'intérieur des couples liées à cette situation d'enfermement, c'est aussi un dégât collatéral et les retards de langage car, l'école, cela sert à cela, cela sert à apporter le langage, la sociabilité. L'enfermement : les êtres humains ne sont pas faits pour être enfermés.
Il y a une situation très étrange.
Oui, et on a raison de suivre toutes les précautions sanitaires possibles.
Un certain nombre est, à mes yeux, mal expliqué : par exemple le fait qu'il n'y a pas ou très peu ou presque pas de contamination dès que l'on est au grand air.
Quand on est au grand air, qu’il y a les distances nécessaires et, si les distances ne sont pas là, qu'on a le masque, il n'y a pas de contamination. Et donc j'ai plaidé depuis longtemps que l'on rende le grand air. Et oui, nous sommes prêts à accueillir les enfants dans les écoles, d'autant que Pau est dans la région de France ou une des très petits nombres de régions de France qui a le moins de contamination.
François Bayrou, si, en même temps, vous êtes parents, vous avez envie de mettre votre enfant à l’école ou vos enfants à l'école car vous travaillez, c'est très compliqué de faire la classe et, en même temps, en télétravail. Et, de l'autre côté, vous allez mettre lundi vos enfants à l'école et vous savez qu'ils ont toutes les chances de se faire contaminer, donc de vous contaminer.
C'est une situation complexe, c'est un choix cornélien.
Alors, on ferme ? Il n'y a pas d'école ?
Je plaide pour une réponse.
Ma réponse à moi, c'est que l'école est indispensable à la vie des enfants, à la vie des familles et simplement à l'idée qu'un pays ne s'enferme pas.
Parlons de libération.
Mois de mai, en fait, en mai fait ce qu'il te plaît. On n’y sera pas. Enfin, peut-être que cela ira un peu mieux.
On lit que, peut-être, votre département, les Pyrénées-Atlantiques, pourrait être un département test pour le déconfinement territorialisé.
Avez-vous ces informations ?
Oui, je comprends. Encore une fois, nous avons la chance d’être un des deux départements français le moins atteint par l'épidémie.
On a pris beaucoup de précautions, on a beaucoup testé, on vaccine, mais on a la chance, par la géographie et peut-être par la qualité de l'air, d'être plus à l'abri que d'autres.
Oui, je comprends très bien que l'on ait une approche localisée, régionalisée, oui nous sommes prêts à l'affronter. Mais soyons en garde contre le fait qu'il y ait tout d'un coup des phénomènes de vases communicants entre les régions libérées, ou en tout cas pour lesquelles on ait ouvert un certain nombre de possibilités et les autres.
Ce sera pour quand chez vous ?
On n'a pas décidé de la date.
En attendant, ce matin Jean Castex en déplacement à l'aéroport Paris Roissy est venu pour réexpliquer les mesures qui sont prises de contraintes pour des gens qui rentreraient du Brésil, d'Inde, il y a toute une liste de pays, on a l'impression que l'on a un train de retard.
Je parle de trains alors que l'on est à l'aéroport, vous m'en excuserez. On a l'impression que c'est trop tard, que l'on met toujours des jours et des jours avant de prendre des décisions qui paraissent relever du bon sens.
L'espèce de réquisitoire perpétuel contre les gouvernants nourri par la totalité des acteurs et observateurs, c'est un sport national, je ne m'y livre pas !
Comprenez que nos concitoyens s'interrogent.
J'avais plaidé pour le report des élections municipales au mois de mars 2020. Je n'ai pas eu gain de cause.
J'ai plaidé pour le report des élections du mois de juin, Je n'ai pas eu gain de cause parce que tous les leaders de l'opposition sans exception sont montés au créneau en disant : « c'est une atteinte démocratique insupportable » en réalité parce qu'ils pensent qu'ils vont avoir un gain électoral si les gens votent moins.
Tant que l'on en est là, ce qui est inacceptable et qui est pour moi un signe de retard incroyable, c’est que l'on n’ait toujours pas en France de vote par correspondance, on n’a toujours pas en France de vote par Internet ou de vote par anticipation alors que ce n’est pas le cas de pays qui nous entourent. Aux États-Unis, il y a 100 millions de personnes qui ont voté par correspondance.
Je trouve cette incapacité assumée par les administrations et les grandes autorités gouvernementales désolante.
On vous interroge maîtrise des frontières et vous répondez droit de vote par correspondance. On s’en est rendu compte.
