François Bayrou : « Notre politique d’innovation est la clé de notre avenir »

François Bayrou, Premier ministre et président du MoDem, s'est exprimé ce jeudi 10 avril lors du comité interministériel de l'innovation. L'occasion de faire un bilan du projet France 2030. Retrouvez son discours.

Seul le prononcé fait foi.

Je suis très content de cette rencontre (...).

Comme Bruno BONNELL a eu la gentillesse de le rappeler, c'est un combat que j'ai conduit, pour lequel je me suis battu dans d'autres fonctions, des fonctions précédentes qui étaient les fonctions du Haut-commissaire au Plan, que nous avons fait renaître avec le président de la République au moment du covid. Parce que l'idée d'un Haut-commissaire au Plan, cette volonté de déchiffrer ce que l'avenir pourrait être et ce que les grands enjeux de l'avenir devraient être, cette idée-là avait été abandonnée en France depuis plusieurs décennies, parce que l'idée d'un plan apparaissait comme une idée archaïque qu'on reliait plus ou moins à l'Union soviétique, au « Gosplan » comme on disait historiquement. Et ce n’était pas du tout à la mode. Ce qui était à la mode, c'était l'ultralibéralisme, c'est-à-dire l'idée que tout ça allait finalement s'organiser mieux par le marché. C’est comme ça qu'on réfléchissait il y a 15 ans, 20 ans. 

Puis, on s'est aperçu que ce n'était pas tout à fait exact, parce que les grandes mutations du temps sont telles qu'elles ne peuvent pas être relevées, les défis ne peuvent pas être relevés, uniquement par des initiatives individuelles, désordonnées et financières, et que la puissance publique, c'est-à-dire cette idée que la nation, au fond, choisit des objectifs qui ne sont pas des objectifs immédiatement rentabilisables, et que pour affronter l'avenir de manière efficace, il faut que la décision publique et les moyens publics soient investis pour être d'ailleurs relayés aussi par des moyens et des investissements privés. 

Et France 2030, c'est ça. C'est ce combat que le président de la République a voulu, lorsqu'on a créé France 2030. Ce n'est pas très facile de faire de la politique et en général, ceux qui en font sont critiqués. Mais ceci est le résultat d'une volonté politique qui a été choisie, mise en œuvre et pour laquelle on a mis les moyens. 

Je veux insister sur ce sujet de l'investissement. On vit dans un pays qui a eu beaucoup recours à la dette — on aura l'occasion d'en parler la semaine prochaine — à l'emprunt. Mais cette dette-là, comme vous savez, de plusieurs milliers de milliards, 3 300 milliards, et je répète toujours parce que le calcul mental — pas dans cette salle, Madame la ministre d'État, mais ailleurs dans la société — le calcul mental est assez largement abandonné et je répète toujours qu'un milliard, ça n'est que deux syllabes, mais c'est 1 000 millions d'euros. Et donc, 3 200 fois 1 000 millions d'euros, notre endettement, nous l'avons consacré beaucoup à nos dépenses quotidiennes. Or, le choix qui aurait dû être le nôtre et qui devrait être le nôtre à l'avenir, c'est de consacrer ces facilités d'emprunt, à condition que — facilité soit la situation d'avenir, on n'en est pas totalement sûr — ces facilités d'emprunt soient consacrées à l'investissement. 

Et France 2030, c'est ça. On a mobilisé des fonds pour que notre pays, notre Europe puisse affronter les défis les plus difficiles de l'avenir. L'action de France 2030 a été tout à fait remarquable. On a vu des chiffres, mais il faut les répéter, 7 000 entités, entreprises, ont été choisies pour réaliser leur projet. Plus de 7 450 projets ont été financés avec des sommes considérables, puisque c'est 34 milliards qui ont déjà été investis. 34 000 millions d'euros ont déjà été investis pour prendre à bras le corps des problèmes aussi importants, on l'a vu, que le spatial, les biotechnologies d'avenir,  l'intelligence artificielle, les ordinateurs quantiques, tout ce qui tient à l'hydrogène, et il y a encore d'immenses progrès à faire. Et c'est au fond le choix que nous venons célébrer et honorer ici. Et donc, j'ai été très intéressé par les trois personnalités expertes qui se sont exprimées à cette tribune. J'ai été très intéressé par la détermination, la créativité, l'ambition, et ce sont pour nous de grandes sources d'espoir. 

