Geneviève Darrieussecq : « Les soignants ont besoin d’être relevés »
Geneviève Darrieussecq, ministre démissionnaire de la Santé et de l'Accès au soins, suit heure par heure l’évolution de la crise dans l’archipel de Mayotte dévasté par le cyclone Chido et décrit la situation dans les colonnes du Parisien.
Quel est le bilan humain, ce mercredi soir, de cette catastrophe ?
GENEVIÈVE DARRIEUSSECQ. Le bilan officiel est de 31 personnes décédées à l'hôpital et d'une cinquantaine de patients en soins d'urgence. Au total, près de 1900 personnes sont passées par les urgences, en général pour des petites blessures. La population avait bien suivi les consignes de sécurité de rester à l'abri pendant le passage du cyclone.
Mais ce bilan est loin d'être définitif car la catastrophe a été d'une telle violence que même des bâtiments en dur ont été fragilisés.
Par ailleurs, une grande partie des habitants ont été isolés, sans accès à l'électricité et au téléphone.
Le centre hospitalier est-il aujourd'hui fonctionnel ?
L'hôpital a été très endommagé, en particulier au niveau des toitures, notamment aux urgences et en réanimation. Actuellement, il fonctionne à peu près à 40 % de ses capacités. Il a dû se réorganiser très rapidement et les patients en réanimation ont été transférés dans les blocs opératoires. Des consultations sous tente ont été mises en place pour les patients qui viennent pour des problèmes médicaux.
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Quels moyens supplémentaires sont prévus ?
Les soignants exercent dans des conditions difficiles, la fatigue se fait sentir et ils ont besoin d'être relevés. C'est pourquoi j'ai activé la réserve sanitaire nationale , afin de permettre les renforts de soignants. Certains d'entre eux sont partis dès mercredi après-midi.
Nous allons aussi déployer dans les prochains jours une structure mobile de réanimation, armée par le ministère de la Santé, qui va pouvoir prendre en charge huit patients en réanimation.
S'il est vrai que nous ne constatons pas pour l'instant d'afflux massif de blessés à l'hôpital, le système de soins doit pouvoir recommencer à fonctionner normalement et accueillir des malades.
Par ailleurs, les conditions de circulation sont très difficiles, il faut donc s'assurer que les centres de soins primaires puissent fonctionner. Un hôpital de campagne de la Sécurité civile va également être mis en place.
Enfin, j'ai demandé du renfort pour l'agence régionale de santé avec des ingénieurs et des logisticiens.
Redoutez-vous le risque d'épidémies ?
Bien sûr, il y a des risques sanitaires importants liés à l'usage d'une eau contaminée, notamment le choléra et la typhoïde.
Nous avons déployé des stocks de pastilles de chlore pour décontaminer l'eau.
Nous devons aussi reprendre le travail de prévention entrepris lors de l'épidémie de choléra au printemps dernier. Elle avait pu être endiguée grâce à un travail de vaccination au plus près de certaines cibles de populations.
Y a-t-il des tensions sur les médicaments, l'oxygène ou le sang ?
L'hôpital avait fait des stocks en prévision du cyclone mais 70 % ont été détruits. Nous avons envoyé, depuis La Réunion, des postes sanitaires mobiles qui sont des grandes malles remplies de médicaments et de produits divers pour répondre aux besoins d'environ 3 000 personnes. Par chance, les stocks des grossistes répartiteurs qui fournissent les pharmacies n'ont pas été trop touchés et la majorité des officines fonctionnent. Pour l'oxygène et le sang, il y a suffisamment des réserves.
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Comment vous positionnez-vous dans la prochaine architecture gouvernementale ?
On ne fait pas acte de candidature, surtout dans ce type de situation. Je suis à ce poste depuis trois mois et je sais que le ministère souffre de la valse à sa tête : je suis la septième en deux ans ! La santé a besoin de stabilité et nous avons des sujets importants à traiter très rapidement, notamment le budget.