Patrick Mignola : "Il faut un plan Marshall. Chaque Français a une part de ce plan en lui-même. Le combat n’est pas perdu mais aujourd’hui j’ai le sentiment que l’on fait de la relance comme s’il n’y avait pas urgence…"

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Dans une interview au Figaro, le 21 janvier 2021, Patrick Mignola, président du groupe MoDem et Démocrates apparentés à l'Assemblée nationale et député de la Savoie, revient sur la stratégie de relance du gouvernement et met en garde contre des mesures économiques trop centralisées, en veillant à accélérer le processus. 

Le Figaro : Le rebond de la crise sanitaire bouscule ce début d’année. L’opposition juge sévèrement la stratégie vaccinale. Partagez-vous son impatience ?

Patrick Mignola : Je préfère un gouvernement qui tâtonne humblement mais qui a des résultats à la fin qu’une opposition excessive. Les Français ont juste envie de sortir de la crise sanitaire. Ils ont envie d’y croire. Alors que l’opposition a seulement envie de critiquer Emmanuel Macron. Elle est systématique et caricaturale, capable de dire tout et son contraire à une semaine d’intervalle.

L’inquiétude des Français est pourtant là…

En luttant pied à pied, on va s’en sortir. Ce que j’observe toutefois, c’est qu’à côté de l’angoisse sanitaire l’inquiétude économique et sociale progresse. Churchill a gagné la guerre mais a ensuite perdu les élections. Notre majorité doit éviter ce destin churchilien en réimpulsant une dynamique économique dans le pays simultanément à la stratégie vaccinale. Or, pour le moment, je constate que le plan de relance démarre trop mollement. De premières attributions de crédits ont été effectuées sur le terrain mais nous péchons par une centralisation excessive.

Les préfets font du bon travail pour repérer les projets et arbitrer les projets locaux mais ils sont ensuite contraints de tout faire remonter dans les ministères. Ce mécanisme entraîne une lenteur démesurée. Surtout, il uniformise le plan de relance alors que l’on attendait une répartition différenciée des fonds selon les départements. Ma crainte, c’est que ce plan de relance ne soit pas assez incarné sur le terrain.

Les sous-préfets à la relance installés par le gouvernement ne permettent pas d’adapter la relance aux attentes des collectivités ?

Je n’ai pas encore eu l’opportunité de les rencontrer. Ce qui est problématique à l’égard d’un parlementaire, de surcroît président de groupe… Il faut beaucoup plus engager les élus locaux et les parlementaires dans la définition des priorités locales, l’arbitrage des enveloppes financières et l’incarnation sur le terrain. Ce n’est pas une question de bienséance. C’est une question de confiance pour les citoyens. Financer le nouveau stade d’une collectivité locale, c’est très bien, mais si seul le chef d’entreprise est au courant, ça ne sert à rien pour provoquer un choc de confiance dans le pays. Ce qu’il faut c’est un plan Marshall. Chaque Français a une part de ce plan en lui-même. Tous les responsables politiques, y compris l’opposition, tous les partenaires sociaux, tous les corps intermédiaires ont ce devoir collectif de se mobiliser pour que la relance provoque le retour de la croissance qui financera la dette de la crise sanitaire. Le combat n’est pas perdu mais aujourd’hui j’ai le sentiment que l’on fait de la relance comme s’il n’y avait pas urgence…

L’État est-il devenu inefficace ?

La chaîne politico-administrative, tellement complexe, n’arrive plus à se mobiliser. Les bonnes décisions qui mettent deux semaines à être appliquées, ça agace les Français. On a du retard à l’allumage pour les masques ? Et après on se rétablit. On perd du temps sur les tests ? Et après on se rattrape. Même chose sur les vaccins. Et maintenant sur le plan de relance. C’est révélateur d’un État qui fonctionne quand les procédures sont éprouvées mais qui, face à un événement nouveau, ne sait pas être agile et accompagner le sens de l’initiative. Nous devons reconnaître que nos impulsions politiques ont été appliquées trop tardivement. Le groupe démocrate proposera une mission d’information parlementaire pour regarder sans filtre, sans fard, ce qu’il s’est passé et trouver des solutions.

La situation des étudiants se dégrade. Que préconisez-vous pour la jeunesse ?

Nous sommes inquiets par le dénuement pécuniaire et de la détresse psychologique d’un grand nombre d’étudiants. Nous réclamons un plan exceptionnel d’accompagnement de cette génération pour faciliter son entrée sur le marché du travail. Notamment via l’approfondissement de tous les dispositifs exceptionnels sur l’apprentissage, le premier emploi et la formation professionnelle continue. Avec l’aide des partenaires sociaux, je souhaite que le gouvernement propose dans les semaines qui viennent un grand plan de promotion de l’égalité des chances et de promotion sociale de cette génération 2020. En 2007, François Bayrou proposait deux emplois sans charge dans chaque entreprise. Le moment est venu de reprendre cette idée. 

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