Protéger la Guadeloupe
Justine Benin, députée de la Guadeloupe témoigne de la situatiton santaire dramatique dans le département. Une solution : vaccination et la solidarité entre tous
Rentrée scolaire décalée, tourisme impacté, confinement en vigueur, quelles sont les conséquences concrètes de cette 4ème vague en Guadeloupe ?
Nous vivons aujourd’hui en Guadeloupe une très forte reprise épidémique, sans précédent par rapport à ce que nous avons connu depuis le début de la pandémie. Nous vivons actuellement une véritable catastrophe sanitaire. Les taux d’incidence au sein de notre population n’avaient jamais été atteints en France jusqu’à présent ; jusqu’à 2000 personnes contaminées sur 100 000 ; un grand nombre d’hospitalisations qui pèse sur l’ensemble du système de santé, une dizaine de décès chaque jour ; et des cas graves qui touchent également les plus jeunes…
La première des conséquences de cette reprise épidémique, c’est la saturation de notre système de santé. Notre hôpital fait face, depuis plusieurs semaines, à un afflux massif de malades du Covid-19, qui a poussé tous les professionnels de santé à se mettre en ordre de bataille pour gérer jour et nuit cette crise. L’ensemble des établissements hospitaliers de Guadeloupe ont dû se réorganiser et se coordonner pour doubler le nombre de lits, que ce soit en médecine ou en réanimation. Et plusieurs centaine de professionnels de la réserve sanitaire sont venus en renfort de l’Hexagone pour prêter main forte aux soignants guadeloupéens. Je veux saluer ici l’engagement quotidien et sans faille de nos médecins, de nos infirmiers, de nos aides-soignants, qui se battent aujourd’hui pour prendre en charge et sauver un maximum de malades. Ils vivent une véritable épreuve, douloureuse, épuisante, qui ne leur laisse aucun répit. Nous leur devons beaucoup.
Bien sûr, cette crise sanitaire, violente, durable, a de nombreux impacts sur la vie quotidienne de notre population. D’importantes mesures de freinage ont dû être prises pour limiter la circulation du virus : un confinement a été instauré, avec les fermetures des lieux publics, tels que les restaurants, les bars, les cinémas… C’est une nouvelle épreuve pour tous les acteurs économiques du territoire : ils ne peuvent plus vivre de leur travail, et ils doivent compter sur le soutien de l’État et des collectivités pour assurer leur survie. Et le tourisme, secteur essentiel pour notre archipel, se retrouve une fois de plus à l’arrêt.
La rentrée scolaire, qui devait se tenir la semaine prochaine, a dû être décalée pour garantir la protection de notre jeunesse et de l’ensemble des populations. Une décision prise en responsabilité, que j’ai soutenu, avec les élus des collectivités, auprès du Gouvernement.
Alors oui, nous vivons aujourd’hui des jours sombres, une crise qui impacte notre population dans son ensemble, et qui touche nos vies toutes entières. Y compris dans les moments de deuil, puisque même nos traditions et nos rites funéraires, si particuliers et si caractéristiques de nos cultures créoles, sont bouleversés par les effets de la pandémie.
Que dire aux gens afin de les convaincre de se faire vacciner ?
Les faibles taux de vaccination en Guadeloupe, en Martinique comme ailleurs dans les Outre-mer s’expliquent par une multitude de raisons et de facteurs. Beaucoup ont préféré attendre, on a pu penser que nos territoires étaient moins touchés par le virus, que nous étions plus protégés du fait de notre insularité, de notre éloignement, de notre climat… Je pense qu’aujourd’hui, face à la catastrophe que nous vivons aujourd’hui, les témoignages des soignants ou des malades sont la meilleure arme pour convaincre ceux qui ne le sont pas encore de se faire vacciner.
Je comprends les peurs, les doutes et les craintes : tant de désinformation, tant de fakes news ... J'encourage l'ensemble de la population à aller à la rencontre de leur médecin traitant. Il faut laisser la parole médicale aux experts. Chacun a la liberté ou non de se faire vacciner. Cependant, il faut garder à l’esprit que, tant que nous n’aurons pas de traitement efficace pour lutter contre les formes graves de Covid-19, le vaccin reste le seul moyen de lutter contre la pandémie et de sauver des vies.
Comment lutter contre la désinformation ambiante autour du vaccin ?
Nous vivons des heures difficiles. Et comme souvent dans ces situations de gravité, nous faisons face à des inquiétudes, à de la colère, à des incompréhensions, qui sont légitimes. Mais face aux divisions et aux polémiques, je veux répondre par l’unité des Guadeloupéennes et des Guadeloupéens, par notre esprit de responsabilité et de résilience face à une crise sanitaire sans précédent. Il nous faut remettre au cœur de l’espace public la parole des experts scientifiques : les médecins, les épidémiologistes, les infectiologues, les sociologues, qui tous nous disent que nous sortirons de cette pandémie par la vaccination. Écouter les témoignages de ceux qui soignent à l’hôpital, ceux qui voient la douleur et la souffrance des malades et de leurs familles, atteints par des formes graves du Covid-19. La catastrophe sanitaire qui se joue aujourd’hui en Guadeloupe nous concerne tous : chaque famille est touchée dans sa chair, chacun connaît la douleur de perdre un proche…
C’est par l’altruisme et le sens du collectif ; des valeurs qui guident notre société guadeloupéenne ; que nous sortirons de cette crise. Car la vaccination, ce n’est pas seulement une démarche individuelle, pour se protéger soi-même du virus. Il faut aussi le voir comme un geste de responsabilité vis-à-vis de nos frères et de nos sœurs, de nos parents, de nos amis, de nos grands-parents, pour les protéger eux-mêmes d’une contamination. C’est ce message que je porte.