La confiance dans les élus locaux
Cette semaine avait lieu le salon des maires, lieu de rencontres précieux. Chaque année, le laboratoire du Cevipof publie un baromètre de la confiance, où sont notamment distinguées la confiance envers les institutions – qu’il convient, pour certains, de réformer – et la confiance dans les hommes et les femmes politiques. Régulièrement, c'est la figure du maire, plus proche des citoyens, à portée d'engueulade, qui inspire le plus confiance.
La démocratie représentative connaît une crise de confiance. L’analyse de la confiance est au centre de beaucoup de disciplines : économie, sociologie, philosophie morale, philosophie politique, histoire, science politique, psychologie. C’est une évidence : la confiance est une variable clé du bon fonctionnement des sociétés. Comment construire une société de confiance ? La confiance est toujours plus difficile à créer et, en même temps, toujours plus nécessaire.
Historiquement, chez les Démocrates, trois grandes attitudes se sont dessinées, tout au long du XIXe siècle : la question de la morale, celle du bon gouvernement, l’interrogation sur la force et les faiblesses de la démocratie moderne. Refonder la confiance importe particulièrement dans les moments où l’on instaure un régime. Et la confiance passe aussi par la production de lois constitutionnelles.
La question de l’exemplarité politique, de la méthode se fait jour. Avec Louis Barthou, notamment, on arrive à un centrisme d’enseignement civique et moral. La volonté de moraliser la vie politique se manifeste clairement au fil du temps. Le centriste Jacques Barrot - élu local, ministre à plusieurs reprises, député européen - détaille ainsi les règles d'or que doit respecter un élu sur le plan éthique : avoir une bonne connaissance de la société et du monde, résister à l’exhibition médiatique, rester modeste et honnête intellectuellement.
Le rôle des collectivités territoriales est essentiel, comme le prend bien en compte la loi 3D (Décentralisation, Déconcentration, Différenciation). Un reproche que l'on peut légitimement faire à nos institutions, c'est leur manque de représentativité. Cette lacune entretient le sentiment de défiance de nos concitoyens. Il n'est de fait pas étonnant qu'ils soient moins enclins à faire confiance à des institutions dont ils estiment qu'elles ne les représentent pas... Ce phénomène est sans doute dû au choix de la Vème République de décider les élections législatives au scrutin majoritaire. Le résultat en est connu : le système écarte les partis minoritaires pour faire émerger une majorité toute-puissante, quand cela est le cas.
La formation de la confiance est parfois paradoxale : elle tient à la fois de la décision (trust) et de l’intuition (confidence) et de la représentation politique, nécessairement ambivalente, avec une part d’incarnation. Alexis de Tocqueville redoutait déjà, en 1835, que les citoyens des siècles démocratiques soient fascinés par le pouvoir mais aient tendance à haïr ceux qui l’incarnent. Par envie, sans doute, ou par un sentiment de décalage entre eux et une sphère qui leur paraît coupée des réalités. Comment le politique peut-il retisser de la confiance ? En rapprochant les représentants des représentés, en associant les citoyens à la prise de décision, en les prenant en considération. Mais la tâche est délicate, la confiance tenant de la fides romaine : il y entre une part de croyance, de foi, qui échappe aux intentions.
Pour susciter de la confiance, une femme ou un homme politique doit s’exprimer en termes simples et clairs, rester accessible et, surtout, travaillé par un doute méthodologique, constructif. Ne jamais être satisfait et tenter, constamment, de s’imprégner de la société.