François Bayrou : "Les Français ont imposé le temps d'un gouvernement des uns avec les autres"

François Bayrou, Président du Mouvement Démocrate, était l'invité de la matinale de France Inter ce lundi 8 Juillet à 8h20.

Seul le prononcé fait foi. 

Nicolas Demorand : Avec Yaël Goosz, nous recevons ce matin le président du MoDem, maire de Pau, Haut-commissaire au Plan. Vos questions au 01.45.24.70.00 et sur l'application France Inter. Je les espère nombreuses évidemment. François Bayrou, bonjour. 

François Bayrou : Bonjour

Nicolas Demorand : Et bienvenue sur France Inter. Il y a un mois, le 9 juin à 20h55, le président de la République prenait la décision de dissoudre l'Assemblée nationale à la surprise générale. Il voulait revenir au peuple pour obtenir une clarification du paysage politique français. Au lendemain du second tour des législatives, avec 3 blocs qui dominent désormais le Palais Bourbon, dites-vous ce matin que la France et les Français y voient plus clair, qu'il y a un vainqueur ce matin et qu'il s'appelle la gauche ? 

François Bayrou : Non. D'abord parce qu’on ne connaît même pas les chiffres. Pour l'instant, on distribue des chiffres que les états-majors alimentent sûrement d'une manière ou d'une autre. Mais il y a, disons, 2 des 3 blocs qui sont arrivés devant, c'est-à-dire le nouveau Front de gauche et Ensemble avec quelques sièges d'écart, mais il reste des dizaines de sièges qui, pour l'instant, ne sont pas affectés. 

Yaël Goosz : Vous êtes en train de nous dire que la gauche ce matin, n'est pas forcément en tête ?

François Bayrou : Je suis en train de dire que cette élection n'a pas livré numériquement son verdict. Elle a livré son verdict sur une question essentielle qui était la question posée dimanche soir du premier tour, c'est « Est-ce que les Français voulaient que le Rassemblement national ait la majorité absolue ? ». Et c'était d'ailleurs ce que les dirigeants du Rassemblement national demandaient. Ils disaient, « Pour gouverner, il nous faut la majorité absolue ». Or, bien loin d'avoir la majorité absolue, en réalité, c'est un écroulement auquel on a assisté entre les 2 tours. Parce que les Français ont répondu simplement, « Non, nous ne voulons pas que vous ayez la majorité absolue ». Ça ne veut pas dire d'ailleurs qu'il faudra oublier ce que ces électeurs ont dit au premier tour en particulier. 

Et qu'il y a des possibilités d'entendre et de trouver des chemins nouveaux pour qu'ils soient certains que, comme citoyens français, on les entend ou que l'on a entendu leurs difficultés et leurs angoisses. 

Mais le scrutin n'a pas rendu son verdict pour la répartition des forces. Qu'est-ce qui peut donc…

Nicolas Demorand : Donc le paysage n’est pas encore clarifié ce matin ? 

François Bayrou : Le paysage n'est pas encore clarifié, on espère qu'on va faire des pas. Mais ajoutons une chose même. Si ses responsables ne le disent pas, le Front Populaire, le Nouveau Front Populaire, l'Union de la gauche a des attitudes et des choix politiques qui sont incompatibles entre eux. Quand Monsieur Glucksmann hier soir, on était sur le même plateau, s'exprime, il dit à peu près le contraire de ce que Jean-Luc Mélenchon dit. Et les répartitions des forces entre eux... Ils ont signé un programme, mais ce programme est incompatible avec ce qu’un très grand nombre de Français pensent de l'avenir de la France. Ce programme est incompatible avec l'Union européenne. On vient d'entendre à l'instant que c'est une dimension de notre avenir. 

Nicolas Demorand : Vous esquissez le paysage d'une France ingouvernable ?

François Bayrou : Je ne crois pas qu'elle soit ingouvernable. Je pense que des chemins existent. 

Nicolas Demorand : Aucun des tiers n'est capable ? Si aucun des tiers de la tripartition n’est capable de parler ou de faire un mouvement, il est où le chemin ?  

François Bayrou : Je pense que les chemins existent. Le chemin, je le crois peut se trouver. Je n’ai pas dit qu'il était certain de se trouver. Je pense que c'est extrêmement difficile. Mais je sais avec certitude que ces blocages-là devront être levés parce qu'il y a une disposition constitutionnelle, c'est qu'on ne peut pas dissoudre l'Assemblée nationale avant le 8 juillet 2025. Ce qui veut dire que, ou bien, on est irresponsable et à ce moment-là, chacun dit « C’est mon programme qui va s'imposer, c'est nous qui avons gagné, avec des batailles de chiffres », ou bien, on dit, « Il va falloir qu'on réfléchisse et qu'on fasse des pas les uns vers les autres ».

