Université de rentrée 2019 - "La culture, un trésor à partager"

Découvrez la première table ronde de notre Université de rentrée 2019 consacrée à la culture, avec Zahia Ziouani, cheffe d'orchestre, Madeleine Louarn, metteure en scène, Jean-Jacques Aillagon, ancien ministre de la Culture et de la Communication et Fabien Robert, premier adjoint au maire de Bordeaux.

« La culture, un trésor à partager »

Fabien ROBERT. - La culture occupe une place très particulière dans notre pays, j'imagine que vous le savez, c'est une politique publique volontariste, engagée. Je rappelle souvent que toutes les grandes puissances mondiales n'ont pas nécessairement une politique culturelle publique.

Les Françaises et les Français y sont extrêmement attachés. Ont eu lieu récemment les Journées européennes du patrimoine qui, comme chaque année, rassemblent des millions et des millions de personnes. Derrière le mot de patrimoine, nous avons, en France, un héritage, des monuments, des traditions tout à fait exceptionnels.

Malgré cela, il y a des crises profondes, des difficultés liées au financement, liées au numérique, liées aux tensions identitaires, liées aussi aux réorganisations territoriales de ces dernières années.

Les politiques publiques et l'accès à la culture constituent un challenge permanent.

Avec Zahia Ziouani, une première question autour du sujet de ce trésor à partager et de l'accessibilité.

Vous êtes une femme cheffe d'orchestre dans un milieu très masculin. Vous avez fait votre école de musique à Pantin, vous habitez toujours à Pantin et, après des études à la Sorbonne, vous dirigez l'orchestre Divertimento.

Vous vous êtes fixé comme défi de rendre la culture et la musique classique sympa dans les cités.

Parlez-nous d'abord de ce sujet et dites-nous comment, dans votre quotidien, vous essayez d'amener la musique classique vers des publics plutôt éloignés, vers les cités, vers des publics qui ne vont traditionnellement pas vers la musique et comment cela se passe.

Zahia ZIOUANI. - Pour répondre à votre question, cela se passe bien.

Après, en effet, pour que cela se passe bien, c'est un travail qui demande du temps. Ce n'est pas toujours évident de concilier le temps avec les résultats et l'immédiateté que, parfois, certains élus ou certaines personnes ont envie d'avoir.

Mon expérience personnelle - j'ai grandi en Seine-Saint-Denis - m'a aussi beaucoup aidée à savoir quelle cheffe d'orchestre j'avais envie d'être au XXIèmesiècle.

J'ai grandi dans un département très riche, très dynamique, avec les réalités qui ne sont pas très simples. J'ai eu la chance de grandir dans une famille où mes parents étaient très mélomanes, très attachés à notre instruction. Nous allions souvent au concert, au musée, évidemment à Paris.

Il n'y avait pas beaucoup de choses dans la ville où j'habitais, en tout cas à l'époque. Je me suis vite rendu compte, quand j'ai souhaité m'engager dans la direction d'orchestre qu'il fallait déjà que j'ai mon propre projet pour exister.

En regardant les orchestres nationaux en France, on ne voit pas beaucoup de femmes à la tête d'orchestres. Il y a 20 ans, quand j'ai décidé de me diriger dans ce métier, il n'y en avait pas et il n'y en a toujours pas aujourd'hui.

Je ne suis pas la seule cheffe d'orchestre, mais pour décliner un projet, se fixer des objectifs, avoir aussi des idées que l'on veut développer, il faut avoir la main sur un projet directrice musicale.

Aujourd'hui, on n'a pas la chance d'avoir une femme à la tête des orchestres nationaux en France. J'ai décidé de créer cet orchestre Divertimento. J'avais envie qu'il soit un peu à l'image de cet orchestre du XXIèmesiècle que j'avais envie de diriger.

