Jean-Noël Barrot : « C’est le moment, après des décennies d’insouciance, de reprendre notre destin et donc notre sécurité en main »
Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, était l’invité d’Apolline de Malherbe sur BFMTV et RMC ce jeudi 6 mars 2025.
Défense européenne : « Nous ne pouvons nous reposer que sur nous-mêmes »
Notre ministre de l’Europe et des Affaires étrangères a réaffirmé au micro de BFMTV et RMC l’urgence pour l’Europe de renforcer son indépendance en matière de défense. « Nous vivons un moment historique et un moment grave », a-t-il insisté, mettant en avant la nécessité pour les Européens de « reprendre leur destin en main » après des décennies d’insouciance sous protection américaine.
Au lendemain de l'allocution d'Emmanuel Macron, Jean-Noël Barrot a salué cette prise de parole nécessaire qui, « après des semaines d'efforts diplomatiques, [a permis au] président de la République [de] rendre compte aux Français de la situation et de l'horizon qui est devant nous ».
Ce que le président de la République a dit hier, c'est que la ligne de front ne cesse de se rapprocher de nous, que la menace est devenue existentielle.
Notre vice-président a dressé un constat alarmant de l’évolution de la menace russe depuis trois ans : de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine aux cyberattaques, en passant par des actes de sabotage et des ingérences électorales dans l’Union européenne.
L’agressivité redoublée de Vladimir Poutine ne connaît pas de frontières et se rapproche sans cesse de nous. (...) Si nous restons aveugles à cette transformation de la menace, nous serons, oui, un jour ou l'autre, entraînés vers la guerre.
Face à cette réalité, la réponse européenne doit être à la hauteur. Jean-Noël Barrot a salué les efforts déjà engagés pour renforcer les capacités militaires, tout en soulignant la nécessité d'un changement d’échelle et se « donner les moyens de notre indépendance ». L’effort européen discuté ce jeudi à Bruxelles vise à permettre des dépenses militaires hors des critères comptables européens et à favoriser l’emprunt commun pour financer les besoins des États membres.
Nous ne pouvons nous reposer que sur nous-mêmes. Et c'est le moment, après des décennies d'insouciance pendant lesquelles nous, les Européens, avons vécu sous la protection américaine, de reprendre notre destin en main et en particulier, et c'est le plus fondamental, notre sécurité et notre défense.
Dans cette logique, le ministre a plaidé pour une production et un approvisionnement militaires européens, condition essentielle à l’indépendance et à la prospérité du continent.
Nous exigeons une préférence européenne très forte, car c'est la condition de notre indépendance. Nous ne supportons plus d'être dépendants pour nos approvisionnements militaires et pour notre armement.
Concernant la dissuasion nucléaire, Jean-Noël Barrot a répété les mots du président de la République qui a exclu tout partage de la force française, tout en précisant qu'il avait accepté d’ouvrir un dialogue stratégique sur cette question. Une décision qu'il a qualifiée d’« historique », tout en rappelant que « notre dissuasion nucléaire reste autonome de bout en bout ».
Ukraine : « Il ne faut pas inverser les rôles »
Jean-Noël Barrot a vivement critiqué les discours relativisant la responsabilité de la Russie dans la guerre en Ukraine, visant notamment La France insoumise :
Depuis trois ans, La France Insoumise se prosterne devant Vladimir Poutine et continuent d'affirmer que ce sont l’Europe et les États-Unis qui ont provoqué cette guerre. C’est tout l'inverse.
Notre ministre a rappelé la tragédie infligée au peuple ukrainien : « Poutine porte une immense responsabilité dans le sort des enfants ukrainiens déportés, dans les opposants assassinés. » Il a également souligné que la Russie ne se limite pas au conflit armé, mais utilise également la manipulation électorale pour déstabiliser ses voisins, citant les cas de la Roumanie, de la Géorgie et de la Moldavie.
Affirmant le soutien de la France à Volodymyr Zelensky, dont la légitimité ne fait aucun doute, il a conclu en insistant sur la nécessité d’un « réarmement des esprits » :
La guerre que nous voulons éviter et la paix que nous voulons garantir ne se joueront pas seulement dans nos dépenses militaires, elle se jouera aussi dans notre force d'âme, dans les esprits. Et c'est ce réarmement des esprits auquel il faut nous préparer.