Il y a une histoire que j'aime beaucoup : lorsque le général DE GAULLE est revenu au pouvoir en 1958, il y avait de très grands débats autour, au fond, de l'ouverture européenne de la France. Débat auquel il avait participé lui-même, pas toujours en étant favorable – en tout cas, ses amis n'étaient pas toujours favorables – et il y avait le traité de Rome, c'est-à-dire la possibilité d'ouvrir les frontières pour construire un grand marché. Et quand il est arrivé au pouvoir, ses collaborateurs lui ont apporté des notes, et une de ces notes, c'était pour sortir du traité de Rome, qu'il avait combattu comme homme politique, et au fond, de très grands noms suggéraient que la France n'avait pas les capacités d'affronter la concurrence internationale. On lui a apporté cette note, et il a pris son stylo, et il a écrit en marge à ceux qui lui proposaient de sortir du traité de Rome, il a écrit : « Non !  Ils sont forts, mais ils ne le savent pas ». 

Et je trouve que notre pays et notre Union européenne sont exactement dans cette situation-là. Ils sont forts, mais ils ne le savent pas. Et au fond, ce que nous découvrons dans France 2030, c'est que nous pouvons être forts et pour une fois le savoir, et pour une fois mobiliser nos capacités, et nos capacités financières et celles des générations qui viennent, parce que quand on emprunte, on emprunte avec la certitude que c'est les générations qui suivront qui rembourseront. C'est donc un mouvement de confiance vers l'avenir et cette idée que nous avons de grande force, elle est appuyée par des réalités. 

Sur les 15 dernières années, nous avons obtenu quatre médailles Fields et huit prix Nobel scientifiques. Donc, nous croyons que la relève existe partout en France, que partout en France se trouvent les ressources, les talents. Vous avez beaucoup insisté sur la volonté de travailler au redressement de notre pays. Et c'est pour cela que nous sommes ici, pour que la force qui a été engagée dans les projets, dans les recherches, dans les entreprises, se communique au pays tout entier. On a tous vécu le basculement qui nous a entraînés dans un nouveau monde, pas le nouveau monde qu'on espérait, mais un nouveau monde qu'on subit. Et vous avez insisté, madame, sur la révolution que le monde de la recherche est en train de subir aux États-Unis et donc sur la planète entière. Les États-Unis étant l'épicentre et considéré jusqu'à maintenant comme l'épicentre inviolable, d'un système de recherche totalement optimiste, totalement ouvert, totalement partagé, qui rayonnait sur le monde et d'ailleurs absorbait, vous en êtes une preuve vivante, une grande partie des chercheurs qui, sur la planète, développaient, inventaient, permettaient de mettre au point des technologies nouvelles. On avait l'impression que tout convergeait vers les États-Unis, et le tremblement de terre qui a été déclenché par la réélection du président américain, ce tremblement de terre, nous en connaissons, vous en connaissez tous, les conséquences directes, actuelles, contemporaines à chaque jour, puisque chaque jour découvre un paysage nouveau. 

Le renversement de la position stratégique des États-Unis, à la fois croyant en la science et qui devient l’épicentre ou le centre du doute sur la science, à la fois croyant à la liberté d'entreprise et la liberté du commerce, et qui devient le lieu du doute sur l'entreprise et sur le commerce, croyant aux droits et aux libertés, et qui devient le lieu du doute sur les droits et sur les libertés. Cette contagion d'inquiétude crée un monde nouveau, et dans ce monde-là, nous avons des responsabilités, sans oublier ce qu'est le contexte sur un autre continent, le contexte chinois, avec une stratégie extrêmement puissante de prise de contrôle scientifique et technique industrielle sur l'univers que nous vivons ensemble. 

