Laurence Farreng : « Après les élections aux USA, l’impérieux devoir de l’Europe »
Dans une tribune publiée dans La République des Pyrénées, notre eurodéputée Laurence Farreng alerte sur les conséquences en Europe de la victoire de Donald Trump aux États-Unis.
C’est une alerte rouge, qui nous a réveillés ce mercredi 6 novembre, celle de la couleur de la carte des États-Unis acquise à Donald Trump, désormais 47e président des USA. Cette victoire sans appel a une portée particulière pour nous, Européens, et ce sur plusieurs plans.
Notre sécurité d’abord avec une véritable crainte sur le front est de l’Europe. Donald Trump a fait deux promesses pendant sa campagne. La première, « arrêter la guerre en Ukraine en un jour », ce qui, au-delà de la formule, signifie faire allégeance à Vladimir Poutine et désosser une partie de l’Ukraine en concédant la victoire et des territoires à la Russie.
La deuxième, se désengager financièrement de l’OTAN si les États membres ne payaient pas leurs dettes : rappelons-nous du tonitruant « Non, je ne vous protégerais pas. En fait, je les [NDLR: les Russes] encouragerais à vous faire ce qu’ils veulent. » Un coup de tonnerre alors que nous vivons encore et toujours sous parapluie américain faute d’avoir pris notre défense en main.
Notre prospérité ensuite, avec un renforcement du protectionnisme économique déjà mis en œuvre par Joe Biden avec son programme « Inflation Reduction Act » visant à subventionner massivement l’économie américaine. Trump amplifiera le mouvement avec une volonté d’augmenter les droits de douane, mettant à mal nos exportations et donc nos entreprises déjà affaiblies par la concurrence internationale et particulièrement chinoise. Les dramatiques plans sociaux en cours en France en attestent.
On ne soigne pas le mal par le mal. Face à ces enjeux, l’heure n’est pas au repli mais bien à une union des forces européennes pour notre industrie de la défense, pour l’investissement dans l’économie et dans nos compétences. Or depuis les élections européennes de juin dernier, c’est exactement le contraire qui se produit. La montée – réelle – des extrêmes partout en Europe crée un réflexe nationaliste même au sein des gouvernements les plus pro-européens. Citons par exemple la fermeture des frontières en Allemagne ou la tentation de notre Premier ministre, par ailleurs ex-commissaire européen, de s’affranchir de la primauté du droit européen dans le domaine de la migration.
Ce n’est certainement pas à la hauteur des enjeux.
L’enjeu est bien celui de notre reprise en main collective, ensemble, en mettant en avant le poids que représente notre marché de 450 millions d’habitants. Mais la route est longue et la volonté politique devra être implacable.
Les solutions existent et elles sont données dans le rapport sur la compétitivité européenne que Mario Draghi, ex-président du conseil italien et de la Banque centrale européenne, a rendu à la Commission européenne en septembre dernier. Il prône en premier lieu un plan d’investissement massif (de 5% du PIB annuel) qui pourrait être constitué par la mobilisation de l’épargne pour enrayer notre déclin, investir massivement dans les secteurs stratégiques de l’industrie et dans la formation pour reconquérir notre souveraineté et une place de premier plan pour l’Europe au plan économique et géopolitique.
L’élection de Trump met l’Europe au pied du mur. Grandir, se renforcer, se doter d’une gouvernance politique plus ambitieuse ou décliner et mourir.
Ce qui entraînerait à la fois la chute de nos démocraties et de notre modèle social financé par la vitalité de notre économie.
L’heure est grave mais les pro-européens restent majoritaires en Europe, tant dans les gouvernements qu’au Parlement européen.
Nous avons tous maintenant une grande responsabilité, celle de ne pas céder aux sirènes nationalistes des extrêmes et, in fine, au trumpisme.
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