Maîtrise des frontières, d’Inde, je suis bien placé pour le savoir, il n'y a pas de possibilités de voyage.
Du Brésil, quoi de plus normal que de fermer les frontières quand on sait ce que le variant brésilien provoque comme accidents. Ce n'est pas la faute des Brésiliens le variant, c'est une mutation du virus.
On en aura d'autres. On n'est pas sorti de cette opération au Plan. J’ai produit une note au mois d'octobre, la première et la seule jusqu'à maintenant qui ait été produite en Europe, dont le thème était : Et si le virus durait ?
On était en octobre, tout le monde croyait que cela allait finir.
Donc la raison est que, oui, il faut vacciner, oui il faut être prudent et oui on a raison quand on prend des mesures de prudence.
Une question récurrente mais qui fait encore plus sens en ce moment sur la vaccination : il y a beaucoup d'endroits en France, ce n'est pas un mot d'esprit, où des doses ne trouvent pas preneur. J'interrogeais hier un médecin généraliste de Mulhouse qui a jeté des doses, faute de personnes à vacciner.
Faut-il ouvrir la vaccination plus largement à tout le monde et dire aux gens : « venez ! ».
Il faut prioriser et lorsque l’on a des problèmes de doses supplémentaires, il faut les ouvrir à toutes les générations bien entendu.
Astrazeneca est interdit aux moins de 55 ans pour l'instant. Faut-il baisser la limite d’âge ?
Concernant Astrazeneca, il existe des raisons médicales !
Au Royaume-Uni c'est trente ans.
Vous êtes-vous fait vacciner avec Astrazeneca ?
Non, j’ai été vacciné à la date prévue par Moderna.
Pourquoi est-ce que l’on ne baisse pas à 30 ans, comme au Royaume-Uni ?
Posez la question aux spécialistes.
La Haute Autorité de Santé ? D’un point de vue santé, c’est le responsable politique que j'interroge ; est-ce que cela ferait sens pour vous ?
Je répète, comme vous le savez, je défends la vaccination depuis le premier jour et défends même depuis le premier jour le passeport vaccinal, en tout cas un certificat de vaccination pour qu'un certain nombre d'activités puissent rouvrir.
Je suis favorable à ce que chaque fois que l'on a des doses excédentaires, il faille absolument qu'elles soient prescrites et utilisées pour des concitoyens, car cela fait monter le niveau de vaccination de la nation.
Sur la proportionnelle, je voudrais tout simplement vous demander, si l’on peut dire à nos concitoyens qu'en juin 2022 ils ne voteront pas à la proportionnelle pour les législatives ?
Autrement dit, vous me demandez si cela est plié ?
Tout à fait.
Eh bien, pour moi cela ne l'est pas.
Voilà ! Je sais que pour vous ce n’est pas plié et cela est très surprenant. Alors qu’en est-il ?
Je suis peut-être un incorrigible optimiste ou un combattant infatigable lorsqu’il y a des sujets que je considère comme vitaux. Vous voyez bien ce qu’il se passe, la rupture entre le prétendu sommet de nos institutions et la base, mais c'est un épouvantable malheur national, nous ne devrions pas accepter cela !
Pourquoi ? Parmi les causes, je ne dis pas que ce soit la seule, il en existe une évidente : plus de la moitié des Français ne sont pas représentés dans nos institutions, simplement parce qu’ils appartiennent à des partis minoritaires. Toute ma vie, j'ai plaidé pour que l'on ne considère pas comme légitime le fait que parce que vous êtes minoritaires, vous êtes exclu.
Aujourd'hui les minoritaires constituent ensemble la majorité. Or, tous les risques que l'on décrit abondamment sur la proportionnelle, franchement, si l’on regarde tous les pays d'Europe qui nous entourent, par exemple en Allemagne c'est la proportionnelle intégrale, le gouvernement d'Angela Merkel est en place depuis 16 ans.
Figurez-vous le nombre de ceux qui ont défilé chez nous depuis 16 ans !
On parle de stabilité d'un côté…
Emmanuel Macron ne vous écoute pas et j'irai même plus loin, au fond il ne tient pas parole.
Ce pour quoi vous dites que c'est plié et que moi je considère que ce ne l’est pas.
Est-ce parce qu’une parole a été donnée ?
Pas seulement, car il faut à tout prix que l'on redonne de l'oxygène à notre vie politique.
