Isabelle Florennes : « Ce que l’on souhaite avec la proportionnelle c’est instaurer la culture du compromis et casser les grands blocs politiques »

Cette semaine, les chaines télévisées de France 2, France 3 et France 5 diffusent un clip vidéo du Mouvement Démocrate sur la proportionnelle dans le cadre de l'émission Expression Directe. À cette occasion, nous avons interrogé Isabelle Florennes, sénatrice des Hauts-de-Seine, et fervente défenseur du sujet au MoDem depuis de nombreuses années.
Le MoDem porte depuis longtemps la proposition d’instaurer la proportionnelle aux législatives. Qu'en pensez-vous ?
Environ 70% des Français réclament un changement du mode de scrutin en ce sens pour qu’il reflète plus fidèlement leur choix politique. La proportionnelle est une réponse efficace à la montée de l’abstention, nous l’avons démontré dans un livre blanc publié en 2021.
Quelle proportionnelle le MoDem prône-t-il ?
Nous sommes partisans d’une proportionnelle intégrale, sur la base de listes départementales. Cela nous semble être le bon échelon pour maintenir un lien avec l’enracinement local.
Les adversaires de la proportionnelle estiment que la constitution des listes serait à la main des partis. Je rappelle que sur un scrutin majoritaire à deux tours la désignation des candidats est d’ores et déjà du ressort des partis et que la pratique du parachutage est largement répandue.
Le fait d’instaurer des listes départementales serait un contrepoids efficace au centralisme des états-majors et assurerait la désignation de personnalités locales connectées à leur territoire et aux préoccupations quotidiennes de leurs électeurs.
Êtes-vous favorable l'instauration de la proportionnelle avec une prime majoritaire accordée à la liste arrivée en tête ?
Non, même si j’admets qu’il faut en débattre. Mais on voit bien le calcul du RN qui la demande à l’aune des dernières législatives. Dès lors que sa liste arriverait en tête, la prime accordée à la première place lui assurerait une majorité absolue à l’assemblée. Or pour nous le passage à la proportionnelle doit nous sortir du fait majoritaire.
Ce que l’on souhaite c’est instaurer la culture du compromis et casser les grands blocs politiques. L'intérêt de ce mode scrutin est de permettre aux gens de choisir, lors d’un vote à un seul tour, parmi des listes de partis et de personnalités qui s'engagent sur des programmes de coalition, à l’image de ce qui se fait par exemple en Allemagne.
Face au blocage que connaît aujourd'hui nos institutions par nos partis, est-ce vraiment la bonne solution ? La France est-telle prête a ce type de scrutin ?
C’est une vision biaisée du débat. Puisqu’en l’occurrence, nous n'avons pas voté dans le cadre défini d’un système proportionnel. Nous avons voté sur un scrutin majoritaire à deux tours, perverti notamment par les retraits liés au front républicain, et donc diluant le vote de conviction dans une orientation tactique. Les électeurs se sont donc prononcés au second tour sur un rejet massif du RN. Avec à l’arrivée un résultat qui frustre nombre d’électeurs qui voient leurs convictions relayées au second plan.
L'avantage d'un scrutin proportionnel à un tour, c’est de permettre un choix clair, tout en sachant que pour gouverner et pour y arriver, il faudra se mettre d'accord sur un compromis.
La règle, sera connue dès le départ. C'est ça qui n'est pas juste dans ce qui est arrivé au mois de juin et au mois de juillet dernier, c'est que la règle, elle n'est pas claire et la règle, elle est celle de la confrontation. C’est très différent de la situation dans laquelle nous sommes.
Qu’attendent les Français de leurs élus ? Qu’ils travaillent à l’amélioration de leur vie, de leur quotidien. Or au niveau municipal ou départemental tous mesurent à quel point on progresse toujours en trouvant des voies de compromis. Cela passe la plupart du temps par la recherche de coalitions de projets. C’est exactement la même chose dans la cellule familiale ou dans l’entreprise.
La discussion, le compromis, permettent de sortir du conflit et surtout de dégager des voies de progrès. Cela fait des années que François Bayrou alerte sur la stérilité de l’affrontement « bloc contre bloc ».
D'ailleurs, François Hollande s’y était converti puisqu'il avait mis l’introduction de la proportionnelle dans son programme en 2012.