Forum de l'actualité parlementaire
Dans ces temps durs et incertains, beaucoup de Français ressentent une forte inquiétude. Très dense, l’actualité parlementaire ouvre des débats vifs, parfois violents. Notre secrétaire générale adjointe Alice Le Moal anime un forum où les députés du groupe MoDem à l’Assemblée nationale, nos députés européens, nos sénateurs dialoguent avec les internautes sur les enjeux actuels.
Pour ouvrir la discussion, Alice Le Moal interroge les parlementaires sur leur rôle et leur mission dans la fabrique de la loi. La semaine qui vient de s’écouler, et au moment même où se tient notre Congrès, des violences ont eu lieu contre les forces policières. La formulation de l’article 24 de la loi sécurité globale, puis la proposition de réécriture, ont mis en évidence des flottements et tensions. Les députés du groupe MoDem n’ont pas tous exprimé la même position sur l’article 24. Notre secrétaire général adjoint Richard Ramos a rappelé lors de la table ronde « Réveiller la conscience citoyenne », au Congrès, qu’il est impératif de voter une loi en conscience. C’est l’une des forces du groupe coordonné par Patrick Mignola que de constamment débattre, échanger, sur les points de désaccord. C’est cela, l’esprit de pluralisme et de liberté.
Les députés ont-ils le sentiment d’un trop plein législatif ? Comment rendre les lois plus lisibles ? A-t-on progressé sur l’évaluation des lois ? Sylvain Waserman, vice-président de l’Assemblée nationale et député du Bas-Rhin, souligne que des textes comme la loi sécurité globale mettent en évidence la tension entre liberté et sécurité. Ce sont des lignes de crête, qui cristallisent nécessairement les tiraillements. Dans le groupe MoDem, on se parle ouvertement : si les débats internes étaient retransmis, les citoyens seraient heureux de voir des discussions aussi franches.
Patrick Mignola, président du groupe et député de Savoie salue la présence dans le forum de plusieurs nouveaux députés : Christophe Jerretie (député de Corrèze, commission des Finances), Sabine Thillaye (présidente de la commission des Affaires européennes), Christophe Blanchet (député du Calvados, commission de la Défense), Perrine Goulet (députée de la Nièvre, commission des Affaires sociales). Patrick Mignola réaffirme que le pluralisme est le vrai nom de la démocratie : faire converger les points de vue différents, c’est la recherche du compromis, essentielle dans la culture centriste.
Le sénateur de la Gironde Alain Cazabonne estime qu’en effet de nouvelles lois chaque semaine, cela n’a pas de sens. Un seul mot s’impose : la simplification. Le député de la Corrèze Christophe Jerretie précise la différence entre les textes de temps long de temps moyen et de temps court. Les députés appartenant à des commissions différentes, il faut faire confiance à ses collègues spécialisés sur tel sujet pour décider de sa position. Depuis 3 ans, le travail de contrôle d’analyse des lois a bien progressé.
Le député de Vendée Patrick Loiseau, membre de la commission du Développement durable, reconnaît qu’il faut améliorer la communication sur la démocratie interne au groupe. Les citoyens seraient intéressés de suivre ces débats riches et argumentés. Ainsi, sur l’éolien, tous les députés n’ont pas la même position. La députée du Pas-de-Calais Marguerite Deprez-Audebert regrette que l’on appelle les lois par des acronymes, au lieu de leur donner un nom aux résonances positives. Elle se réjouit que le terme de « séparatismes » ait été abandonné pour l’intitulé de la future loi confortant les principes de la République. Quant aux lois inutiles, elles polluent la vie démocratique. En revanche, les rapports parlementaires constituent une richesse : on repart trop peu souvent des rapports existants pour en écrire de nouveaux.
Le député européen Christophe Grudler fait remarquer la différence principale entre le Parlement européen et l’Assemblée : les députés européens peuvent étudier plusieurs textes en même temps dans les commissions spécialisées (on peut voter, parfois, 240 fois en une heure !), mais en revanche ils n’ont pas – comme à l’Assemblée – la liberté d’initiative des lois. La députée européenne Sylvie Brunet ajoute qu’il faudrait mieux coordonner les travail des parlementaires nationaux avec celui des parlementaires européens, pour plus d’efficacité et de collaboration.
