Sarah El Haïry : "Le service public de la petite enfance devra apporter des réponses locales"
Le 1er janvier 2025, le Service public de la petite enfance (SPPE) deviendra effectif. En première ligne de cette politique : les communes en tant qu'autorités régulatrices. Une nouvelle mission qui ne va pas toujours de soi pour les maires parfois confrontés à des défis financiers ou fonciers. Pour déminer le terrain et agréger les bonnes pratiques, la ministre chargée de l'Enfance, de la jeunesse et des familles, Sarah El Haïry, a entamé une tournée de terrain appelée « France Familles ». Elle détaille pour le Courrier des maires ce travail et les chantiers qui attendent ce service public naissant.
Pourquoi avoir entamé une tournée de terrain à quelques mois du déploiement de ce nouveau service public de la petite enfance après celui réalisé par votre prédécesseure au ministère, Aurore Bergé ?
Sarah El Haïry : Moi, je suis une élue locale.
Et je suis donc persuadée que le déploiement et la mise en oeuvre du Service public de la petite enfance (SPPE) ne pourra fonctionner que si on sort parfois de cette naïveté qui consisterait à croire que les réponses seront uniques pour tous les territoires.
Toutes les communes de plus 10 000 habitants ne vont pas instaurer un relais petite enfance de la même façon. Il y a des besoins différents en fonction des territoires, parfois il y a des spécificités liées au foncier ou aux besoins des familles, etc. L'idée est donc de construire -avec les élus et les professionnels du territoire-, les réponses aux besoins locaux et le déploiement du SPPE qui arrive le 1er janvier prochain.
Pas besoin de réinventer l'eau chaude : il faut surtout mettre en lumière ce qui a marché, montrer qu'il y a de l'intelligence collective dans les territoires, dans les intercommunalités et les donner à voir dans un ensemble de guides, d'outils communs « clé en main ».
« France Familles » c'est en complémentarité de ce qu'ont fait à l'époque ma prédécesseure, Aurore Bergé, et d'Élisabeth Laithier, présidente du comité de filière « petite enfance » pour préparer la loi, désormais votée. Ma responsabilité, maintenant, c'est sa mise en oeuvre et la mobilisation de l'ensemble des élus du bloc communal et intercommunal.
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Quels sont aujourd'hui les autres freins au déploiement du SPPE ?
Déjà la question de l'attractivité des métiers, et donc le manque de professionnels. Dans certaines communes, des berceaux sont fermés faute de professionnels... Et puis, on a aussi la question du vieillissement des assistantes maternelles et des départs qui ne sont pas remplacés, deux sujets dont les élus me parlent beaucoup.
L'autre grande préoccupation, c'est le foncier en zone urbaine ou littorale ou les enjeux financiers autour de la rénovation de bâtiments. Les situations sont souvent très tendues pour les élus. Ils répondent du mieux qu'ils peuvent aux besoins immédiats mais, pour garantir un accueil pour chaque enfant, il est nécessaire d'avoir une stratégie à moyen terme. C'est le but du schéma pluriannuel de maintien et développement de l'offre d'accueil prévu pour les communes de plus de 3 500 habitants.
Que fait le Gouvernement pour accompagner les élus sur ces défis ?
Sur l'attractivité des métiers de la petite enfance, on a débuté par une revalorisation salariale.
Grâce à une aide de 450 € par place d'accueil versée par la branche famille, les communes pourront augmenter leurs professionnels de la petite enfance d'au moins 100 € net en moyenne.
J'ai également lancé des négociations salariales de branche pour le privé et en parallèle, nous allons mieux sécuriser les revenus des assistantes maternelles lorsqu'un parent-employeur fait défaut.
Il y a aussi les questions liées aux conditions de travail avec de nouvelles missions pour les PMI afin qu'elles deviennent - à condition de les décharger de certaines tâches administratives - une force d'accompagnement pour les assistantes maternelles en recréant avec elles un lien de confiance.
La question des passerelles enfin entre les « métiers du lien » (auxiliaires de puéricultures, éducateurs, animateurs, etc.) afin de redonner du rythme aux carrières.
Quant aux questions foncières, il y a notamment cette idée portée par les maires ruraux visant à réutiliser les classes disponibles pour installer des maisons d'assistantes maternelles par exemple. Cette bonne pratique mérite d'être partagée car elle fait sens pour les parents- qui accompagnent souvent un grand à l'école et un petit à la crèche ou chez une assistante maternelle- et pour les communes pour réutiliser des locaux existants.