Marina Ferrari : "Les Jeux de 2030 peuvent profiter à tous les massifs"
Marina Ferrari, ministre déléguée chargée de l'Économie du tourisme, a accordé au quotidien Le Dauphiné Libéré son premier entretien depuis sa nomination.
Comment se porte le tourisme français en 2024 ?
2023 avait été une année exceptionnelle. 2024 est en léger retrait, avec des résultats contrastés en fonction du territoire avec un peu moins de nuitées sur le littoral. Le décalage des réservations avant les Jeux olympiques ou une météo maussade peuvent expliquer le démarrage tardif de la saison estivale.
Mais les retombées touristiques olympiques ont lieu sur le long terme et mon objectif est qu’elles soient durables et irriguent tous nos territoires.
Quelle est votre feuille de route ?
Porter l’ambition que la France reste la première destination mondiale.
On va frôler les 100 millions de voyageurs, mais on voit que cela inclut des visiteurs de transit. Les recettes des clientèles étrangères n’augmentent pas dans les mêmes proportions. À nous de requalifier notre offre pour faire rester davantage les gens en France dans un univers extrêmement concurrentiel.
Quelle place pour la montagne ?
La France est la deuxième destination montagne, c’est un moteur de notre attractivité avec des enjeux majeurs. D’abord de conversion et de pérennisation du modèle. Ces territoires sont les plus impactés par le réchauffement climatique, donc il faut que la réflexion déjà engagée dans les territoires s’accélère, à basse et moyenne altitude où ils doivent se repositionner plus rapidement encore.
Et la haute montagne doit commencer à regarder ce qui se passe en dessous. On ne peut pas être dans l’attentisme et dire qu’on a de la neige pendant 50 ans. Sur certains territoires toute une économie dépend de la station qui maintient des commerces, des services publics.
Il faut arriver rapidement à une diversification sur un tourisme 2 ou 4 saisons. L’État a pris sa part dans cette réflexion avec le plan Avenir montagnes, sur lequel on va tirer les premiers bilans.
Comme le dit le maire de Valloire, la montagne est malade, soignons-la. Il faut inscrire cette diversification dans un schéma temporel. On ne peut pas arrêter d’un coup les activités.
(...)
Que pouvez-vous faire pour la station iséroise de l’Alpe du Grand Serre qui n’ouvrira pas cet hiver ?
Personne ne peut douter du soutien de l’État à l’économie de la montagne.
Nous l’avons montré, par le passé, avec une réponse puissante face à la crise sanitaire puis des investissements pour œuvrer à la transition du modèle touristique.
Dans le cas de l’Alpe du Grand Serre, l’État s’était mobilisé pour accompagner cette évolution, avec un appui en matière d’ingénierie et une volonté de pérenniser les activités du domaine. Pour autant, le rôle de l’État n’est pas d’aller contre les décisions des élus et leur volonté locale.
Je suis à leur disposition pour les accompagner et évaluer quelles options sont sur la table pour assurer un avenir durable à ce territoire.
À Reims, lors du congrès des domaines skiables vous vous êtes élevée contre le ski bashing…
Je suis savoyarde. J’ai du mal avec cette idée. On nous présente souvent comme des resorts pour gens aisés, alors qu’on sait que ce sont des villages qui vivent, et on dit que le ski pollue… Or, les stations sont en train de faire leur mue.
La montagne est vivante, le ski n’est pas sale, les acteurs sont conscients des efforts à faire, ils les ont amorcés. J’en ai plus qu’assez de ce ski bashing.
J’ai trop vu l’activité caricaturée à l’Assemblée par certains groupes politiques en méconnaissance totale de nos territoires. On nous dit de protéger le pastoralisme mais quand nos doubles actifs sont impactés ça va être compliqué. Quand on pense par le prisme “canons à neige, retenue collinaire”, on peut hurler. Mais il y a tout le reste autour. Ce n’est pas en tapant sur les gens qu’on les fait évoluer.
(...)
Quel héritage pour les Jeux de Paris et quelles retombées touristiques ?
En matière d’attractivité c’est une base de travail fantastique.
Il faut capitaliser à partir de la destination Paris sur le tourisme sportif et que les retombées irriguent tout le territoire.
Ceux d’hiver dans les Alpes se profilent, que peut-on en attendre ?
On commence à tirer les enseignements de Paris 2024 pour préparer Alpes 2030. On voit qu’il y a des enjeux d’aménagement différents dans les Alpes du sud, sur le désenclavement et la mobilité.
Ces jeux peuvent être exemplaires et profiter à tous les massifs français. Alors qu’aujourd’hui l’Autriche et les États-Unis nous concurrencent, ce coup de projecteur doit nous permettre de reconquérir des parts de marché.
Lire l'article complet dans Le Dauphiné Libéré