Sur ce territoire-là, je voulais aussi qu'en Seine-Saint-Denis, on puisse aussi aller écouter des concerts et que ce ne soit pas quelque chose d'hallucinant de se dire : "Tiens, on va écouter un concert de musique classique à Stains, à Villepinte ou à Sevran" et que la dimension de ces territoires n'était pas du tout incompatible avec l'excellence de la musique classique.

Souvent, on a tendance à se dire que l'excellence, c'est l'élitisme, alors que, pas du tout, qu'il y avait certaines politiques localement mises en place pas du tout de façon malveillante avec l'idée de se dire : Ces publics-là, de toute façon, ne vont pas du tout aimer

La première décision que j'ai prise, c'est d'installer la résidence de l'orchestre Divertimento à la ville de Stains en Seine-Saint-Denis et de tisser des conventions avec les villes.

On ne fait pas les choses tout seul. Cela a été d'autres expériences que l'on a essayé de développer, c'est que tout seul, artiste, c'est compliqué de faire les choses et que même si l'on amène les plus belles œuvres dans les théâtres, d'avoir de belles symphonies, de les jouer avec beaucoup d'engagement, de passion et de talent, si l'on veut les partager avec les publics en face et d'avoir des publics à l'image de la population localement, il faut que l'on se mette ensemble tous sur le terrain. 

Cela a été d'aller à la rencontre des maisons de quartier, des établissements sociaux, des établissements scolaires et des lieux culturels, de faire travailler des gens qui n'en avaient pas l'habitude et petit à petit créer des dynamiques et faire venir des publics qui n'en avaient pas l'habitude à venir aux concerts, d'avoir des publics très riches tant dans la diversité sociale culturelle et intergénérationnelle.

J'en parle aujourd'hui, car cela fait 20 ans que je suis sur le terrain.

Il y a des endroits où cela prend plus de temps que d'autres. En tout cas, il y a peut-être une leçon que j'ai tirée de tout cet engagement-là. En effet, on ne peut pas faire les choses tout seul.

La culture est beaucoup portée en France localement par les collectivités locales. C'est quelque chose qu'il faut rappeler, même si l'État a une responsabilité importante, mais il y a, en effet, de grands établissements à entretenir, à faire vivre. Parfois, localement si l'on ne prend pas la main localement et si l'on n'est pas présent sur le terrain, il y a beaucoup de territoires qui sont abandonnés en matière de culture. Du coup, il faut travailler à la fois avec les acteurs du monde social, éducatif, associatif, les élus locaux et les artistes pour une part importante.

Souvent, on assimile un peu ce travail sur les territoires urbains, parfois ruraux aussi, comme un travail qui n'est pas forcément de la même valeur culturelle que si c'était dans une grande salle de concert.

Aujourd'hui encore, pour les financements que je dois défendre pour l'orchestre Divertimento, j'ai plus de financement du Ministère de la Ville et de la Politique de la ville que de la Culture.

Quand je joue à Stains, à Sevran, à Vaulx-en-Velin, à Lens ou à d'autres endroits des quartiers éligibles à la politique de la Ville, je fais parfois des concerts dans ces territoires-là et aussi à la Philarmonie de Paris, au Grand Théatre de Provence à Aix et aussi dans les grandes salles identifiées en France, on joue les mêmes œuvres, on est habillé de la même façon, on joue avec le même engagement.

Il n'y a pas de raison que, sur certains territoires, on soit financé par la politique de la ville et, sur d'autres, par la culture.

Même s'il y a cette prise de conscience, on sent qu'il y a encore une considération qui n'est pas encore la même par rapport à tous ces publics-là et une image qui n'est pas là même.

…….

