Tribune de Jean-Noël Barrot : "La France gagnante de l'Europe ? Oui, parce que nous avons fait changer l'Europe !"
La France est-elle gagnante ou perdante de l'Europe ? Faut-il voir le verre à moitié vide ou le verre à moitié plein ? À un peu plus de deux mois des élections européennes, « Marianne » donne la parole aux tenants des deux thèses. Pour Jean-Noël Barrot, notre ministre délégué chargé de l'Europe, la France a été le moteur de nombreux changements à l'échelle de l'Union européenne.
Il y a quelques années encore, l’Europe était comme tétanisée et impuissante face aux grands enjeux de l’époque et aux attentes des citoyens : dumping social, migration irrégulière, décrochage économique et industriel, dérèglement climatique, libre-échange débridé.
Dans son discours de la Sorbonne, en 2017, le président de la République proposait de briser des tabous pour que l’Europe soit prête à affronter les grands défis du siècle. Sept ans plus tard, ces engagements ont été tenus et l’Europe s’est transformée.
En affirmant il y a sept ans qu’« il y [avait] une souveraineté européenne à construire », Emmanuel Macron bousculait les tenants d’une Europe réduite à n’être qu’un grand marché plus ouvert que les autres. En quelques années, ce concept est entré dans le langage courant, même dans des pays initialement très méfiants à l’égard de cette idée française.
C’est ainsi que l’Europe a su produire ses propres vaccins et va relancer sa production de matériaux critiques. L’Union investit massivement dans les industries stratégiques pour ne pas avoir à dépendre des autres, et crée des emplois partout, notamment dans les territoires laminés par la désindustrialisation, plus de 90 000 en France en six ans.
C’est ainsi que l’Europe apporte à l’Ukraine un soutien budgétaire, humanitaire et militaire, tout en développant ses propres capacités industrielles de défense et en affirmant son rôle de puissance géopolitique.
Mais les victoires idéologiques du discours de la Sorbonne ne s’arrêtent pas là. Pour en prendre la mesure, un peu de recul ne serait pas de trop. Les exemples sont nombreux, certains résonnent plus que d’autres.
L’Europe sociale, d’abord. Elle était au point mort, et la figure du travailleur détaché symbolisait cet échec. Dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, Emmanuel Macron promettait l’instauration dans toute l’Union d’un principe clé : « à travail égal, salaire égal », et un salaire minimum européen. Grâce à la mobilisation de son gouvernement et des députés européens du groupe Renew, c’est chose faite. Et plus personne ne parle de cette injustice dont les extrêmes se nourrissaient.
De même, l’engagement avait été pris de mettre fin à la naïveté européenne en matière commerciale et d’instaurer une taxe carbone aux frontières. Promesse tenue. Nous avons créé un procureur commercial européen chargé de vérifier le respect des accords. Des « clauses miroir » imposent à ceux qui exportent leurs produits agricoles vers l’Union de se conformer à nos normes sanitaires et environnementales.
Face aux migrations qui sidéraient l’Europe, enfin, le président de la République proposait dès 2017 de renforcer nos frontières extérieures et d’assurer la solidarité entre les pays européens. Le Pacte sur la migration et l’asile, définitivement adopté dans quelques jours, concrétisera cette ambition.
À la liste des lignes qui semblaient immuables et que nous avons transcendées, ajoutons la régulation des Gafam ou la création d’universités européennes : dans le sillon du discours de la Sorbonne, nous avons construit une Europe plus souveraine, plus unie, et plus démocratique.