Yaël Goosz : François Bayrou, on a quand même un petit problème ce matin au réveil, c'est qu’on ne sait pas qui est premier ou 2e selon vous ? Or, quand on prend les chiffres de 2022, votre camp perd 94 députés, la gauche en gagne 28, le RN en gagne 55. Ce n’est pas votre défaite ? Moins 94… 

François Bayrou : Si vous voulez qu’on se jette des chiffres à la figure…

Yaël Goosz : Mais il faut au moins savoir qui est devant et qui est derrière ce matin...

François Bayrou : Nous verrons. Donnons-nous 3 jours pour savoir qui, en effet, rassemble le plus de sièges de parlementaires. On verra. Mais si le Rassemblement national était arrivé en tête avec 15 sièges d'avance, le président de la République, naturellement, aurait réfléchi à la proposition qu'il fait. Mais aucun d'entre nous n'aurait songé à gouverner avec lui parce que son programme, sa manière de voir les choses, ses idées, sont incompatibles avec le réel, avec la vie telle que nous la voulons. 

Et donc, je ne sais pas moi, avec la levée de toutes les décisions qui ont été prises pour aller à l'encontre de la délinquance, la levée de toutes les précautions qui ont été prises pour que l'immigration soit régulée…

Nicolas Demorand : Il n’y a rien dans le programme du Nouveau Front Populaire qui pourrait vous séduire.

François Bayrou : Je n'aime pas avoir des propos définitifs comme ça. Les riens et les tous ne ressemblent pas à ce que je veux. 

Nicolas Demorand : On entend des lignes rouges. Mais est-ce qu'il y a des espaces de rencontre ? Si oui, sur quels sujets ?

François Bayrou : Sûrement. Pour l'instant, ces signes de rencontre n'ont pas été avancés. Ça va venir. Moi, je crois que personne ne va en rester là ou ne va accepter de rester dans ce blocage qui, pour l'instant, est en effet décidé par la répartition en 3. Permettez-moi de dire au passage que si j'avais réussi à persuader autour de l'idée d’une loi électorale proportionnelle...

Yaël Goosz : Qu'est-ce que ça aurait changé ? Ça fait des années, ça fait combien, 20 ans, 30 ans que vous la réclamez la proportionnelle intégrale ? 

François Bayrou : Et vous verrez dans les faits que, probablement, c'est ce que nous proposions qui était le bon chemin. 

Yaël Goosz : Qu'est-ce que ça aurait changé ?

François Bayrou : Ça aurait changé qu'on n’aurait pas eu des alliances de la carpe et du lapin. Se mettent ensemble, à cause du scrutin majoritaire, des forces politiques et des gens qui n'ont rien en commun. Je citais Monsieur Glucksmann. Il a fait toute la campagne des Européennes en disant « Avec moi, Mélenchon, jamais !», et puis vous voyez la situation aujourd'hui. Et réciproquement. Dans un scrutin proportionnel ou avec une loi électorale proportionnelle, chacun se présente sous ses propres couleurs et il n'y a pas d'alliance contre-nature. 

Nicolas Demorand : Mais c'est une alliance contre-nature, le Front républicain ? 

François Bayrou : Oui, je pense que LFI est sur des positions radicalement différentes de ses…

Yaël Goosz : Le Front Populaire ou front républicain ? On parle du Front Populaire, là ?

François Bayrou : Oui, Front Populaire. 

Yaël Goosz : C'est une alliance contre nature ?

François Bayrou : Oui. Je pense que les prises de position qui sont celles de LFI, on a encore vu Jean-Luc Mélenchon hier soir, sont et tout le monde le sait, alors on fait semblant de ne pas le savoir, ceux qui sont autour de la table et qui ont signé ces accords font semblant de ne pas le savoir, mais tout le monde sait parmi eux aussi, qu’il y a de l'incompatible entre les prises des positions des 2. Que les positions des uns conduisent inéluctablement à une crise européenne et que les autres voudraient au contraire un chemin de construction européenne. 

Nicolas Demorand : Bon, alors, il faut faire quoi dans les jours qui viennent, François Bayrou, se mettre autour d'une table ? Quand ? 