M. ROBERT. - Madeleine Louarn, vous êtes metteure en scène.

Madeleine LOUARN. - J'ai commencé le théâtre avec les personnes handicapées. Rien ne me conduisait à cela. J'ai appris avec eux. C'est un chemin qui s'est fait un pas après l'autre. Il n'y avait pas d'ambition dans le sens autre que celui de faire du théâtre, de connaître un peu ce que cette chose-là pouvait produire intimement comme sensibilité, comme expérience, ce que c'était que de pouvoir parler, d'être devant les gens et d'être vu, et comment le théâtre est une grammaire qui refait le monde. C'est une sorte de petit monde qui se refait à chaque fois et qu'est-ce ces hommes et ces femmes avaient de particulier à nous dire qui ne se dit pas autrement ?

La question artistique permet de donner une appréhension du monde qui ne se touche que par ce médium-là, la peinture produit quelque chose d'autre, la musique et le théâtre aussi.

Le théâtre est peut-être un peu plus mélangé puisqu'on a du corps, on a de la musique, on a aussi des images.

C'est quelque chose qui avait une valeur en soi, c'est la seule conviction que j'ai eue, c'est d'apprendre avec eux à quel point ce langage avait d'importance et d'intérêt. 

Nous avons été pendant cinq ans associés au CDN de Lorient.

La particularité de l'histoire, c'est le fait d'avoir cette implantation très forte à Morlaix depuis le début à cause des hommes et des femmes qui sont dans cet ESAT. C'est de pouvoir se dire que l'on peut aller partout à partir du moment où l'on est très fondé par notre propre enracinement.

Par chance, on a été suivi par beaucoup d'institutions. Aujourd'hui, on a été deux fois au festival de ToNNe, au festival d'Avignon, on y retournera une troisième fois bientôt, le festival "in". 

La reconnaissance du travail se fait, cela fait 30 ans, on a mis notre temps pour y arriver, mais cela n'a jamais été un objectif ; la chose est arrivée de fait par les rencontres, par la manière aussi de pouvoir se dire que le monde est un peu plus grand que notre espace à Morlaix.

En même temps le fait de pouvoir y revenir nous a donné la possibilité d'être un peu singuliers. Je ne suis pas persuadée que l'on aurait pu faire la même expérience, à Paris par exemple. Là, il y a tellement de visibilité de toutes parts que l'expérience un peu singulière, un peu étrange, qui peut aussi se permettre d'être parfois non vue, plus secrète, c'est important aussi.

À la manufacture de tabac de Morlaix, on est en train de mettre en place une plateforme qui s'appelle le Sew. C'est un lieu de travail pour les artistes, mais c'est un lieu où il y a aussi un cinéma d'art et d'essai, de la musique actuelle, un festival dont les camarades qui s'occupent des artistes ont reçu la Victoire de la musique cette année avec Jeanne Added.

Ce sont des gens qui traversent le monde entier, qui habitent Morlaix. On s'est retrouvé ensemble pour dire qu'on allait changer un peu cette ville pour lui donner une attractivité en disant que la question artistique se joue au quotidien et que c'est un endroit de vie. Ce n'est pas juste un moment limité dans le temps, c'est aussi un quotidien.

Du coup, ce lieu va donner, je le pense, vraiment un nouvel élan à la ville parce qu'il a beaucoup d'ambition. Il a surtout été issu d'un grand travail avec tous les élus, le ministère de la Culture, le travail avec les élus locaux, avec l'agglomération, le département, la région.

Ce qui est peut-être la chose la plus importante, c'est de voir à quel point les politiques publiques aujourd'hui, la culture, sont toujours et, pour moi c'est absolument essentiel, des leviers pour inventer les nouvelles choses.

On dit aujourd'hui souvent de laisser cela un peu au privé, que cela va venir, que la culture c'est la masse, c'est l'industrie culturelle. Je crois réellement que ce qui fait un tissage puissant, ce sont les hommes et les femmes qui vivent-là, qui travaillent, qui sont peut-être dans un rapport beaucoup plus singulier, beaucoup plus exceptionnel et beaucoup moins standardisé. C'est ce non-standard que je défends vraiment à la fois en étant à Morlaix et en circulant partout dans tous les théâtres de France.