Excédent commercial chinois : 1 000 milliards de dollars. Déficit commercial des États-Unis, en tout cas sur les biens : 1 000 milliards de dollars équivalents, ce qui explique la situation que nous sommes en train de vivre. Ces tremblements de terre sont inédits et ils s'inscrivent dans une succession d'accidents que nous avons connus. Le covid-19, nous a fait découvrir que nous ne pouvons pas laisser à d'autres la production de tous nos matériels de santé et de tous nos médicaments critiques. Et il faut se rappeler que cette crise nous a révélé la faiblesse de nos capacités de production et les dépendances auxquelles nous étions soumis, avoir découvert que nous manquions de produits de base, comme à l'époque le masque et les médicaments élémentaires, le paracétamol, par exemple, et découvrir en même temps que ce sont nos chercheurs qui, aux États-Unis, ont mis au point la réponse, les vaccins à ARN Messager, chercheurs pour certains, pour beaucoup, français, alors que nous, sur notre sol, nous étions en dépendance. Ce paradoxe-là est un paradoxe évidemment extrêmement provoquant pour notre conscience nationale. Et nous savons depuis au moins le 24 février 2022, date de l'attaque de la Russie de POUTINE sur l'Ukraine, nous savons que nous ne pouvons pas dépendre de n'importe qui dans des domaines aussi stratégiques que l'énergie et les intrants nécessaires à la production agricole. Et je le disais, nous avons découvert que nous ne pouvions pas, depuis le mois de janvier de cette année, dépendre dans le domaine des technologies de pointe, dans les domaines de l'intelligence artificielle, dans le domaine du cyber et du quantique. 

Nous savons qu'il est vital de renforcer notre base industrielle et technologique de défense. La question, c'est la maîtrise des maillons essentiels des chaînes de valeur et c'est exactement là que nous avons investi. Cette reconquête de notre production et de notre indépendance est la question première que nous avons à résoudre parce que d'elle dépend notre sécurité, notre prospérité et le financement de notre modèle social. Et puis, il s'agit de quelque chose d'autre : c'est l'idée que nous nous faisons de notre avenir national, l'ambition industrielle française qui a eu ses succès au XXe siècle, que tout le monde a en tête, dans le domaine de l'aviation, dans le domaine du ferroviaire, dans le domaine du nucléaire. Cette ambition industrielle en France a toujours été poursuivie en conjuguant les efforts de la recherche privée et de la recherche fondamentale soutenue par les pouvoirs publics. Cette ambition industrielle, nous avons pensé – avec, je le disais, le président de la République, en 202 – qu'elle était plus que jamais d'actualité, et que pour repousser les frontières de la connaissance et du projet technique, nous avions encore des choses à dire, essentiels dans ce domaine, et à entreprendre. 

Il existait pour cela un chemin, c'était le chemin qui continuait celui qu’Alain JUPPÉ, Michel ROCARD à la fin des années 2010, avait conduit à la création des programmes d'investissement d'avenir du Secrétariat général pour l'investissement qui a été poursuivi par la décision de France 2030. Peut-être faut-il insister parce que les chiffres passent trop vite sur la dimension de cet investissement. 34 milliards d'euros votés par le Parlement en 2021 qui venaient s'ajouter aux 20 milliards déjà votés en faveur du quatrième Programme d'investissement d'avenir. Ce plan était particulièrement important et il était fondé autour d'une idée que Bruno BONNELL a défendue tout à l'heure, c'est la pluriannualité qui est la condition essentielle de toute politique de long terme. 

Bruno BONNELL a donné plusieurs éléments, on les a cités : 155 000 emplois ont été directement créés à partir des efforts de France 2030 et ces emplois l'ont été pour beaucoup dans les PME, dans les entreprises intermédiaires et dans les toutes petites entreprises qui représentent, il est nécessaire de le rappeler, 55 % des bénéficiaires de France 2030 et 22 % des aides accordées. Bruno BONNELL a rappelé que 14 %, c'était dans les zones rurales et il a rappelé aussi que la majorité de ses investissements étaient en province hors Île-de-France. Et je veux insister à mon tour sur un aspect qui a peut-être été moins défendu tout à l'heure dans les présentations qui est l'investissement dans la formation, avec, en métropole et en Outre-mer, de remarquables choix qui ont été faits et qui vont être faits. 

