Jean-Noël Barrot : "Nous avons mis une pression maximale aux réseaux sociaux à la suite des émeutes"
Adrien Schwyter pour ChallengesLe ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, Jean-Noël Barrot, revient auprès de Challenges sur la convocation des représentants des réseaux sociaux vendredi soir face aux émeutes, mais également sur le contenu de son projet de loi afin de réguler et de sécuriser l'espace numérique. Lire son entretien.
Challenges : Quelles mesures spéciales ont été prises par les réseaux sociaux suite aux émeutes ?
Jean-Noël Barrot : Nous avons convoqué avec Gérald Darmanin les représentants de TikTok, Snapchat, Twitter et Meta vendredi soir.
Nous leur avons mis une pression maximale pour qu'ils respectent leurs obligations légales concernant le retrait de contenus illicites et la réponse aux réquisitions.
Nous avons également demandé à ces plateformes-là plus grande vigilance sur leurs fonctionnalités qui peuvent être dévoyées pour porter atteinte à l'ordre public. Force est de constater que nos demandes ont été entendues et que des mesures sont prises par les grandes plateformes pour retirer rapidement les contenus signalés.
Ces mesures prises en urgence par les réseaux à notre demande deviendront obligatoires dès le 25 août prochain avec l'application du règlement européen sur les services numériques. Ce dernier contraindra les plateformes à corriger tout effet négatif réel ou prévisible de leur service sur la sécurité publique, sous peine de sanction pouvant aller jusqu'à 6% du chiffre d'affaires mondial, voire jusqu'au bannissement.
Le projet de loi numérique a été présenté fin juin devant le Sénat. Il présente une multitude de mesures disparates : filtre anti-arnaques, renforcement de l'Arcom dans la lutte contre la pornographie, ou une peine de bannissement des réseaux sociaux en cas de cyberharcèlement. Ces mesures peuvent-elles être vraiment efficaces ?
Le projet de loi apporte des protections nouvelles avec un objectif unique : sécuriser et pacifier l'espace numérique.
Souvent ce sont les Français les plus vulnérables qui sont la cible de cyberattaques, ou exposés à des contenus inappropriés en ligne. Depuis cinq ans la France a montré la voie avec le contrôle parental, la lutte contre le cyberharcèlement, le DSA et le DMA, deux règlements que la France a poussés au sein de l'Union européenne.
Le filtre anti-arnaques va-t-il réduire le phishing massif, par mail ou sms, étape souvent préparatoire à des escroqueries ?
Nous avons tous déjà reçu des SMS avec des arnaques au compte formation, ou nous demandant de régler des amendes, ou encore d'aller chercher un Chronopost. Nous avons tous hésité à cliquer et à donner nos données personnelles ou bancaires.
Ce sont 18 millions de Français qui en ont été victimes, dont la moitié a perdu de l'argent.
Aujourd'hui il est beaucoup trop facile de lancer une campagne frauduleuse. Les Jeux olympiques (JO) de Paris sera une occasion de rêve pour les pirates et mafias pour piller des données personnelles afin de réaliser une usurpation d'identité (avec souvent ouverture d'un crédit à la consommation) et mener des attaques sur des institution françaises.
Ce filtre permettra de rediriger les internautes vers une page sécurisée. Techniquement nous recensons les URL de sites malveillants, et via les fournisseurs d'accès à internet (FAI), nous redirigeons les internautes vers une page de mise en garde.
Cela ne va pas arrêter toutes les campagnes mais cela découragera sûrement les pirates d'en lancer. Nous voulons ériger une digue contre ce phénomène massif.