L'intérêt de la création, c'est que vous parlez sur quelque chose qui n'est pas là. Notre vie a été, comme l'on dit, de vendre la peau de l'ours avant qu'il soit tué. C'est vraiment cette possibilité de prendre le risque qui est le cœur même de notre engagement.

Fabien ROBERT. -Vous parlez des grandes maisons de théâtre en France, c'est une forme de reproduction de système. L'attention apportée aux publics éloignés, aux publics empêchés de la part de ces grandes maisons, comment vous la qualifieriez aujourd'hui. On dit souvent que toujours les mêmes vont dans ces grandes maisons. Il y a des évolutions aujourd'hui ?

Madeleine LOUARN. - C'est un peu comme la question de l'élitisme. C'est un discours vieux, il faut arrêter, stop.

Les grandes institutions comme les petites font un travail de dingue, surtout dans le spectacle vivant, elles n'ont pas la médiation de l'industrie culturelle et de la masse. C'est assez différent en musique actuelle, dans le cinéma aussi. Tout ce qui est reproductible a une autre vie, à la fois par le net ou par d'autres canaux.

Tout ce qui est lié au spectacle vivant, s'il n'y avait pas ce travail qui était fait, il n'aurait personne dans les théâtres.

C'est parce qu'on leur parle et qu'il se passe quelque chose d'important qui peut donner envie d'une suite.

On passe son temps en nous reprocher que ce ne sont jamais les bonnes personnes, cela fait 30 ans que l'on me traite d'intello de travailler avec des personnes handicapées mentales.

À un moment, ce discours ne tient pas. Il est une sorte d'a priori. Tout notre travail, c'est d'essayer de sauter cet a priori et de retrouver par l'expérience elle-même combien il y a des choses bien plus intéressantes à vivre.

Fabien ROBERT. -Vous travaillez aujourd'hui sur le concept de centre de création adaptée.

Madeleine LOUARN. -J'ai une compagnie depuis plus de 20 ans soutenue par l'État, la région, le département et l'agglomération.

L'équipe de Catalyse qui sont des  acteurs handicapés mentaux sont ensemble, travaillent le théâtre toute la journée. Ils sont professionnels, un statut de travailleur handicapé, ils sont salariés pour faire du théâtre. Ils sont accompagnés. On s'est dit qu'on allait faire un lieu de création pour les artistes parce qu'ils travaillent avec des artistes. Cela permet d'avoir tout un maillage d'échanges forts intéressants.

Le fait que ces personnes handicapées soient présentes au cœur de ce lieu de culture dit à quel point c'est précieux que cette fragilité et cette délicatesse de vie nous ramènent tout le temps aux efforts que chacun d'entre nous doit faire et aux écueils sur lesquels on doit à chaque fois essayer de dépasser nos propres difficultés.

Je trouve que c'est une belle image d'avoir au cœur même d'un lieu de culture ce groupe d'hommes et de femmes qui travaillent tous les jours.

……….

Fabien ROBERT. - Je démarre par une question en lien avec l'actualité. On t'a beaucoup demandé, ces dernières heures, quel était le bilan culturel de Jacques Chirac. J'ai envie que tu nous parles du dialogue des cultures, de ce qui lui tenait à cœur, de ce qu'il a réalisé et que tu nous dises quel regard aujourd'hui tu portes sur ce travail qui consistait peut-être à dire que toutes les cultures du monde se valaient, qu'il y avait une forme d'égalité et ce n'était pas forcément évident à l'époque. 

Jean-Jacques AILLAGON. - Il est vrai que l'on m'a beaucoup interrogé sur cette question au cours des dernières heures. Je ne vais pas me répéter indéfiniment, mais je tiens à souligner que l'idée de l'égale dignité des cultures et des civilisations était une idée ancrée au cœur même de la conviction de Jacques Chirac, qu'il s'est forgé peut-être progressivement dans sa personnalité.