François Bayrou : D'abord, il faut vérifier les chiffres. C'est-à-dire, qui est capable de constituer un ensemble ? Je rappelle que, au premier tour, nous avions décidé de ne pas présenter de candidats contre 60, 75 peut-être, candidats de forces politiques compatibles avec ce que nous étions ou que nous estimions compatibles et que nous pensions nécessaire de protéger. On n'a pas encore parlé avec ceux-là. Je prends un exemple, ce que le ministère de l'Intérieur appelle « divers centres », c'est évidemment plus près de nous que de qui que ce soit d'autre. Et ils sont nombreux. 

Yaël Goosz : Quand vous additionnez toutes ces forces-là, vous arrivez à un total supérieur à la gauche ? C’est ce que vous voulez dire ?

François Bayrou : Je pense que c'est possible, mais je n'en fais pas « Cocorico ». Je pense qu’on verra dans les jours qui viennent quel est le rapport des forces en sièges parlementaires, des gens qui acceptent de se rapprocher pour constituer le socle de ce que pourraient être les années…

Yaël Goosz : Il faudra attendre le 18 juillet que l'Assemblée se réunisse pour la première fois ? On ne sera pas fixé avant le 18 juillet selon vous ?

François Bayrou : J'espère qu'on aura progressé d'ici cette date. Pour moi, ça ne s'arrête pas là. Il ne s’agit pas, il ne s'agit plus, d'imposer la vision d'un bloc aux autres blocs. On raisonne encore comme si on était dans la période antérieure où vous avez des vainqueurs qui disent, « Nous, on a gagné et donc les autres doivent…». Or, ce n'est plus comme ça que ça se passe. On est entré dans un temps de pluralisme dans lequel les Français ont imposé, contre leurs dirigeants très souvent, qu’on sorte du gouvernement des uns contre les autres pour entrer dans le gouvernement des uns avec les autres autant que possible. 

Nicolas Demorand : Avec qui autour de la table ? Une fois que tout le monde se sera compté, vous pouvez imaginer qui autour de la table, François Bayrou ? Qu'on puisse se faire une image. 

François Bayrou : C'est très simple. Vous excluez les extrêmes à l'extrême gauche et à l'extrême droite. Et vous avez là un ensemble démocrate et républicain qui, selon moi, devrait se parler, se reconnaître, s'accepter et un jour prochain gouverner ensemble. 

Yaël Goosz : De Marine Tondelier à Laurent Wauquiez, si on vous suit ?

François Bayrou : Oui. 

Yaël Goosz : Mais ces 2 personnalités-là, ils ne partagent rien sur l'écologie, par exemple ?

François Bayrou : Oui, mais on voit après s'il est possible de rapprocher les points de vue. S'il y a de l'impossible, on aura ce qui est détestable, un gouvernement minoritaire. Mais un gouvernement minoritaire avec les armes institutionnelles limitées par le fait qu'on ne peut pas dissoudre l'Assemblée nationale. 

Nicolas Demorand : Revenir sur la réforme des retraites, c'est une ligne rouge selon vous ? 

François Bayrou : La réforme des retraites est indispensable et, probablement, devra être, un jour, remise sur la table. L'idée qu'on puisse rayer la réforme des retraites pour revenir au statu quo ante, à ce que c’était avant, ça je crois que c’est impossible pour qui que ce soit. 

Yaël Goosz : L'amender, c'est possible ?

François Bayrou : Mais tout est envisageable à condition qu'on se reconnaisse entre partenaires d'un futur rassemblement pour gouverner. 

Yaël Goosz : Donc ça, c'est ouvert ?

François Bayrou : Excusez-moi, ça ne vous aura pas échappé, je ne suis pas président de la République. J'aurais pu. Mais bon, je ne suis pas président de la République, je ne suis pas Premier ministre, donc je ne suis pas en train de vous donner un programme. Je vous dis que, pour moi, vous savez bien l'insatisfaction que j'ai manifestée sur la réforme des retraites. J'ai pensé qu'on aurait pu faire autrement et différemment. Donc si vous me demandez à moi, « Est-ce qu'il y a une réflexion possible ? », à moi en tant que responsable politique et m'exprimant à titre personnel, oui, je pense qu'on peut réfléchir à ça. 

Yaël Goosz : Et sur le SMIC 1600€ nets, c'est possible ? Non ?

François Bayrou : Non. Les entreprises sont en situation d'inquiétude parce qu’un grand nombre d'entre elles dit, un boulanger avec qui je parlais, un maçon, ils disent, « Mais comment on peut supporter toutes ces charges supplémentaires ? On a déjà du mal à gagner notre vie dans cet ensemble ».