Je disais d’ailleurs que les risques n'existent pas, car chez nous, nous avons l'élection du Président de la République au suffrage universel. Le Général de Gaulle, lorsqu’il a créé la Ve République, a dit : « c'est le Président de la République qui formera le gouvernement en tenant compte des nuances de l’Assemblée ». De plus, de Gaulle en 1945 a choisi la proportionnelle, car il savait bien qu’il faut faire respirer un pays et empêcher le monopole du pouvoir.
J'ai une question à propos du Modem, car on sent qu’il y a un peu de flottement à l'occasion de ces élections régionales, mais aussi du flottement au sein du Modem lorsque l'on voit ce qu’il se passe en Île-de-France notamment. En effet, il s’y trouve des élus du Modem qui ont décidé d’apporter leur soutien à Valérie Pécresse, alors qu’il existe une liste « la République en Marche » qui est tenue par Laurent Saint-Martin ; on voit bien qu’il y a une alliance entre le Modem et la République en Marche.
Est-ce que, même dans les statuts du Modem, vous allez exclure les maires qui soutiennent Valérie Pécresse ?
Écoutez c'est très simple, je n'ai pas l’habitude de me défiler et les décisions qui doivent être prises le seront.
Vous avez dit « les élus qui soutiennent », ce ne sont pas des élus, ce sont des sortants qui ont participé à cette majorité-là et dans une région ou une autre, c'est comme cela aussi. Ce sont des choses parfaitement compréhensibles, mais la force d'un mouvement politique, c'est sa cohésion…
Ils seront donc exclus.
… et de cette cohésion, je suis le garant.
Au Centre-Val de Loire, Marc Fesneau, ministre chargé des Relations avec le Parlement est candidat pour prendre la Région.
Au fond, est-ce que le Modem va sauver l'honneur de la majorité dans ces élections régionales ? Je ne vois pas trop les candidats LREM être dans des situations de victoire.
Nous avons deux candidats en première ligne, Marc Fesneau et Geneviève Darrieussecq en Nouvelle Aquitaine qui sont tous deux membres du Gouvernement.
C’est plus dur en Nouvelle Aquitaine tout de même.
La situation politique n'est pas tout à fait la même. Mais, Marc Fesneau est quelqu'un de très bien ; ce n'est pas parce qu’il a l'étiquette du Modem, ni parce qu’il est ministre, c'est parce que tous ceux qui le voient et le rencontrent, savent que c'est quelqu'un de bien. Je trouve qu'il ressemble à cette région, par son équilibre et un petit éclair d'humour ou d'ironie au coin des yeux. C'est une région qui n'aime pas être dupe de toutes les apparences et des galons sur les épaules, c'est une région qui aime bien sa singularité.
Les galons, c'est fini de toute façon !
Au 27 juin il est élu et il faut assumer ses responsabilités ou s’il est battu au suffrage universel, il ne peut pas être ministre…
Je ne suis pas d'accord, vous en parlerez avec le Président de la République. Lorsque l’on va au feu dans des situations difficiles, on mérite la considération.
Toujours au sujet de la campagne des élections régionales, j'imagine que vous avez vu la campagne visuelle d'Europe Écologie des Verts en Île-de-France.
C’est une énorme polémique, le Parti met au même niveau les chasseurs, les fachos, les boomers ; vous êtes vous-même un boomer François Bayrou, des personnes qui sont nées du baby-boom dans cette période entre 45 et 60.
Non, il est indiqué entre 45 et 75 !
Oui 75, de façon élargie.
La campagne, c'est pour dire qu'en gros ces personnes vont défendre leurs intérêts et vont se déplacer pour voter et si vous êtes partisans de la défense de l'écologie, il faut le faire, pour faire aussi entendre votre voix, c’est leur idée. C’est une énorme polémique : quel est votre sentiment ?
C'est toujours la même histoire, celle que je décrivais il y a une minute au début de notre entretien. C’est que l’on ramène toujours les individus à leur couleur de peau, religion et là, à leur âge, à leurs opinions ; plus personne n'est regardé comme un citoyen.
Cette campagne dit que l’on ne regarde pas les individus comme des citoyens, on les regarde comme appartenant à une catégorie, une communauté et que c'est la catégorie et la communauté qui font le vote. Ainsi, parce que vous avez plus de 50 ans, mettons, cela veut dire que vous voterez d'une certaine manière. De plus, c'est une campagne qui dit : « parce que vous êtes jeunes vous ne pouvez voter que pour nous ».
Selon moi, cela ne ressemble pas à la démocratie et au débat démocratique comme nous voudrions le vivre.
