Marc Fesneau : "Des gens se sont saisis du CETA pour se refaire la "couenne" sur le dos des Canadiens"
Le ministre de l'Agriculture et de la souveraineté Alimentaire, Marc Fesneau, a exposé sa vision à propos d'une agriculture française résiliente face aux défis climatiques, compétitive et intégrée à l'occasion de son entretien dans l'émission "Bonjour chez vous !" de Public Sénat le jeudi 4 avril 2024.
Projet de loi d'orientation agricole : "Il faut qu'on se retrouve dans le coeur du texte"
Alors que la France navigue à travers les incertitudes du dérèglement climatique et les débats commerciaux internationaux, le ministre a mis l'accent sur l'adaptation et la simplification des processus pour les acteurs du secteur agricole.
Face aux défis climatiques, Marc Fesneau a insisté sur l'importance d'évaluer la viabilité à long terme des installations agricoles en défendant "l’idée de faire qu’à l’installation il y ait un « stress test climatique », c’est à dire qu’à chaque fois qu’un jeune s’installe, est-ce que le système, dans lequel il est, est capable de faire face au dérèglement climatique ?" Cette approche proactive vise à garantir que les exploitations agricoles soient armées pour faire face aux bouleversements environnementaux.
Le ministre a également abordé la durée trop longue pour construire des bâtiments d'élevage, ce qui semble contrevenir aux objectifs de souveraineté alimentaire selon lui. Il explique :
Je suis assez régulièrement en Bretagne pour vous dire qu’il y a des départements où on ne peut plus sortir des bâtiments d’élevage. Alors les mêmes qui nous expliquent qu’il faut de la souveraineté, qu’il ne faut pas de volailles du Brésil ou d’ailleurs, ils empêchent les bâtiments d’élevage !
Quant au projet de loi d'orientation agricole, le premier vice-président du MoDem a valorisé les modifications procédurales, pour les contentieux liés à des projets d'exploitation, proposées face aux critiques. Il invite à "regarder le texte car on ne raccourcit pas les délais ! Personne ne peut jouer avec la procédure. […] Les contentieux ne peuvent pas durer des mois pour ne pas dire des années pour planter des projets." Il a souligné que la compétitivité agricole dépend de la capacité d'adaptation et de simplification, évoquant des mesures comme "le TODE qui vient renforcer le travail saisonnier" et des avantages fiscaux pour le service de remplacement.
Concernant les produits phytosanitaires, le ministre a rappelé l'importance d'une politique publique européenne cohérente en détaillant : "sur la question des produits phytosanitaires, c’est une politique publique européenne donc on a besoin d’avoir un cadre européen. On peut pas avoir un pays qui fait sa propre politique écosanitaire quand on est dans un marché commun."
En outre, le ministre a mis en avant le rôle majeur que doit jouer la restauration collective (État et collectivités) dans la transition agricole :
La restauration hors domicile c’est 4 milliards de repas par an. Qu’on se dise que là aussi, on a un acte majeur à poser à propos de la transition et de la stabilisation d’un certain nombre de filières. Si nous respections EGalim aujourd'hui en France, notamment dans la restauration publique, c’est 1,2 milliards de plus injectés dans les filières agricoles.
International : "D’un point de vue général et agricole, le CETA est un bon accord"
Quant à la Politique Agricole Commune (PAC), Marc Fesneau a fait écho aux préoccupations des différents États européens, affirmant que « tout le monde dit la même chose : la PAC est trop compliquée, elle est incompréhensible, elle ne tient pas compte des réalités de terrain, donc il faut que vous la simplifiez [la Commission européenne]. »
Sur les droits de douane avec l'Ukraine, le ministre a défendu une approche équilibrée, cherchant à protéger les intérêts des producteurs français tout en maintenant des relations commerciales internationales de soutien au pays attaqué :
On avait un problème de démarrage : l’année de référence était 2023, c’est-à-dire l’année où on a le plus d’importations, ce qui voulait dire qu’on actait quelque chose qui était de l’ordre d’une déstabilisation du marché. On a d’abord réintroduit l’année 2022 et dans la proposition sur la table dans le cadre du trilogue, on a réintroduit une partie de l’année 2021.
Par ailleurs, pour l'accord économique et commercial global (CETA) avec le Canada, Marc Fesneau a suggéré que les critiques ne reflétaient pas la réalité du partenariat.
Il y a un certain nombre de gens qui se sont saisis de la question pour se refaire la "couenne" sur le dos des Canadiens et de l’accord.
Il a caractérisé le CETA comme bénéfique pour le secteur agricole français en indiquant que "d’un point de vue général et agricole, le CETA est un bon accord." Il poursuit en mettant les oppositions à cet accord devant leur incohérence et démagogie :
Si on ne sait pas avoir un accord avec les Canadiens qui sont ressemblants d’un point de vue social, ressemblants d’un point de vue économique, alors il faut dire tout de suite, et que tout le monde assume, qu’on ne veut pas d’accords de libre échange et qu’on veut une agriculture autarcique et vivrière. Je ne crois pas que ce soit l’intérêt des céréaliers, je ne crois pas que ce soit l’intérêt laitiers, je ne crois pas que ce soit l’intérêt de la filière vins et spiritueux.