Ce jour-là : Novembre, l'Allemagne et nous
Le 5 novembre, la victoire sans appel de Donald Trump nous oblige, Européens, à nous unir plus étroitement. Face à un président américain protectionniste, élu pour défendre l'intérêt des Américains, sommes-nous prêts à défendre l'intérêt des Européens et à nous rappeler pourquoi nous nous sommes liés par une communauté de destins ?
Le 11 novembre 1918 ouvre une période grosse de tensions
Le mois de novembre nous fait entrer dans l'automne par le souvenir des morts et, le week-end suivant, nous rappelle, par deux fois, notre histoire commune avec l'Allemagne.
Si le 11 novembre, férié, commémore l'armistice de 1918, cette date ouvre une période de questionnements aigus : on le sait, désormais, avec la première guerre mondiale, le visage des guerres change. Le traité de Versailles ne marque pas un point final pour une paix, mais ouvre des plaies qui risquent de se rouvrir tôt ou tard.
À vif, l'Allemagne se trouve humiliée : le pays perd 1/7e de son territoire et 1/10e de sa population. Amputée à l'ouest et au nord, l'Allemagne est également sérieusement touchée par les pertes subies à l'est, d'autant plus qu'elles sont assez mal justifiées par le principe des nationalités et répondent plutôt à des considérations stratégiques et économiques. Les lourdes réparations, la démilitarisation de la rive gauche du Rhin pèsent sur le moral des Allemands. L'échec de la ratification du traité de Versailles aux États-Unis entraîne de graves conséquences.
Notre destin est lié à celui de l'Allemagne
Dans ce contexte, le rapprochement franco-allemand qui se dessine dans les années 1920, avec l'amitié réelle entre les deux ministres des affaires étrangères, Aristide Briand et Gustav Stresemann, constitue le socle essentiel de la future Union européenne.
C'est bien durant cette décennie des années 1920, avec la réintroduction progressive de l'Allemagne dans le concert des nations, que les jalons du fameux tandem franco-allemand sont posés. Le philosophe René Girard, inventeur de la théorie du désir mimétique, a pris dans son ouvrage sur Clausewitz (Achever Clausewitz, 2007) les relations entre la France et l'Allemagne comme exemple emblématique du "duo/duel" : la guerre de 1870, la première guerre mondiale, la deuxième guerre mondiale, autant de moments où la France et l'Allemagne sont apparus comme les deux figures opposées de Janus, en miroir l'une de l'autre.
L'idée même d'Europe vient du nécessaire rapprochement entre la France et l'Allemagne.
Se souvenir, aussi et surtout, du 9 novembre 1989
Commémorer le 11 novembre, l'héroïsme des poilus, importe. Mais comment ne pas penser, aussi et surtout, à la superbe date du 9 novembre ? Pour beaucoup d'entre nous, le jour du 9 novembre 1989 a marqué la joie éclatante de la réunification des deux Allemagnes. Pour beaucoup d'entre nous, la chute du Mur ("le mur de la honte") est directement la source de l'engagement européen, ce moment de liesse où l'Europe a représenté, enfin, un idéal réalisable.