Tout à l'heure, on a, à très juste titre, entendu l'idée des petits réacteurs nucléaires consacrés à la chaleur. Il n'y a pas que ces équipements de pointe, on a sous nos pieds la géothermie qui nous permet, là encore, de produire avec une empreinte carbone totalement réduite, mais pour cela, il faut former des foreurs. Les calories disponibles dans la géothermie mobilisable immédiatement, éternelles et gratuites dès l'instant que l'équipement est assuré et a été payé. Cette énergie-là, disponible dans 95 % du territoire français, cette énergie-là, nous sommes le pays le plus en retard d'Europe sur la géothermie et dont j'ai indiqué à Bruno BONNELL qu'il était nécessaire de lancer un grand plan de formation de chômeurs. Ce sont des outils totalement matures, totalement au point, totalement sans aucune difficulté technique, Agnès PANNIER-RUNACHER le sait bien, et ces outils-là, ils sont développés en France. Simplement, nous, nous ne savons pas les mettre en œuvre parce que nous avons depuis longtemps abandonné avec pourtant des économies d'énergie formidables, 80 % par rapport à une dépense énergétique pour produire de la chaleur, 80 % économisés grâce à la géothermie et puisqu'on va vers un changement climatique, pour ce qui est du rafraîchissement, de la climatisation, 95 % d'économies. Il suffit de le mettre en œuvre et de lancer le plan que nous avons évoqué avec Agnès PANNIER-RUNACHER dans des temps précédents et qu'il faut faire avancer. 

Tout ça pour dire que France 2030, c'est évidemment des recherches de pointe et, je dirais, d'ultra spécialisation scientifique et technique, mais nous avons aussi beaucoup de développement comme dans le domaine de l'agriculture (on l'a tout à l'heure évoqué) dans le domaine de l'énergie, que l'on peut parfaitement mettre en œuvre d'ores et déjà en France, en métropole et en Outre-mer. Je veux rappeler qu'à La Réunion, un projet qui s'appelle Échobat va former 1 200 personnes à l'éco-construction en milieu tropical, et nous venons de voir à Mayotte quelle est l'importance de ces choix. C'est dans le détail qu'il faut observer les effets des efforts budgétaires très importants qui ont été engagés, objectif par objectif et levier par levier. Nous pouvons alors être certains que les défis les plus importants que nous avons signalés, que vous avez signalés, vont être relevés : ordinateurs quantiques européens à leadership français qui représentent d'ores et déjà la moitié des ventes mondiales, 52 % des ventes mondiales, la production de 60 biomédicaments dont 47 ont déjà été développés, un taux d'approvisionnement en fruits et légumes frais de 60 % en 2030, nous en sommes à 56 %. Et France 2030 participe au financement de ceintures vertes dans une vingtaine de villes françaises, dont une dans les Pyrénées, qui est particulièrement remarquable, qui en tout cas a été première dans le développement de ces ceintures vertes. En plus des objectifs que vous avez fixés, petit réacteur nucléaire français en service en 2030, où nous sommes déjà en bonne place dans la course mondiale. 2 millions de véhicules électriques et hybrides : nous en sommes à 650 000. Projets aéronautiques bas-carbone, comme le projet d'hélicoptère bas-carbone, ou l'avion bas-carbone de l'entreprise AURA AERO, toulousaine. 

Et dans le domaine culturel, madame la ministre de la Culture : 11 studios de tournage, ça a été tout à l'heure relevé dans le comité interministériel, ce qui va nous placer devant le Royaume-Uni et faire de la France un lieu encore plus attractif pour le tournage de films et de séries. Vous avez souligné que dans le domaine spatial, les quatre projets français de micro lanceurs ont récemment fait leur premier test moteur. Et notre ambition est qu'ils donnent à la France un accès autonome et compétitif à l'espace avec la capacité de déployer des constellations de satellites. Nous avons réduit de près de 8 millions de tonnes annuelles les émissions de sites industriels pour un objectif de 11 millions de tonnes en 2030. Et la technologie d'exploration des fonds marins, le drone ULYX de l'IFREMER, est déjà en situation de maturité. Ce drone sous-marin descend à 6 000 mètres de profondeur avec une autonomie de 24 à 48 heures. Et il peut cartographier par sonar jusqu'à 80 km² autour de lui. Pour sécuriser notre accès aux matières premières, nous avons réalisé des progrès remarquables dans la cartographie du sous-sol, dans son exploitation et dans la réincorporation des chutes industrielles dans les chaînes de valeurs. France 2030 finance par exemple l'usine de recyclage et de raffinage de terres rares de Caremag à Lacq, qui devrait devenir le premier recyclé européen de ces minerais. Pour ce site qui était le premier gisement européen de gaz, c'est à la fois une renaissance industrielle et un service rendu à la transition énergétique du pays. Nous avons l'ambition de produire 234 000 wafers, qui sont des petites plaques de semi-conducteurs en 2030. Et nous étions à un peu plus de la moitié dès 2024, 125 000. Nous voulons former 400 000 personnes aux métiers d'avenir ; je le disais, elles étaient 100 000 en 2024. 

