Jimmy Pahun - Proposition de loi contre les plastiques dangereux pour l'environnement et la santé
Dans le cadre de la niche parlementaire du Mouvement Démocrate à l'Assemblée nationale, la proposition de loi de Jimmy Pahun, Député du Morbihan, visant à lutter contre les plastiques dangereux pour l’environnement et la santé a été adoptée ! Retrouvez sa présentation du texte.
J’ai l’honneur de soumettre à votre examen, que je sais attentif et que j’espère bienveillant, la proposition de loi visant à lutter contre les plastiques dangereux pour l’environnement et la santé.
Ces dernières années, la France a renforcé son arsenal législatif pour mieux lutter contre la pollution plastique. Il reste cependant tant à faire pour imaginer un jour juguler cette pollution omniprésente dans la terre, dans la mer et jusque dans le corps humain.
La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi AGEC, promue en son temps par Brune Poirson, constitue la pierre angulaire de notre dispositif de lutte contre la pollution plastique. Elle acte en particulier une planification quinquennale visant à atteindre en 2040 l’objectif « zéro plastique à usage unique » ; elle établit également de nombreuses interdictions et obligations en matière d’usage et d’emballage. Grâce à cette loi, nous avons aussi été parmi les premiers – peut-être le premier – pays en Europe à prévoir l’interdiction des microplastiques ajoutés dans des produits tels que les cosmétiques, les peintures et les engrais.
La Commission européenne défend ce projet au niveau européen dans le cadre de la révision du règlement Reach – enregistrement, évaluation, autorisation des substances chimiques et restrictions applicables à ces substances. Nous avons aussi beaucoup fait en faveur de l’information du consommateur, en généralisant le marquage relatif aux caractéristiques environnementales des produits. Dans le même temps, nous avons limité certaines allégations environnementales trompeuses ou abusives.
La loi AGEC a été complétée sur certains points par la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi climat et résilience. Elle interdit notamment les emballages en polystyrène, s’ils ne sont pas recyclables et recyclés, au 1er janvier 2025.
Avec des collègues de plusieurs groupes politiques, issus de la majorité comme de l’opposition, nous avions défendu un amendement commun pour faire disparaître ces emballages jamais recyclés et dont la toxicité pour la santé et pour l’environnement fait l’objet de nombreux travaux scientifiques. Parmi ces députés, il y avait nos anciens collègues Maina Sage, Laurianne Rossi et François-Michel Lambert, dont je n’oublie pas l’engagement contre la pollution plastique – je veux les saluer ici en votre nom. Le choix fait par le Sénat d’ajouter à cette interdiction une condition de recyclabilité a été ensuite validé par la commission mixte paritaire.
Par la présente proposition de loi, je me suis autorisé à soumettre à nouveau cette question à la représentation nationale. J’ai en effet estimé que les engagements solennels pris devant le Sénat par les industriels, regroupés au sein du consortium PS25, n’ont pas été tenus.
Avant la fin de 2021, ils devaient nous apporter la preuve qu’une filière de recyclage du polystyrène (PS) serait opérationnelle au 1er janvier 2025, ou, à défaut, définir une trajectoire de sortie progressive du PS. Un rapport a bien été produit en décembre dernier, mais il n’a pas fait l’objet d’une analyse indépendante, qu’elle soit publique ou privée, qui nous aurait permis de valider les allégations du consortium PS25.
En commission, nous avons fait le choix de ne pas modifier la loi « climat et résilience » ; nous avons donc réécrit l’article 1er de la proposition de loi. Je ne retire aucun arguments ni rien de ce que j’ai pu exposer aux uns et aux autres quant à l’impact du polystyrène sur la santé et l’environnement. J’accepte cependant de considérer qu’il est compliqué de modifier le cadre législatif un an à peine après la promulgation de la loi « climat et résilience ».
Je ne reste pas moins convaincu qu’au 1er janvier 2025, le PS ne sera ni recyclable ni recyclé.
Le consortium a deux ans pour finaliser son concept en laboratoire et pour l’industrialiser, pour obtenir les certifications sanitaires et environnementales nécessaires, pour lancer la construction des différentes usines de recyclage en comptant le temps incompressible des démarches administratives, pour les rendre opérationnelles, et enfin pour recycler de manière effective plus de 50 % des déchets en polystyrène collectés.
