Marc Fesneau : « Il faut une coalition sinon le pays va sombrer dans le chaos »

Retrouvez ci-dessous l'entretien accordé par Marc Fesneau pour Les Echos et paru ce mercredi 21 août 2024.

Cet entretien est également disponible sur le site internet des Echos

Propos recueillis par Grégoire Poussielgue

Les Echos - Plusieurs blocs politiques ont envoyé des lettres la semaine dernière pour tenter de débloquer la situation. Cela peut-il servir à quelque chose ?

MARC FESNEAU - Le sujet n'est pas de dire qu'il n'y a pas de majorité. On le sait. Ces courriers montrent une volonté de travailler ensemble, mais ils sont adressés à des gens qui ne veulent pas saisir cette main tendue. Donc ils n'ont malheureusement pas de portée, et contribuent parfois trop à une forme d'agitation estivale.

Emmanuel Macron reçoit à partir de vendredi les chefs de parti et présidents de groupe. Est-ce que cela peut débloquer la situation ?

Cela va permettre de voir ce qui est possible ou pas. Chacun doit sortir de sa zone de confort, et en particulier au sein du Nouveau Front populaire (NFP). J'ai écouté avec attention les prises de parole de Patrick Kanner [président du groupe socialiste au Sénat, NDLR] et de Raphaël Glucksmann qui vont dans ce sens. Personne n'a de majorité à l'Assemblée nationale et il n'y aura aucune majorité stable si le PS et la gauche de gouvernement ne font pas un mouvement. Au Parlement européen, je rappelle que les socialistes sont alliés à la droite et aux centristes contre l'extrême droite. La question est de savoir si le PS veut s'affranchir de l'extrême gauche. Emmanuel Macron cherche à trouver un Premier ministre et un gouvernement qui soit assez stable dans les mois qui viennent, donc on peut espérer de vendredi un moment de clarification vis-à-vis des Français. Au final il faut un gouvernement pour la France, or cela ne pourra pas se faire sans que nous fassions des pas les uns vers les autres.

Vous estimez donc que le PS doit s'affranchir de LFI ?

Oui. La gauche modérée doit s'affranchir de LFI. Son problème depuis 2022 est de ne pas l'avoir fait et ils sont aujourd'hui inféodés. Et je le dis d'autant plus que le Modem avait su s'affranchir en son temps et je sais que ce n'est pas facile. Il est impossible de gouverner avec LFI, qui est sur un mode révolutionnaire, autant sur le plan politique que social. De plus, je rappelle que l'immense majorité du pays n'est pas du tout sur la ligne conflictualisante de Jean-Luc Mélenchon.

Emmanuel Macron a-t-il les cartes en main ?

Institutionnellement oui, car c'est lui qui nomme le Premier ministre et est garant des institutions. Et il a été réélu en 2022, ce que personne ne peut contester. Lui refuser ce pouvoir de nomination de Premier ministre, c'est céder à la pression de Jean-Luc Mélenchon. C'est nier les fondements de la Ve République. Pour imposer une cohabitation, il faut une majorité au Palais-Bourbon, or le NFP n'en a pas. Donc là, il faut surtout trouver une cohabitation entre les groupes du centre, de droite et de gauche modérée au Parlement.

Pourquoi ne pas nommer Lucie Castets à Matignon, qui représente le bloc le plus important à l'Assemblée nationale ?

En l'état actuel des choses, un gouvernement Lucie Castets mettrait quelques jours au plus à être renversé par une censure de l'Assemblée nationale. Les Français ne veulent pas un nom pour un nom : ils veulent un gouvernement capable de répondre à leurs besoins. Un gouvernement d'une dizaine de jours ne ferait qu'augmenter l'impatience. Créer un gouvernement stable prend un peu plus de temps, mais c'est la seule attitude sérieuse.

Espérez-vous encore une coalition ?

C'est envisageable et c'est surtout une absolue nécessité, sinon le pays va sombrer dans le chaos. Quelle est l'alternative ? Un gouvernement NFP ? Il ne tiendra pas trois semaines.

Je ne vois aucun scénario alternatif, donc aujourd'hui, nécessité fait loi.

Comment avez-vous interprété sa volonté de destituer le président de la République ?

Jean-Luc Mélenchon n'est pas là pour gouverner. Il instrumentalise Lucie Castets. A chaque fois qu'elle ou que d'autres commencent à évoquer un compromis, il fait tout pour l'empêcher. Chez lui, tout est dans la conflictualité et il pense qu'on ne peut avancer que comme ça. Donc c'est pour ça qu'il agit ainsi, pour remettre en permanence du conflit. On ne peut pas se laisser embarquer par des gens qui passent leur temps à dresser les uns contre les autres.

Cela montre qu'en France on est encore loin de la culture du compromis, de la discussion de fond, à la grande différence par exemple de l'Allemagne. Dans certains partis français, on pense encore plausible de dire « mon programme ou rien ». Pour Jean-Luc Mélenchon, le mot compromis est un gros mot, or il en faut pour avancer, sinon ce sera le RN. ...

Cet entretien est également disponible sur le site internet des Echos

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