Ces résultats sont des sources de fierté. Nous avons des progrès à faire sur la production d'hydrogène décarboné. Nous avons sécurisé 0,4 GW de capacité d'électrolyse pour un objectif en 2026 qui aurait dû être de 0,8 GW. Notre stratégie nationale d'hydrogène actualisée sera détaillée par le ministre de l'Industrie la semaine prochaine. Et nous n'avons pas encore atteint non plus notre but dans le retour à une production scientifique, à des publications scientifiques dont nous voudrions qu'elles représentent 1,1 % des publications les plus citées dans le monde et nous ne sommes pas encore tout à fait à cet objectif-là. Et la création des innovations et la création de sites industriels se fait encore attendre puisque le nombre de ces créations n'a pas atteint le seuil que nous avions fixé en 2024. Nous savons très bien quels sont ces enjeux. Nous mesurons les difficultés. Nous savons aussi que des sommes importantes qui étaient en attente depuis juin 2024 ont été désormais débloquées, que depuis notre prise de fonction, nous avons attribué un milliard et demi d'aides aux lauréats, et très prochainement 24 nouveaux appels à projets vont être lancés pour nous permettre d'accélérer dans tous les domaines critiques, en particulier dans ces domaines que nous avons cités : le quantique, l'intelligence artificielle et le spatial. Et d'ici à 2027, 54 millions d'euros engagés fin 2021 seront bien mobilisés en faveur de l'investissement d'avenir. Et ce, dans le contexte budgétaire très contraint, de plus en plus contraint, que personne ici n'ignore et sur lequel nous aurons à nous exprimer très bientôt. 

Mais je veux donner ici des orientations claires pour la poursuite de ce programme d'investissement crucial pour notre avenir. La première orientation concerne la méthode, je le disais : c'est la pluriannualité, parce qu'un chercheur, notamment en recherche fondamentale ou appliquée, a besoin d'une garantie de continuité. L'annualité budgétaire, qui est notre règle, met souvent cette continuité en péril, et il est sain que notre programme d'investissement, lui, soit décidément pluriannuel. Mais il faut aussi que chaque euro dépensé nous rapproche de nos objectifs. Nous sommes comptables devant les Français du bon usage des fonds si importants qui ont été mobilisés. Et dans le paysage budgétaire qui est le nôtre, nous devons aussi réfléchir à d'autres modes de financement que les subventions. Je pense, on l'a dit ce matin dans le Comité interministériel, je pense aux avances remboursables et aux prises de participation qui assurent à la dépense publique, monsieur le ministre, un meilleur retour sur investissement. Et nos stratégies d'investissement doivent être sans doute encore mieux clairement définies en amont, de manière à coordonner les efforts de recherche entre acteurs privés et acteurs publics, mais également entre les acteurs privés eux-mêmes. Nous avons enfin un très grand enjeu dans l'évaluation des investissements que nous avons faits. 

Il est impossible que des investissements aussi importants et aussi nombreux réussissent à tous les coups. Ce serait un défi qui mettrait en cause le fonctionnement normal des choses. Il y a des échecs qu'il faut être capable de détecter assez tôt. Il faut être capable de changer d'orientation sur ces sujets-là. Mais évidemment, pour nous, ce qui est le plus important et ce qui est la raison d'être de notre réunion ce matin, c'est que c'est notre politique d'innovation qui est la clé de notre avenir. La puissance publique, dans son ensemble, doit soutenir l'innovation jusqu'à la production et à la commercialisation. 

