Jean-Noël Barrot : "La technologie n'est ni bonne ni mauvaise en soi, elle est toujours au service de l'Homme"

Sylvain Rolland et Philippe Mabille pour La Tribune.

Jean-Noël Barrot, Ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, Vice-Président du Mouvement Démocrate, a donné une interview à La Tribune à l'occasion du sommet Tech for Future. Entretien avec Sylvain Rolland et Philippe Mabille dans La Tribune.

LA TRIBUNE- Depuis le milieu de l'année dernière, les investisseurs sont plus prudents et beaucoup de startups ont des difficultés à lever des fonds. Entre-t-on dans un hiver de la tech ?

JEAN-NOËL BARROT- Nous fêtons cette année les dix ans de la French Tech qui connaît un incroyable parcours. L'écosystème a beaucoup grandi. Au moment où l'incertitude s'accumule sur la tech et sur l'économie, de très nombreuses startups ont acquis une envergure nationale, européenne voire internationale.

Certes, nous aurons à l'avenir des phases de creux et des phases haussières, mais les entrepreneurs et les investisseurs ont atteint une forme de maturité. Cela permet d'espérer que nous traverserons ces périodes d'euphorie suivies de périodes de plus grandes difficultés sans que la French Tech ne vacille sur ses bases.

Face à l'essor de ChatGPT, nous sommes passés de la phase d'euphorie vis-à-vis de l'intelligence artificielle, à la phase de réaction. La CNIL italienne a, par exemple, frappé un grand coup en interdisant ChatGPT sur son territoire. Qu'est-ce que cela vous inspire et que peut faire la France face à ce phénomène qui est aujourd'hui dominé par des acteurs américains ?

Je partage votre constat. On a vu se succéder une vague de technolâtrie, où on voulait nous faire croire que ChatGPT allait résoudre tous les problèmes du monde, puis une vague de technophobie où il faudrait imposer un moratoire, voire interdire ChatGPT. Aucune des deux postures n'est la bonne.

La technologie n'est ni bonne ni mauvaise en soi, elle est toujours au service de l'Homme.

Bien orientée, elle peut changer la vie et sauver des vies, comme AlphaFold qui a synthétisé 200 millions de protéines. On a gagné des centaines de millions voire des milliards d'années de recherche avec des modèles très proches de ceux d'OpenAI.

Donc, évidemment l'IA (l'intelligence artificielle, ndlr) peut rendre d'immenses services à l'humanité. Mais comme tout outil technologique, elle présente un certain nombre de risques qu'il faut pouvoir maîtriser.

La stratégie de la France est simple. La première des choses est de pouvoir maîtriser cette technologie plutôt que d'en subir des versions qui viendraient de puissances avec qui nous ne partageons pas toutes nos valeurs.

C'est la raison pour laquelle il y a cinq ans, à la suite du rapport de Cédric Villani sur l'IA, nous avons lancé une stratégie nationale qui a permis l'émergence des 3IA (instituts interdisciplinaires sur l'intelligence artificielle) à Grenoble, à Toulouse, à Nice et à Paris. Le nombre de chaires, de doctorants et de diplômés en IA a été démultiplié.

Cette stratégie a été actualisée en 2021, quand on a lancé le plan France 2030, avec une nouvelle enveloppe d'1,5 milliard d'euros consacrés au soutien à la recherche, au développement de la formation en IA et aux subventions.

La France a une carte à jouer. Parmi les géants numériques qui ont lancé certains des modèles d'IA, on retrouve souvent des Français à leur tête.

En attendant faut-il interdire ChatGPT comme l'a fait l'Italie ?

Non. Une fois qu'on maîtrise la technologie plutôt qu'on la subit, la deuxième étape est d'encadrer l'innovation pour qu'elle soit conforme aux principes auxquels on est attachés.

Quand ChatGPT a fait irruption dans notre quotidien, j'ai saisi le comité national d'éthique du numérique. En 2021, il avait déjà émis un avis sur les chatbots (agents conversationnels, ndlr) en soulevant les questions éthiques, démocratiques que pose l'émergence de ce type d'outils. Dans quelques mois, le comité national d'éthique va nous rendre une version actualisée de cet avis à la lumière de ChatGPT.

Par ailleurs, afin d'encadrer le développement de l'IA dans le sens que nous voulons, nous négocions un règlement sur l'IA au sein de l'Union européenne.

L'UE est la première démocratie au monde à vouloir un tel cadre. Je ne vais pas rentrer dans le détail mais l'UE va fixer les usages pour lesquels l'IA va être interdite, par exemple la surveillance.

Est-ce les politiques ont pris la mesure des conséquences du RGPD, et de l'obstacle légal très fort qu'il représente dans les transferts de données avec les Etats-Unis ?

On fête les cinq ans du RGPD. Il a été un acte politique très fort, consistant à dire que le plus grand marché et la plus grande démocratie du monde comptait faire respecter un certain nombre de principes, en particulier le respect de la vie privée des données personnelles.

On peut faire quelques reproches au RGPD, mais il constitue la première législation de ce type. Le monde d'il y a cinq ans ne ressemble plus au monde d'aujourd'hui.

Il y aura certainement à revenir sur certaines dimensions, sans transiger sur nos principes, nos valeurs.

Dans le domaine numérique, il y en a deux : le respect des données personnelles d'un côté, et de l'autre, celui de la concurrence saine et équitable.

📰 Lire l'interview complète dans La Tribune

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