Le Jacques Chirac qui nous quitte est finalement meilleur qu'à certains moments, il a pu l'être au moment de son histoire personnelle ou de son histoire politique.

Cette idée, il la tenait également de sa jeunesse et du contexte dans lequel il avait vécu cette période de sa jeunesse qui avait été marquée très fortement par la pensée de certains historiens, philosophes ou écrivains comme André Malraux.

André Malraux, quand il décrit son musée imaginaire, il convoque des œuvres de toutes les cultures, de toutes les civilisations et il met dans sur le même plan une œuvre cambodgienne, une œuvre précolombienne et nous invite à nous dépouiller de nos préjugés.

Jacques Chirac a fait ce travail de refus des préjugés. Cette idée, il l'a également appuyée sur un concept de dialogue des cultures. On peut se dire que cette expression est peut-être un peu vide, car ce sont les êtres humains qui dialoguent, ce sont les êtres humains qui sont porteurs de ces cultures, qui sont invités à dialoguer et qui doivent dialoguer.

Pourquoi Jacques Chirac tenait-il tant à cette idée ? C'est car il voyait bien qu'il fallait affirmer la nécessité de la diversité des cultures, que l'uniformisation des cultures serait une chose terrible, comme l'uniformisation des espèces animales ou végétales. La biodiversité est une richesse, de la même façon, la diversité culturelle est une richesse.

Cette diversité culturelle, qui s'appuie désormais sur la convention de la diversité culturelle de l'UNESCO, dont Jacques Chirac avait été le promoteur, peut conduire à ce que les cultures s'enferment les unes sur les autres, chacune estimant que son droit à la différence devient une singularité tellement forte qu'elle est une suffisance.

L'ancien Président de la République voyait bien qu'il y avait là un vrai risque de culture des ostracismes, des refus de la différence et peut-être même des intégrismes. La diversité culturelle, si elle est pratiquée de façon inadaptée, peut devenir une source d'intégrisme.

Il affirmait sans cesse ce principe de la nécessité du dialogue des cultures, de façon que chacun d'entre nous devienne totalement curieux de la culture d'autrui et se mette à partager, comme nous l'a dit Zahia, un peu de la culture des autres.

Notre civilisation est formidable, elle est issue de la convergence de beaucoup d'influences et, en plus, à partir du 19èmesiècle et surtout au 20èmesiècle, nous avons inventé quelque chose de formidable : la disponibilité à l'égard des autres.

L'art africain a été un facteur déterminant dans l'émergence de nouvelles formes artistiques, notamment picturales en Europe. On sait très bien ce que le cubisme doit à la fragmentation des formes dans l'art africain. Ce métissage est devenu une richesse et il doit sans cesse nous inviter à regarder au-delà de nos limites.

Zahia parlait de la diversité des influences qui se sont appliquées à notre patrimoine musical et un chef comme Jordi Savall fait un travail magnifique d'interprétation conjointe dans le même concert de musique médiévale, de musique byzantine, de musique arabo-musulmane du Proche-Orient, de musique arabo-andalouse de l'Afrique du Nord ou de l'Espagne musulmane.

On voit bien qu'il y a, là, peut-être une singularité de l'Europe que d'être disponible pour ces métissages et ces rencontres.

C'est peut-être le grand message que nous avons, nous, Européens, à adresser au monde.

Fabien ROBERT. - Quel bilan as-tu de ce travail d'accessibilité, de ce partage des œuvres qui, sinon, restent parfois dans des murs ? 

Jean-Jacques AILLAGON. - Lorsque j'écoute Madeleine et Zahia, cela me rend extrêmement optimiste, cela me réconcilie avec l'idée qu'un mieux est possible. J'ai, pour ces deux femmes, beaucoup d'admiration, beaucoup de respect. Elles œuvrent justement pour le développement culturel de notre pays, pour le partage de la culture. Le partage de la culture, ce n'est pas, à force de fragmentation, de donner une sous-culture à tout le monde.