Nicolas Demorand : Mais du coup, il y a quoi à négocier ? Parce qu’on fait la liste des choses une à une…

François Bayrou : Vous vous trompez parce que vous pensez qu'on est en situation de négociation. Aujourd'hui, on n'y est pas. 

Yaël Goosz : Vous allez l'être prochainement une fois que vous vous serez comptés.

François Bayrou : Une fois qu'on aura le décompte réel et les rapports de force à l'intérieur de chaque camp, ce qui est évidemment très important, ce jour-là, la première étape, c'est accepter l'idée qu'on puisse être partenaires, qu’au-delà de ses camps, de ses agacements ou de ses obsessions, ou de ses idées qu'on croit différentes, au-delà de cela, il y a l'idée qu'on devrait faire des choses ensemble. Si des responsables politiques, et il y en a beaucoup et quand je dis qu'il y en a beaucoup, j'affirme, j'atteste, qu'un grand nombre d'entre eux disent, « Il faudra bien qu'on fasse quelque chose ensemble ». Et donc ce jour-là, on commencera à dire aux Français, « Peut-être qu’on peut s'engager dans un chemin qui ne sera pas le chemin de l'affrontement et du désordre ». 

Nicolas Demorand : On passe au standard d'Inter. Bonjour Bastien. 

Auditeur : Bonjour, merci de prendre mon appel.

Nicolas Demorand : Je vous en prie, soyez le bienvenu. 

Auditeur : Bonjour Monsieur Bayrou, il me semble que ma question s'inscrit en écho au début de votre analyse. Je crois que, depuis au moins 20 ans, un des facteurs de réussite du RN, c'est d'avoir réussi à convaincre son électorat d'être le seul à le comprendre et à l'entendre, et qu’ils sont oubliés par l'ensemble des gouvernements successifs. Ma question est assez simple, comment, par quelle mesure, par quelle posture peut-être aussi, montrer, à l'issue de ces 2 tours électoraux, à cet électorat, qu'il a été entendu et que le RN n'est plus le seul parti à l'entendre et à le prendre en considération ? Merci. 

Nicolas Demorand : Merci à vous Bastien pour cette question. François Bayrou vous répond. 

François Bayrou : Je crois que la réponse est dans la question que vous avez posée. Vous avez dit quelque chose de très important et que je crois très vrai. La réponse n'est pas tant dans des mesures, que dans une posture différente. Il n’y a pas très longtemps, vous le savez, j'ai refusé d'entrer au gouvernement, au début de l'année, précisément en m'appuyant sur ce constat. Ce qui me désespère depuis des années, c'est qu'il y a une rupture qui s'est révélée de plus en plus profonde, entre la base de la société, ceux qui travaillent, ceux qui cherchent du travail, ceux qui sont à la retraite ou voudraient y être, et puis ceux qui sont présentés comme étant le sommet. Je ne suis d'ailleurs pas sûr que le sommet soit très haut. Mais cette absence de compréhension, de langues différentes… Quand le sommet s'exprime, il arrive très souvent que la base devant son écran ou devant son ordinateur ne comprenne pas ce qu’il dit. Le sommet vit dans un univers de chiffres et de concepts qui me paraît très éloigné de ce que vivent les gens dans les familles ou dans la recherche ou dans l'expérience de solitude qui est la leur. 

Nicolas Demorand : Autre question sur l'application d'un internaute, Marion, « Je suis effaré, Monsieur Bayrou. Pas un mot pour les électeurs de gauche qui ont voté pour votre parti. Vous êtes déconnecté ? ». Quelle réponse faites-vous à Marion ? 

François Bayrou : Et réciproquement, les électeurs de notre courant politique qui ont voté pour la gauche et parfois en étant franchement en désaccord avec. La question posée dans ce premier tour c'était, « Est-ce que vous voulez que le Rassemblement national ait la majorité absolue ? », puisque c'était ainsi que les leaders de ce mouvement…Et les Français dans un vaste mouvement et avec des efforts, les gens de gauche…

Nicolas Demorand : Vous dites merci à cette gauche ? 

François Bayrou : Mais bien sûr. Je dis merci à tous les électeurs. 

Nicolas Demorand : Ça vous oblige mutuellement pour la suite ?