Le budget 2021 a fait l’objet de 4 lois de finances rectificatives. Voté dans un contexte angoissant, ce budget a pour but de répondre à une crise inédite et inattendue. Le député des Pyrénées-Atlantiques Jean-Paul Mattéï (commission des Finances) nous parle de cette séquence budgétaire hors-normes, paradoxale : les milliards mis sur la table laissent pour l’instant entre parenthèses la question de savoir comment l’on va rembourser la dette. Mais il était impératif d’éviter la catastrophe économique et de préparer l’avenir sur les 3 axes Développement durable, Economie, Solidarité. Oui, abonde le député des Bouches-du-Rhône (commission des Finances) Mohammed Laqhila, c’est la première fois qu’un pays vote un budget vert : sur les 100 milliards du Plan de relance, 1/3 sont dédiés à la transition écologique. La députée européenne Laurence Farreng souligne que, pour la première fois dans l’histoire de l’Europe, les pays ont créé une dette commune pour faire face ensemble à la crise sanitaire. C’est un acte politique majeur, impulsé par le couple franco-allemand et qui entraîne les pays les plus « frugaux ». La députée européenne Marie-Pierre Vedrenne précise qu’avec la taxation des GAFA au niveau européen, avec l’idée de mécanismes carbone d’ajustement aux frontières, ce n’est pas le contribuable qui financera cette dette, mais que ceux qui tirent le plus de profit paieront leur part. Il s’agit de mettre en œuvre une fiscalité juste.
Comment fluidifier la coordination entre les différents échelons ? Entre députés européens et députés nationaux, entre parlementaires et élus locaux, entre les élus et la société civile ? Le non cumul a eu comme effet pervers de creuser la distance entre les parlementaires et leur échelon local, où ils ne sont plus aux manettes et au contact direct et régulier de la population. Il faut inventer de nouveaux types de contact avec, par exemple, des plateformes participatives. C’est ce qu’a expérimenté la députée Sabine Thillaye, qui rappelle la différence avec l’Allemagne où, siégeant 23 semaines sur 56, les députés ont le temps de consolider leur réseau territorial. Perrine Goulet, députée de la Nièvre, reconnaît qu’il est difficile de mobiliser la société civile, plus encline à critiquer sur les réseaux sociaux qu’à participer aux réunions publiques. C’est un défi, admet le député du Finistère Erwan Balanant, qui, rapporteur au CESE, a beaucoup réfléchi sur les manières de combiner démocratie représentative et démocratie participative.
Alice Le Moal aborde le sujet – essentiel - de la santé. Le député du Rhône et médecin Cyrille Isaac-Sibille affirme que la prévention constitue une politique indispensable. Face à un problème, le réflexe est d’aller immédiatement vers les soins, là où la prévention s’attaque aux causes. Le député de la Moselle et psychiatre Brahim Hammouche acquiesce. Il dresse un diagnostic de la situation angoissante dans laquelle les Français sont plongés : les troubles anxieux ont augmenté de 25%, chez les étudiants – souvent isolés et fragilisés – mais aussi chez les artisans-commerçants, les chefs d’entreprise et, bien sûr, chez les soignants et les chômeurs. La crise, les confinements ont vu le nombre de suicides aboutis augmenter. Il faut intégrer une vision globale du champ de la santé mentale, qui n’est pas la seule psychiatrie. Un réinvestissement en moyens, en ressources humaines, en structures s’impose. Brahim Hammouche, dans un rapport de 2019, avait plaidé pour la création d’une grande agence nationale en santé mentale, pour booster la recherche, permettre des expérimentations innovantes, y compris de prévention. Le député du Gard et généticien Philippe Berta reconnaît que la France est le dernier pays d’Europe pour la recherche en santé mentale. Tous deux se félicitent que la loi de 2005 sur le handicap ait permis la reconnaissance du handicap psychique, invisible. Pour conclure ces échanges riches et amicaux, Philippe Berta tient à rappeler que le week end des 5 et 6 décembre est consacré au Téléthon : des avancées significatives ont été faites et les faire entrer demain dans le pratique médicale, avec l’appui du Haut-Commissariat au Plan, serait un beau pas en avant.