Comprenez, aucun d'entre nous n'est, ni son gendre, ni son sexe, ni son âge, ni son origine. Nous sommes tous des citoyens en train de se former, parfois on se casse la figure. Le vote c'est le fait de considérer un citoyen comme responsable individuellement, comme étant personnellement responsable et personnellement en conscience.
C'est une dérive, une de plus, ce n'est pas la plus grave.
L’autre élection, c'est l'élection présidentielle dans quasiment un an jour pour jour et on voit bien que les sondages remettent le duel que l'on a connu lors de la précédente élection présidentielle : Marine Le Pen face à Emmanuel Macron, si ce n'est que Marine Le Pen est encore plus haut dans les sondages qu'elle ne l'était lors de la précédente élection présidentielle.
Est-ce que quelque part, c'est tout de même un échec pour Emmanuel Macron ? Il n'a pas réussi à faire reculer le Front National et Marine Le Pen.
Le succès du Président de la République c'est qu'il n’y a personne dans le champ démocratique qui considère qu'il y a meilleur que lui pour la période dans laquelle nous sommes, où les responsabilités sont énormes : personne.
Comme vous le savez, je ne suis pas toujours tendre à l'égard des responsables, car je crois en des choses profondes et quand ils ne sont pas au rendez-vous, je trouve que ce n'est pas à la hauteur.
Lui, il est en pleine conscience, il est respecté de tous les dirigeants du monde, parfois dans des conflits justifiés, par exemple les confrontations qu'il a eues avec Donald Trump ou Vladimir Poutine : ce sont des confrontations justifiées. Sur les questions européennes, il garde le cap. Nous parlions hors antenne avec vous, Hedwige Chevrillon, du nucléaire.
Il a perdu pour l'instant.
Je ne le crois pas, c'est toujours la même chose. Je pense à la question de l'intervention de l'Union Européenne dans l'énergie en France, pour que l’on revienne à des énergies qui font exploser les émissions de gaz à effet de serre, je considère que n'est pas juste.
Vous savez que je me suis exprimé sur ce point dans le cadre du Plan. C’est donc quelqu'un qui a son âge, il est jeune et donc de l'énergie, une puissance de travail que personne ne peut nier et une conscience.
Ce n'est pas la question. Hedwige vous demandait en gros si à travers son action, il n'a pas réussi à faire baisser les intentions de vote pour le Rassemblement National, alors qu’il est très clair pour lui comme pour son Gouvernement que c’était un de ses objectifs.
Est-ce que de ce point de vue-là c'est raté ?
Non ce n'est pas raté pour le Gouvernement ou pas seulement pour le Gouvernement, c'est raté pour toutes les forces que l'on dit républicaines, en tout cas pour tous ceux qui n'appartiennent pas aux extrêmes, car c'est l'ensemble de la vie politique du pays qui précisément devrait faire reculer les tentations extrémistes.
Je sais que vous pensez que dans l'année qui est devant nous, dernière ligne droite de la présidentielle dans une société médiatique, tout peut arriver.
Fermons-nous la porte ce matin entre nous, à l'idée d'une candidature de François Bayrou à la présidentielle de 2022 ?
Je vous voyais venir !
Ce n'est pas ma manière de penser, je n'ai jamais fermé la porte à rien dans ma vie : à rien, j'en ai d’ailleurs fait la preuve, ce n'est pas cela la question.
Nous sommes devant une situation plus grave que notre pays n'en a jamais rencontrée. Pour des raisons planétaires, l'environnement, le virus et pour des raisons nationales, la France est dans une situation où elle a perdu sa capacité ; par exemple notre appareil de production est en crise profonde : industriel, agricole et de service…
C'est l'objet de l'une de vos notes au Haut-Commissariat au Plan.
… sont en crise profonde.
Nous avons reculé, or nous sommes un pays qui est entièrement construit autour du contrat social. C’est le pays le plus généreux en aide sociale de la planète ; ce contrat social est insoutenable si nous ne reconstruisons pas tout cela.
Si j'ai bien suivi, l’heure est tellement grave que vous ne fermez pas la porte ?
Non, l’heure est tellement grave…
Que vous soutenez Emmanuel Macron ?….
… que je suis absolument et indiscutablement en soutien de toute entreprise de reconquête et de reconstruction. C'est évidemment le Président de la République qui est le mieux placé aujourd'hui, pas seulement parce qu’il est en place, mais parce qu'il est ce qu'il est.
Je ne vois absolument personne qui puisse être sérieusement envisagé dans les circonstances où nous sommes et dans l'opposition pour assumer ces fonctions.
Merci François Bayrou.