François Bayrou : Ça devrait nous obliger mutuellement à comprendre que ceux qui ne sont pas de votre bloc ont été cependant solidaires dans le refus de ce qu'ils estimaient être le pire. Vous croyez que si ce vote avait été conditionné par le fait d'accepter le programme des autres, le résultat serait là ? Jamais. Au contraire. C’est parce qu’on a dit « Nous faisons un appel pour que tous ensemble, nous évitions le pire », c'est pour ça que les électeurs sont allés voter. Et avec des efforts. Et ils l'ont dit très souvent, « On est de gauche et on va voter pour vos candidats » ou réciproquement. « Vous nous faites voter pour LFI », ce qui était un effort, pas seulement un effort, un mouvement de rejet profond pour un certain nombre. Mais on avait déjà vécu ça dans l'histoire, on avait vécu ça en 2002, on avait vécu ça à chaque échéance. Et donc cet effort réciproque exige une attitude, pas seulement de respect, mais de compréhension mutuelle pour qu’on puisse construire quelque chose qui sera viable pour l'avenir. Parce qu'autrement, on va se trouver dans une impasse qui va durer pendant des mois et ce n'est pas ce que je souhaite. 

Nicolas Demorand : François Bayrou, Marine Tondelier, la Secrétaire nationale des Écologistes, vient d'entrer dans ce studio. Bonjour et bienvenue. 

Marine Tondelier : Bonjour et bienvenue à toutes vos auditrices, à tous vos auditeurs qui se réveillent avec nous ce matin. 

Nicolas Demorand : François Bayrou, est-ce que vous avez quelque chose à dire à Marine Tondelier ? 

François Bayrou : Si j'avais des choses à lui dire et si elle avait des choses à me dire, probablement, on se les dirait hors micro. 

Yaël Goosz : Est-ce que ce front républicain vous oblige mutuellement à jeter des ponts les uns vers les autres ? 

François Bayrou : Selon moi, oui. J'ai dit, « Reconnaissance, respect et compréhension mutuelle ». Votre auditrice avait raison, ça a été pour des millions d'électeurs, un effort qu'ils n'auraient jamais imaginé consentir. L'idée qu’on va voter pour des gens dont le programme vous rebute…

Marine Tondelier : Et vice-versa Monsieur Bayrou, et pas pour la première fois. 

François Bayrou : Mais je l'ai dit, il y a eu d'autres occasions et c'est très important qu'on y pense. Ce qui devrait nous obliger à sortir du monde clos, du mur dans lequel nous vivons. 

Nicolas Demorand : Marine Tondelier, vous êtes…

Marine Tondelier : Pour cela, il faut commencer par reconnaître les résultats et ce n'est pas ce que j'ai entendu pendant 20 minutes. Donc je pense que le Nouveau Front Populaire doit faire preuve de beaucoup de modestie parce que nous savons grâce à qui nous devons cette courte avance. Nous savons que tout le monde a été au rendez-vous du front républicain, mais nous savons aussi que ça n'a pas été instinctif et automatique chez tout le monde, que ça a pris du temps, et moi je respecte ça. Mais si nous devons faire preuve de modestie, vous ne pouvez pas non plus faire preuve de déni sur les résultats finaux d’hier soir. 

Je vous ai observé pendant 20 minutes en train d'essayer de compter et de recompter des voix. Je pense qu'il faut quand même accepter le résultat d'hier. 

Nicolas Demorand : François Bayrou…

Marine Tondelier : Je ne savais pas que c'était un débat ce matin. 

François Bayrou : Voulez-vous que nous prenions rendez-vous ? 

Marine Tondelier : Je vous avais écrit un courrier la semaine dernière, vous répondez quand vous voulez et je serai là. 

François Bayrou : Oui on va prendre rendez-vous quand nous aurons tous la photographie réelle de ce que l’Assemblée nationale sera. 

Marine Tondelier : On va recompter tant qu’il le faudra. 

François Bayrou : Ce n’est pas recompter. C'est voir qui peut se rassembler, qui peut se rapprocher de qui. 

Marine Tondelier : Pas de souci.

François Bayrou : Et ça, ça nous permettra d'avoir une vision plus claire de la situation dans laquelle chaque bloc, même celui qui sera arrivé en tête et je ne sais pas encore lequel sera minoritaire. 

Marine Tondelier : Nous, on sait quand même. 

François Bayrou : Non vous, vous vous pensez savoir. 

Nicolas Demorand : Bon, allez, on ne va pas le refaire justement, on ne va pas le refaire. Merci François Bayrou. En-tout-cas, l'invitation est lancée.

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