France 2030 finance l'innovation et la formation mais la réindustrialisation exige aussi de réunir d'autres conditions et nous le savons tous, tous les élus locaux le savent, par exemple la capacité de disponibilité du foncier qui est à peu près sur tous les territoires un problème aujourd'hui, limitant notre capacité d'action.

Enfin, nous devons nous assurer que pour chaque filière, l'environnement réglementaire et fiscal permet de n'étouffer et/ou de ralentir ni l'innovation ni l'implantation industrielle. C'est pourquoi la politique de simplification est nécessaire. Comme vous le savez, un texte de loi est en discussion en ce moment devant l'Assemblée nationale,  par lequel nous espérons des pas décisifs et dont nous annonçons à l'avance qu'il sera repris constamment et aussi souvent que nécessaire au travers du temps, puisque nous avons l'intention d'associer, et ils sont nombreux dans cette salle, chacun des acteurs de terrain à la définition ou au repérage des sources de simplification nécessaires. Cette simplification touche bien sûr les entreprises, elle touche la recherche, mais elle touche aussi chacun des foyers français. Je veux citer un seul exemple : beaucoup de collectivités souhaiteraient pouvoir passer commande de solution cyber innovante auprès de jeunes entreprises. Or, le code de la commande publique rend cette volonté très difficilement applicable parce que, comme vous le savez, on demande des antécédents pour pouvoir participer à la commande publique, ce qui n'est pas toujours accessible pour les jeunes entreprises. C'est pourquoi j'ai demandé que soient examinés les moyens concrets de simplifier le code de la commande publique en matière de soutien à l'innovation, et dans les deux mois, j'aurai les conclusions de ce rapport.

Il y a bien d'autres facteurs, et le premier de ces facteurs, c'est qu'un pays se trouve exposé à une concurrence qui est assez souvent déloyale. Il m'est arrivé de travailler, dans une fonction précédente, avec l'Académie des sciences sur ce sujet, et l'inquiétude ou parfois le désespoir d'un certain nombre de créateurs de voir capter leurs innovations, leurs découvertes ou leurs brevets par des procédures qui touchent beaucoup à l'intimidation par le droit, à l'intimidation par la justice, à la captation par des règles financières qui sont peu accessibles à des innovateurs de petite taille. Tout cela est une manière de menacer notre capacité de recréation et d'innovation. 

C'est ainsi que nous sommes sur le point, grâce à France 2030, de relever non pas tous les défis qui sont devant nous, mais un grand nombre de ces défis-là. Le travail que vous avez fait, je considère que c'est un travail essentiel. Les experts, les créateurs et les entreprises lauréates et qui sont présents dans cette salle sont la preuve de l'excellence et du caractère vital pour la nation, pour l'Europe et peut-être aussi pour une certaine idée du développement de la recherche dans le monde, que la France aura contribué à faire avancer. Pour nous tous, c'est infiniment précieux. Les menaces sont les plus graves qu'on ait rencontrées depuis la guerre. Les déstabilisations sont les plus menaçantes, sont les plus inquiétantes qu'on ait vues depuis très longtemps. Il y a dans la volonté que la France et, j'espère, l'Union européenne expriment de relever ce défi, il y a un élément de stabilité pour tous ceux qui, sur la planète, pensent que l'humanité peut elle-même produire les réponses au défi que trop souvent, elle a laissé grandir. Je pense à l'environnement, je pense à des phénomènes de menaces sur l'opinion publique, sur des cyberattaques, sur le fait que les esprits soient captés et mis sous contrôle. 

Mais nous, nous croyons que les réponses existent. Les réponses existent si nous sommes capables de réunir les capacités de l'action publique et l'inventivité des initiatives privées. C'est cette initiative unique que France 2030 a fait naître et mis en place depuis des années, et c'est pourquoi je voulais, au nom du Gouvernement et peut-être plus largement encore au nom de la société française, exprimer notre gratitude au travail qui a été fait pour France 2030. 

Je vous remercie.

[Applaudissements]

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