Le partage de la culture, cela veut dire le meilleur pour tout le monde. Le partage de la culture, cela signifie également qu'il faut savoir permette à chacun d'accéder à la fréquentation des œuvres, dans les salles de concert, dans les musées, dans les théâtres naturellement, mais cela veut également dire qu'il faut favoriser la pratique des arts.

Il faut mettre fin à cette discrimination entre ceux qui écoutent et ceux qui font de la musique, entre ceux qui produisent des œuvres et ceux qui ne font que les regarder, même chose en matière de théâtre.

Créer une œuvre, cela suppose un génie particulier, mais notre devoir est de faire en sorte que cette distance soit gommée au maximum, sans pour autant affirmer que toute œuvre serait égale à toute œuvre. Il faut maintenir le principe de la hiérarchie entre les œuvres et la possibilité pour une œuvre d'avoir un caractère plus exceptionnel qu'une autre.

Également, lorsque j'écoute nos invitées, je me dis que, dans le processus de la production culturelle et du partage de la culture, ce sont tous les acteurs de la société qui ont un rôle à jouer, l'État en a un éminent dans notre pays, historique, très visible, mais l'une et l'autre ont insisté sur le rôle et l'engagement des collectivités locales. Elles nous ont également parlé du rôle que les institutions ayant un caractère central peuvent jouer dans ces processus de décentralisation ou de déconcentration de la richesse artistique.

La philharmonie est l'un de vos partenaires. Or, la philharmonie est un établissement parisien subventionné par le Ministère de la Culture, subventionné par la Ville de Paris.

Le Festival d'Avignon est une grande institution nationale, mais il travaille avec des compagnies qui, en France ou à l'étranger, travaillent sur des territoires extrêmement divers.

Je crois que le processus est en cours. Il nous appartient à chacun d'y prendre une part de responsabilité. Pour ma part, j'ai souhaité affirmer un principe très simple, par exemple, c'est que tous les établissements nationaux avaient le devoir de prendre des initiatives en région.

Notre histoire est ainsi faite, on ne va pas la refaire. La quasi-totalité de nos institutions nationales sont ancrées à Paris. C'est comme cela. Notre pays s'est construit au tour du pouvoir politique, de sa capitale, mais cette situation deviendrait intolérable injuste, inéquitable, improductive si ces établissements ne se sentaient pas une part de responsabilité à l'égard des partenaires en région et de la totalité de nos concitoyens, où qu'ils se trouvent.

C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité inviter le Centre Pompidou d'abord a tenté une expérience à Metz et le Louvre à s'implanter à Lens. J'ai un peu regretté que ce mouvement ait été interrompu pour des raisons économiques, mais aussi pour des raisons de désir, car les établissements parisiens peuvent se contenter de vivre dans leur immense prospérité et visibilité.

Un musée comme le Musée d'Orsay attire un public immense et le Musée du Louvre, tout comme le Château de Versailles reçoivent des millions de visiteurs. Chacun peut se dire : "Je remplis ma mission, puisque je reçois tant de public".

Cette mission est certes nécessaire et s'impose à ces établissements, mais ils doivent également regarder au-delà des limites du périphérique parisien. Ils doivent tenter d'embrasser le territoire de notre pays tout entier.

Je note qu'un certain nombre de grands établissements entreprennent de façon onéreuse et de façon quasi-commerciale des entreprises de ramification, de satellisation à l'étranger. Ils vendent leur concept leur non leurs collections en Chine, en Belgique, en Espagne ou ailleurs. C'est très bien, mais, dans mon esprit, à condition que leurs missions de service public soient tout d'abord totalement et scrupuleusement respectées. 

Qu'un établissement, pour arrondir sa ressource et mieux accomplir ses missions, tente, ici ou là, une expérience de ce type, c'est bien, mais cela ne doit pas se faire au détriment de sa mission la plus sacrée sur le territoire, là où vivent nos concitoyens.

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