En 2025, la loi sera appliquée : les industriels qui n’auront pas changé de matériau se verront interdire la mise sur le marché de leurs emballages en PS.
Je le dis avec humilité, solennité et fermeté, du haut de cette tribune, devant notre assemblée : la loi sera appliquée. Elle le sera quels que soient les investissements lancés et quels que soient les progrès réalisés. Je le dis à ceux qui refusent la transition immédiate vers des matériaux et des pratiques plus durables : les fausses promesses ne vous font pas gagner du temps, elles vous en font perdre.
Je ne m’attarderai pas, faute de temps, sur les questions importantes soulevées par le recyclage chimique. Nous ne savons pas encore grand-chose de l’impact environnemental de ces projets, notamment en ce qui concerne les rejets de polluants et les émissions de gaz à effet de serre qu’ils induisent. Les émissions de CO2 du recyclage chimique par pyrolyse seraient jusqu’à neuf fois supérieures à celles du recyclage mécanique. Nous ne devons donc pas miser uniquement sur le recyclage, a fortiori chimique, si nous voulons respecter l’accord de Paris.
La lutte contre la pollution plastique est ainsi un enjeu énergétique majeur pour nos sociétés, appelées à embrasser plus intensément la notion de sobriété afin de répondre aux crises géopolitiques et climatiques. Il est donc plus que jamais important d’acter, en France et en Europe, la fin du recyclage comme première solution à la pollution plastique. Un rapport publié la semaine dernière par la Cour des comptes pointe d’ailleurs notre incapacité, depuis maintenant plus de dix ans, à tenir nos objectifs de collecte, de tri et de recyclage.
Nous devons donc recentrer le recyclage sur les quelques plastiques pour lesquels les filières sont d’ores et déjà très efficaces, et, pour le reste, mettre l’accent sans attendre sur la réduction à la source. C’est selon moi l’objectif majeur de l’article 1er, réécrit en commission.
L’exportation de déchets plastiques à l’étranger est une autre conséquence de notre incapacité à gérer les déchets que nous produisons. Comme le montre un rapport de Human Rights Watch publié le mois dernier, une telle pratique nuit gravement à la santé et à l’environnement des populations et des pays exposés. L’Union européenne doit se pencher très bientôt sur cette question et je souhaite, Mme la secrétaire d’État chargée de l’écologie, que la France défende dans ce cadre une interdiction de l’exportation des déchets plastiques hors de l’Union européenne. Il faut mettre un terme à cette aberration éthique, environnementale, sanitaire, économique et sociale.
Des amendements de suppression ont été déposés sur les différents articles. Je regrette que la proposition de loi ne fasse pas consensus sur les bancs de notre assemblée, car elle répond à une demande forte de nos concitoyens.
Selon un récent sondage Ipsos, près de 70 % d’entre eux sont prêts à changer en profondeur leurs habitudes pour lutter contre le changement climatique. Un autre sondage montre que 75 % des Français souhaitent la fin des plastiques à usage unique.
À combien ces pourcentages s’élèvent-ils chez nos enfants ? Je ne peux vous donner le chiffre, mais j’observe leur extrême préoccupation face à l’immensité de cette pollution, qui constitue, pour beaucoup d’entre eux, le moteur d’un engagement associatif et civique puissant. À cet égard, je salue les étudiants que j’ai rencontrés lors d’une conférence à Science Po Paris. Ils ont tenu à être présents dans l’hémicycle ce matin pour assister à nos débats.
Je veux remercier l’ensemble des membres de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire pour la qualité des échanges que nous avons eus sur ce sujet la semaine dernière, et particulièrement les responsables des groupes avec qui, je crois, nous avons bien communiqué tout au long du processus législatif.
Je formule maintenant le souhait que notre collaboration perdure et que nous continuions ensemble nos travaux. Je remercie enfin les membres du groupe Démocrate (MoDem et indépendants), vous invite à la projection du film Cher plastique, une histoire d’amour toxique , qu’organise mon collègue Philippe Bolo, mercredi prochain à dix-neuf heures, et nous souhaite de bons débats.